Soudan: L'armée appelée à transférer «rapidement» le pouvoir aux civils après la destitution de Omar El-Béchir

Publié par Dk News le 12-04-2019, 15h59 | 8

Au terme de près de quatre mois de mouvement de contestation populaire, le président soudanais Omar el-Béchir, au pouvoir depuis trois décennies, a été destitué jeudi par l'armée qui a instauré un couvre-feu et mis en place un conseil militaire de transition pour deux ans, alors que la communauté internationale appelle à un transfert «rapide» du pouvoir aux civils.

Le ministre soudanais de la Défense, Awad Mohamed Ahmed Ibn Auf, a été investi jeudi à la tête du conseil de transition du Soudan et prêté serment sur la Constitution en tant que président du Conseil militaire de transition, et Kamal Abdul-Marouf Al-Mahi a prêté serment en tant qu'adjoint, après avoir annoncé la destitution du président soudanais Omar el-Béchir et de son gouvernement le plaçant en détention dans un lieu sûr .

Il a en outre décrété l'état d'urgence pour une durée de trois mois, et un couvre-feu d'une durée d'un mois.

Le ministre de la Défense a indiqué qu'un conseil militaire serait créé pour diriger le pays pendant une période de transition de deux ans.

Il a également annoncé la suspension de la Constitution provisoire de la République du Soudan, ainsi que la fermeture de l'espace aérien soudanais pendant 24 heures et la fermeture de tous les postes frontière du pays jusqu'à nouvel ordre.

Alors que la communauté internationale a fait part de sa crainte de voir un régime militaire aux commandes du pays, le Conseil militaire de transition, a assuré vendredi qu'il allait dialoguer avec toutes «les entités politiques» du pays et que le futur gouvernement sera «un gouvernement civil».

«Nous allons dialoguer avec toutes les entités politiques pour préparer le climat des échanges en vue de la réalisation de nos aspirations», a déclaré le général Omar Zinelabidine, membre du Conseil militaire de transition, assurant que le futur gouvernement serait «un gouvernement civil», mais il n'a pas précisé de date quant à sa mise en place.

Il a néanmoins indiqué que le ministre de la Défense sera membre de l'armée et que les militaires «participeront à la désignation du ministre de l'Intérieur».

Depuis le 19 décembre dernier, le Soudan est le théâtre de manifestations populaires contre la détérioration de la situation économique et la hausse des prix des produits de première nécessité.

Mettant dans un premier temps des revendications socio-économiques, les manifestants ont porté leurs revendications pour réclamer la destitution d'el-Bachir.

Réunion du Conseil de sécurité de l'ONU sur le Soudan

Suite à l'annonce de la destitution par l'armée du président soudanais Omar al-Bachir, les Etats-Unis et cinq pays européens (la France, le Royaume-Uni, l'Allemagne, la Belgique et la Pologne) ont exprimé leur préoccupation quant à l'évolution de la situation, la «fermeture des frontières», le «couvre-feu», et demandé une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU sur le Soudan, pour le vendredi qui va se dérouler à huis clos.

«Le plus important est qu'il n'y ait aucune violence contre les manifestants», a souligné l'ambassadeur britannique adjoint, Jonathan Allen.

Le secrétaire général des Nations Unies, Antonio Guterres a réitéré de son côté, son appel au calme au Soudan et à la plus grande retenue de tous, réaffirmant que les Nations Unies sont prêtes à soutenir le peuple soudanais dans la voie à suivre.

La cheffe de la diplomatie européenne Federica Mogherini a quant à elle demandé à l'armée soudanaise le transfert «rapide» du pouvoir à un gouvernement civil de transition, soulignant la volonté de changement exprimée par la population. «Seul un processus politique crédible et inclusif peut satisfaire les aspirations des Soudanais et déboucher sur les réformes politiques et économiques dont le pays a besoin», a déclaré Mme Mogherini dans un communiqué.

«Cela ne peut être obtenu que par le transfert rapide (du pouvoir) à un gouvernement civil de transition», a-t-elle ajouté. Face aux nombreuses répercussions du mouvement de protestation qui dure près de quatre mois, le Fonds central d'intervention d'urgence (CERF) des Nations Unies a débloqué un fonds d'urgence de 26,5 millions de dollars destiné à fournir une assistance vitale au cours des six prochains mois à plus de 800 000 personnes affectées par la crise économique et l'insécurité alimentaire dans sept Etats du Soudan.

«La crise économique a eu des répercussions sur la situation humanitaire au-delà de l'insécurité alimentaire», a déclaré Mark Lowcock, secrétaire général adjoint aux affaires humanitaires et Coordonnateur des secours d'urgence.

Un total de 5,8 millions de personnes auraient été touchées par l'insécurité alimentaire entre janvier et mars 2019, en nette hausse par rapport à 2018, et leur nombre devrait encore augmenter durant la période de soudure à partir de mai 2019.