Hamrouche: un accord sur "le schéma final de l’organisation de l’Etat" est primordial

Publié par Dknews le 15-04-2019, 18h06 | 50

L'ancien chef de gouvernement, Mouloud Hamrouche, a jugé lundi "primordial" pour les Algériens d'obtenir un accord sur "le schéma final de l’organisation de l’Etat et ses pouvoirs régaliens", appelant l'armée qui a adhéré aux revendications légitimes du peuple à "contribuer au parachèvement de l’édification de l’Etat national".

" (...) il serait primordial d’obtenir des tenants du système, de l’armée et des partis un accord, sur le schéma final de l’organisation de l’Etat et ses pouvoirs régaliens, la place de l’armée comme structure étatique de défense et de sécurité, la forme démocratique de gouvernement, de contrôle politique et institutionnel qui seront en œuvre à l’avenir", a-t-il écrit dans une contribution intitulée "Impasses, menaces et issues" publiée sur les colonnes du quotidien El-Watan.

Pour Mouloud Hamrouche, "la question n’est pas de savoir qui détient aujourd’hui plus de capacité, suffisamment d’intelligibilité et de ressort pour sauver le pays et son armée", mais "comment contribuer à canaliser cette vitalité et ce génie d’un peuple puissant par sa jeunesse et par son émigration, en Europe et par le monde, qui tient à faire aboutir son projet ‘Algérie’".

Il a estimé, à ce titre, qu'il serait "exagéré de croire que la démission de Bouteflika, la désignation du chef de l’Etat intérimaire, l’organisation d’une présidentielle vont colmater toutes les failles, faire disparaître tous les griefs, soigner tous les stigmates et concrétiser toutes les espérances".

Pour cet homme d'Etat, "cela risque de nous faire perdre de vue des leçons précieuses de l’histoire de notre jeune gouvernance à l’algérienne qui nous a conduit là où nous sommes aujourd’hui et nous faire oublier de ruineux gaspillages en temps et en ressources humaines et financières".

L'ancien chef de gouvernement a regretté, dans ce contexte, "l'incapacité, aujourd’hui, comme hier, des élites gouvernantes à faire aboutir un processus d’édification de l’Etat national ou d’imaginer et de mettre en place des instruments et mécanismes légaux d’une gouvernance résiliente et légitime".

Ces échecs, a-t-il poursuivi, "sont à l’origine de beaucoup de nos revers, gâchis, retards et impasses".

"Ils constituent, à eux seuls, de redoutables menaces sur nos minces et précieux acquis de liberté et de souveraineté arrachés au prix du sang d’innombrables martyrs et d’immenses sacrifices", a-t-il souligné.

Selon Mouloud Hamrouche, "les contributions et suggestions avancées et proposées par nos politiques, penseurs, experts et exégètes sont dignes d’intérêt, mais restent sans effet".

"Elles calent toutes, par-delà les avantages et les limites intrinsèques de chacune, par l’absence cruelle de cette puissante mécanique qui gouvernerait l’élaboration d’une solution, sa mise en œuvre et le contrôle de son exécution jusqu’à son aboutissement final. Elles calent aussi par l’absence de détermination au préalable d’un schéma final. C’est le schéma final qui indique le modèle, détermine les processus et définit les champs et les temps", a-t-il expliqué.

Il a soutenu que les semaines à venir "seront "critiques et décisives pour démontrer si les élites politiques seront capables d’aller de l’avant en mettant à l’abri l’Etat et l’armée par le développement de vrais instruments et mécanismes d’une démocratie gouvernante et d’un vrai contrôle par de vraies institutions et de vrais élus".

Il a mis en garde contre "l'absence d’issues et de difficulté d’agrégations et de convergences à la hauteur de la mobilisation unitaire des Algériens, qui risquent de ternir encore plus l’image et la réputation de nos élites gouvernantes et de faire croire qu’elles n’arrivent pas à s’entendre sur un partage des pouvoirs, des privilèges ou pour des raisons chauvines".

L'ancien chef de gouvernement a prévenu, à ce propos, qu'"une course au pouvoir et aux postes risque de faire échouer toutes les bonnes volontés et gâcher toutes les opportunités", soulignant, d'autre part, que "le commandement (de l'ANP, NDLR) en rejoignant le peuple dans ses revendications légitimes a su sauvegarder le statut national de l’armée".

Néanmoins, il a estimé qu'il lui reste à "contribuer au parachèvement de l’édification de l’Etat national par la mise en place d’une Constitution et d’institutions de vrais pouvoirs d’autorisations, de régulations, d’habilitations et de contrôles".

"Cela mettra l’armée définitivement à l’abri des conflits politiques partisans, permettra de servir de base politique au gouvernement ou d’être un outil entre les mains d’un omnipotent", a-t-il justifié.

Détaillant sa vision, Mouloud Hamrouche a estimé qu'"une mobilisation populaire, quelles que soient sa dimension et sa profondeur, ne donnera pas facilement de prolongements humains, politiques et institutionnels, même à travers des instances transitoires ou des conférences nationales".

"Cela reste de la responsabilité et du devoir de l’armée et de toutes les élites nationales", a-t-il soutenu, soulignant que ce mouvement populaire offre à l’armée et aux partis des "possibilités certaines".

Ce mouvement du peuple, a-t-il relevé, "attend d’eux des perspectives prometteuses avant qu’il ne s’estompe ou sombre dans des violences primaires".

Pour Mouloud Hamrouche, "le hirak pacifique a produit des acquis appréciables", soutenant que ce mouvement populaire "a empêché une confrontation sanglante entre clans par l’intermédiaire des réseaux d’allégeance et d’obédience".

"Par son ampleur unitaire, le mouvement a évité à l’armée d’intervenir et de garder sa cohésion intacte. Ensuite avec l’évolution de la situation au sein du sérail, l’armée a pris naturellement et formellement position avec le peuple. Ce qui lui permet de ne pas être en contradiction avec son statut d’armée nationale et de ne pas être une cible fragile à détruire par d’autres puissances étatiques étrangères, particulièrement méditerranéennes ou de l’OTAN, à l’instar de celles de l’Irak, de la Libye et de la Syrie", a-t-il ajouté.