Les mines antipersonnel le long de la frontière Est : séquelles physiques et psychologiques omniprésentes 58 ans après l’indépendance

Publié par DK NEWS le 03-04-2020, 16h50 | 35

Bergers, agriculteurs, chasseurs et enfants de campagne des communes de Khedhara, Ouled Moumène, Sidi Fredj, Ain Zana, Ouled Driss, Ouilène, Merahna et Taoura n’arrivent pas à oublier l’horreur des explosions des mines sournoises semées sur leur terre par l’armée française durant la révolution libératrice.
A la veille de la célébration le 4 avril de la journée internationale de sensibilisation au problème des mines et l’assistance à la lutte anti-mine, Amar Gouasmia habitant de la commune de Khedhara (53 km à l’Est de Souk Ahras) garde gravée dans son corps l’atrocité assassine de ces mines qui lui ont valu l’amputation de sa jambe. Aujourd’hui, Amar évoque encore avec peine les moments épouvantables de cette explosion survenue en 1960, alors qu’il a vait 9 ans et  jouait innocemment avec deux autres enfants qui eux avaient perdu la vie dans la déflagration de la mine.
Evacué vers l’hôpital, les médecins traitèrent ses blessures mais décidèrent qu’il fallait lui amputer une jambe, souligne Amar qui affirme être resté invalide depuis et bénéficie actuellement d’une allocation mensuelle de 18.000 DA.
"Depuis l’explosion, j’ai perdu le goût à la vie", se confie ce désormais septuagénaire qui invite les jeunes à tirer des leçons des souffrances de leurs aînés. Amar Gouasmia n’est pas la seule victime des mines anti-personnel françaises. Malek Bouzerafa également de Khedhara  a payé un prix encore plus cher.
A 13 ans, une explosion l’amputa de ses deux jambes. Depuis, la vie a cessé d’être rose, affirme Malek qui raconte qu’alors qu’il faisait paître son troupeau, ses pieds se posèrent fatalement sur un objet dur qui explosa immédiatement lui donnant l’impression, confie-t-il, que son frêle corps s’était disloqué en mille morceaux. Pour les habitants de ces localités frontalières, le spectre de ces mines rode toujours plus particulièrement pour les victimes de ces mines et leurs familles qui en gardent encore les séquelles physiques et psychologiques, soutient Malek qui assure que la peur de ces engins et de la mutilation  a poussé beauc oup d’agriculteurs et éleveurs à renoncer à leurs  activités. De son côté, Moussa Rouabhia, membre de la ligue algérienne de défense des droits de l’homme à Souk Ahras, considère que les mines antipersonnel représentent "l’autre visage macabre de la France coloniale" qui a semé la mort partout dans le pays. Rouabhia qui a mis l’accent sur l’effort méritoire du ministère de la
Défense Nationale et de l’Armée nationale populaire ayant permis d’éliminer près de 80 % de ces mines a estimé nécessaire pour les instances concernées "d’offrir une meilleure prise en charge des victimes de ces mines et concevoir un texte de loi en leur faveur". Selon ce même enseignant d’histoire contemporaine à l’université Mohamed Cherif Messaâdia, des études nouvelles indiquent que l’armée française avait semé en Algérie durant la guerre de libération nationale, 11 millions mines dans des champs de 45 mètres de large de part et d’autre des lignes électrifiées à 5.000 volts Challe et Morice dans une tentative de fermeture des frontières pour empêcher l’acheminement des armes et munitions aux moudjahidine dans les maquis.