Alphabétisation Aicha Barki, une "pourfendeuse" convaincue et engagée de l’illettrisme

Publié par DK NEWS le 01-06-2020, 16h23 | 19

 Présidente de l’association d'alphabétisation "Iqra", la défunte Aïcha Barki, décédée il y a une année, aura été, plus de deux décennies durant, une "pourfendeuse" engagée de l’illettrisme qu’elle traquera dans les recoins les plus reculés de l’Algérie, en même temps qu’une militante convaincue des droits de l’Homme.
La défunte, a qui le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, a décerné dimanche à titre posthume la médaille du mérite national "Achir" lors d'un Conseil des ministres, a fait de la lutte contre l’illettrisme et son pendant, qu’est l’ignorance, sa raison d’être et son noble leitmotiv pour une existence riche, engagée et généreuse.
En fondant, en 1990, l’Association Iqraa (lis, ndlr), Aïcha Barki s’est lancée dans un projet des plus ambitieux et des plus méritoires tant la portée de celui-ci allait se confirmer au fil du temps et s’avérer porteur autant pour l’individu que la Nation.
En s’attaquant à la "malédiction" de l’analphabétisme, l’un des plus néfastes héritages de la présence coloniale, elle se sera investie, sans répit, dans l’un des chantiers le s plus sensibles de l’Algérie postindépendance.
C’est que, même trois décennies après le recouvrement de la souveraineté du pays, le défi de venir à bout des sombres fiefs de l’illettrisme était encore posé.
Native, en 1946, de la localité de Ain Bessam (Bouira), elle était destinée à une carrière d'enseignement dès 1963 à Alger, d’abord au sein des sections d’alphabétisation, pour obtenir ensuite un poste d'enseignante dans diverses écoles de la capitale, avant d’être nommée directrice de l’établissement "El Mouwahiddine".
Ce parcours prend fin à la suite d’une retraite, au bout de 32 ans de services.
Entre-temps, elle fût également l'une des fondateurs de l'Observatoire national des Droits de l'homme (ONDH).
Il faut relever que c’est à la veille d’un tournant douloureux du pays, celui de la tragédie nationale, que l'annonce de la création de l’association "Iqraa" eut lieu, puis officiellement proclamée, le 8 juin 1991, à l'occasion de la Journée arabe d'Alphabétisation.
Un challenge que sa présidente mènera, non sans entraves et risques, dans un contexte très difficile.
Et c’est essentiellement la femme rurale qui bénéficiera des enseignements dispensés par "Iqra", davantage celles se trouvant dans les zones les plus enclavées du territoire national : la chaouie, naylie, mozabite, targuie , etc, que les circonstances de l’histoire ont injustement écartées du droit élémentaire à lire et à écrire.
Parmi les objectifs, du reste nobles, que l'association s'est assignées, figurent la lutte contre la déperdition scolaire et l'ignorance dans la société, et la construction de centres d'alphabétisation à travers tout le territoire national.
Ces efforts ont valu de nombreuses reconnaissances à l’endroit de l’association et de sa présidente, dont le Prix international d’Alphabétisation de l’Organisation des Nations-Unies pour l’Education, la Science et la Culture (Unesco) en 1997, celui de l’Organisation pour l’Education, la Science et la Culture de la Ligue arabe (Alesco) en 1998, puis de l’Organisation islamique pour l’Education, les Sciences et la Culture (Issisco) en 2000.
En 1994, fût décerné le Prix Roby Kidd par le Conseil international de l’Education des Adultes (ICAE) dont Mme Barki fût élue au poste de Vice-présidente, sachant qu’elle a également obtenu le statut d’Observateur au sein du Conseil économique et social (Ecosoc) des Nations-unies en 1988 et qu’elle fût membre fondateur de l’Ecosoc-Afrique en 2008. Ceci, alors que l’association Iqraa est membre de plusieurs réseaux d’ONG arabes.
Après une vie ponctuée de réalisations et comblée en satisfactions objectives, Aicha Gharbi Barki décède le 27 mai 2019 à l’âge de 73 ans, des suites d’une longue maladie.
Sa disparition a été, unanimement, qualifiée de "grosse perte" pour la lutte contre l’analphabétisme en Algérie, dont le taux a fortement reculé de 85% à l'indépendance à 8,7% en 2019.
Son héritage lui aura, toutefois, survécu en toute personne arrachée aux ténèbres de l’ignorance et à l’handicap de l’inculture grâce à "Iqra".