Guerre de libération : Des crimes rendus célèbres suite aux aveux de leurs auteurs

Publié par Dknews le 20-06-2020, 16h46 | 73

Massacres, dévastations de village, viols, usage de la famine comme arme de guerre, la liste des atrocités commises par l’armée française durant sa conquête coloniale de l’Algérie est assurément longue, certaines ayant été rendues célèbres grâce à des extraits de lettres rédigées de la main même de leurs auteurs.

Véritable attentat contre l’humanité, ces barbaries mettent dans l’embarras la classe politique en France dès lors qu’il est question d’un sujet aussi sensible que celui ayant trait au passé colonial de l’Algérie.

Pour le Dr Abderahamane Tounsi, enseignant au département d’histoire de la faculté des sciences humaines de l’université Djillali Bounaâma de Khémis Miliana (Aïn Defla), ces lettres confidentielles dont nombre ont été écrites par ces officiers à leurs conjointes, conforte la conviction ayant trait au fait que pour l’Armée coloniale, le plus important était de réaliser ses desseins nonobstant les procédés utilisés.

Ayant effectué des recherches sur la guerre d’Algérie au niveau du Service Historique de l’Armée de Terre (SHAT) de Vincennes (Paris) réservés aux archi ves militaires ainsi qu’au niveau de l’Archive National d’Outre-Mer (ANOM) (Aix-en-Provence), M.Tounsi a eu comme point de mire les crimes commis par l’armée coloniale en Algérie.

"A travers des lettres confidentielles dont nombre ont été écrites par ces officiers à leurs conjointes mais également à leurs supérieurs hiérarchiques, nous apprenons beaucoup sur ces hommes ainsi que sur leur conduite militaire leur ayant permis de tuer de sang-froid des dizaines, voire des centaines d’innocents", a-t-il fait témoigné, observant qu’à lui seul, l’ANOM compte 600 tonnes d’archives d’Algérie qui y sont entreposés.

Cet universitaire a soutenu que les auteurs de ces exactions "effectués avec fierté" visaient la célébrité, observant que certains d’entre eux ont été promus à des grades supérieurs consécutivement à leurs actes macabre. "Souffrant de l’éloignement, nombre de ces militaires, qui mettaient le pied pour la première en Algérie, ne connaissaient même pas le nom du pays qu’il envahissaient, évoquant tantôt l’Afrique, tantôt le désert, voire le Sahara", a-t-il relevé.

Citant le général Tbilissi, il a affirmé que ce dernier a, dans une lettre écrite à sa femme, évoqué les actes barbares qu’il a ordonné dans la région de Miliana, lui faisant savoir qu’il n’a pas hésité à couper les oreilles à certa ines femmes "indociles".

"Regardes comment on les a punies", a-t-il confié à sa femme dans sa lettre, se disant déterminé à poursuivre son action destructrice.

 

Enfumades du Dahra, l’abominable à son paroxysme

L’une des exactions les plus abominables commises par l’armée française durant sa longue présence en Algérie a, incontestablement, trait aux sinistres enfumades de la Dahra (1845), assure M.Tounsi. Selon les propres termes de l’auteur même de cette terrifiante exaction,

le colonel Pélissier, le procédé d’extermination consista à enfermer femmes, hommes et enfants dans une grotte afin de les "enfumer comme des renards", un crime abject qui, s’il avait été perpétré de nos jours  (réseaux sociaux oblige) aurait suscité une vague d’indignation sans précédent à l’échelle de la planète. "Je fais hermétiquement boucher toutes les issues et je fais un vaste cimetière. La terre couvrira à jamais les cadavres de ces fanatiques (...). J’ai fait mon devoir de chef et demain, je recommencerai", avait-il reconnu sans vergogne ni remords dans l’une de ses lettres écrites à sa hiérarchie.

Le fait qu’un député ait protesté contre ce crime lors d’une séance de l’Assemblée Nationale, tenue durant l’été 1845, atteste de sa barbarie, observe l’universitaire. Pour M.Tounsi, la volonté de semer l’ épouvante en Algérie est résumée par l’un des officiers du général Bugeaud lequel assure qu’il "pille, brûle, dévaste, coupe les arbres et détruit les récoltes", reconnaissant dans la foulée avoir fait du territoire de l’Emir Abdelkader un "pays entouré de flammes et de fumée".

"Imaginons un seul instant que ces sauvageries aient été commises de nos jours à l’ère des réseaux sociaux grâce auxquels l’information circule d’un continent à l’autre au bout d’une poignée de secondes, elles auraient à coup sûr suscité un tollé général et un nombre infinis de réactions d’indignations", a conclu M.Tounsi.