Le véhicule est une bombe

Publié par O. Larbi le 26-07-2014, 19h12 | 43

Ces deux praticiens ont soulevé la question des premiers secours à la suite des accidents de la route. Le Pr Kara a surtout insisté sur l’absence d’études épidémiologiques sur leur fréquence quotidienne, hebdomadaire, mensuelle, trimestrielle, semestrielle et annuelle des incidents de la circulation en milieu urbain, en zone pourvue des moyens de secours et de prises en charge médicale et chirurgicale.

Cas extrême, le Sud

Le Dr Amine Hamza a mis en évidence le fait que dans la wilaya d’Illizi d’une superficie de 75 000km2, peuplée de 50 000 citoyens «les accidents sont dus à l’endormissement au volant, aux longs parcours, à la rectitude des routes qui provoque l’illusion de sécurité. Les accidents qui surviennent à des vitesses dépassant celles recommandées, les défauts de signalisation, sont graves. 

Ils s’aggravent du fait du manque d’infrastructures de prises en charge proche du lieu du drame. Comment évacuer les blessés jusqu’au premier centre qui peut être une polyclinique ? Qui le prendra en charge sachant qu’il n’y a pas de spécialiste ? Qui le transférera vers une structure équipée qui se trouve à plusieurs centaines de kilomètres  sachant qu’un polytraumatisé peut voir ses lésions devenir irréversibles si la prise en charge spécialisée n’est pas faite dans les 6 heures ?»

Illizi, Djanet et In Amenas disposent de moyens insuffisants pour des interventions «lourdes et longues». L’évacuation vers le Nord du pays où les hôpitaux sont pourvus en personnels et en moyens est liée «à l’existence de moyens héliportés, d’avions qui font défaut, malheureusement», ajoute le Pr Kara.

Bien que de plus en plus de conventions lient les CHU et les EPH du Nord avec les structures de santé du Sud, le problème du transfert des blessés est préoccupant «d’autant plus que les ambulances ne sont pas médicalisées et sont dépourvues de bombe à oxygène, ni de moyens d’interventions chirurgicales… »

Accidents en zone urbaine

Les accidents de la route qui font 4 000 morts par an et au moins 12 000 blessés touchent en majorité les jeunes de 15 à 40 ans, la majeure partie étant ceux qui ont entre 25 et 30 ans. 

C’est une vraie tragédie. La vitesse, l’incivisme au volant, l’état des routes, l’absence de lumière sont les causes les plus fréquentes.

«Bien que les structures de prise en charge existent et soient équipées, que des équipes médicales et paramédicales compétentes sont à l’œuvre, des blessés graves sont obligés d’attendre leur tour pour bénéficier des secours que leur état exige. La raison en est la saturation des services des urgences et de traumatologie par l’afflux de malades qui empêchent leur prise en charge rapide.»

Le Pr suggère que des centres de prise en charge des traumatismes avec leur personnel et leurs équipements soient excentrés des structures hospitalières : «Cela réduirait les temps d’attente ; les gestes médicaux seront plus efficaces car opérés par des professionnels. Il est utile de dire que des médecins généralistes sont actuellement formés pour savoir agir devant des accidentés de la route. 

Souvent un accidenté de la route peut être «récupéré» si le geste de premier secours est le bon. C’est pourquoi, il est recommandé de ne pas toucher à la personne blessée, de ne pas la déplacer avant l’arrivée des professionnels (Protection civile, ambulance). Il faut suivre des cours de secourisme qui ont lieu dans les structures hospitalières. Ces cours doivent être généralisés dans les écoles. »

Les deux hommes de l’art ont recommandé que les autoroutes soient équipées tous les 100 km de point d’intervention médicalisée d’urgence, que la Protection civile soit présente tous les 50 kilomètres.

Facture sociale

La perte accidentelle de 4 000 Algériens préoccupe les autorités. La prévention est au premier rang des actions urgentes : «Au niveau de la commune, de la daïra, les routes doivent être entretenues, la signalisation améliorée, les rappels à la prudence fréquents.

La sanction des conducteurs imprudents, par exemple les «deux roues» sans casque de protection qui amortirait les chocs. D’autre part, tous les véhicules doivent être contrôlés à l’importation et ceux ne disposant pas de têtière protectrice de la tête et du cou, de ceinture de sécurité interdits d’entrée et de vente sur le territoire.»

Le Pr Kara a fortement insisté sur la réinsertion sociale des accidentés de la route, de leur appareillage et de l’adaptation de l’environnement qui facilite leur déplacement et leur logement au rez-de-chaussée.
L’impératif étant de réduire de façon spectaculaire les accidents de la route et leurs conséquences.