M. Zane Yahia, président del’Union nationale des agronomes, invité du Forum de DK News - Un objectif fondamental de l’UNIA : Rendre obligatoire l’assurance contre les calamités agricoles

Publié par DK News le 30-09-2014, 18h59 | 111

Pour ce qui concerne les calamités en matière d’agriculture, il y en au moins  deux. La première est dite catastrophe naturelle, la deuxième est due à l’homme, et elle se traduit par l’absence d’assurance contre les calamités naturelles.

C’est lorsque la catastrophe a lieu qu’on se rend compte qu’on a omis la pire des exigences. Alors, faudrait il rendre l’assurance obligatoire ? Oui, nous dit M. Zane Yahia, président de l’Union nationale des ingénieurs agronomes.  C’était hier au Forum de DK News dont il était l’invité pour animer une conférence portant sur le système d’assurances des calamités agricoles.

Cette conférence s’est tenue dans le cadre de la Journée nationale de la vulgarisation agricole qui est célébrée aujourd’hui, le 1 er octobre. M. Zane nous apprend que le secteur de l’agriculture contribue à hauteur de 12% du PIB et celui-ci est grand pourvoyeur de main-d’œuvre car il occupe près de 25% de la population active.

Avec 12% du PIB, l’agriculture occupe la 3e place en matière de contribution à la formation du PIB après les secteurs des hydrocarbures et des services. Le secteur agricole enregistre un taux de croissance de 4%  et réalise un chiffre d’affaires annuel de 9 milliards de dollars.
Le secteur se compose d’environ un million d’exploitations pour une main-d’œuvre totale de 2 235 000 employés, toutes catégories confondues.

L’agriculture est le véritable moteur de la croissance et de bien-être de la population nous dit le président de l’Union nationale des ingénieurs agronomes. L’agriculture doit bénéficier de la priorité nationale en vue d’assurer la sécurité alimentaire qui est une composante importante de la sécurité nationale. 

Les défis stratégiques sont à relever par l’investissement par les grands axes de travail de  la loi d’orientation agricole, les contrats de performance, les crédits sans intérêts et la mise à disposition  du secteur annuellement d’une enveloppe financière suffisante.Il faudrait bien sûr continuer la réalisation de barrages, de stations de dessalement de l’eau de mer, du transfert d’eau vers les Hauts-Plateaux.

L’agriculture est un des secteurs économiques le plus expopsé aux phénomènes météorologiques. Il faudrait bien sûr instituer une assurance contre les calamités agricoles. Le FGCA créé  en 1987 fut gelé par le ministère des Finances en 2000.

Le projet d’un système national fut déposé par le CNA  au niveau des deux ministères des Finances et de l’Agriculture pour validation.Le taux de pénétration est de 5% seulement, soit 50 000 exploitations sur un million. La branche des risques agricoles dans le secteur des assurances est de 24% en 2013 avec un chiffre d’affaires de 7 milliards de DA, soit 2% du chiffre d’affaires..

Par Saïd Abjaoui


« Se prémunir du chantage vert ! »

 Zane est un adepte de «  l’agriculture moderne, normée » qui est la clientèle des groupes d’assurances.Dans une longue introduction à la conférence sur «Les assurances des calamités naturelles », il a brossé un tableau de l’agriculture algérienne :

« L’agriculture, l’élevage, l’arboriculture et le maraîchage représentent 12 % du produit intérieur brut dans notre pays. La population active de ce secteur est de 1,6 million soit près de 20% de l’ensemble. »« La productivité de cette économie agraire est de 13% chaque année avec un résultat de 9 milliards de dollars » révèle M. Zane.

Néanmoins, le million d’exploitations agricoles donne l’image d’une agriculture extrêmement morcelée : 92% sont des parcelles de moins de 20 hectares. Pour devenir une activité moderne et rentable au lieu de demeurer une activité artisanale fragilisée aux aléas, l’agriculture algérienne doit bénéficier de l’aide de l’Etat, des assurances et des techniques modernes d’exploitation qui nécessitent l’accès au crédit. Or, comme les petits exploitants n’ont pas de réserves financières, les banques et les assurances ne s’y intéressent pas : ils n’ont rien à hypothéquer !

M. Zane attire l’attention sur les différentes catastrophes qui ont abouti à la production de 24 millions de quintaux de céréales seulement au lieu des 51 millions de moyenne habituelle : «Cette récolte médiocre nous expose au chantage vert sur les marchés internationaux ! »
Loi-cadre sur l’assurance agricole

M. Zane qui intervenait dans le cadre de la «  Journée nationale de la vulgarisation agricole » rappelle qu’après le tremblement de terre de Zemmouri et Boumerdès, une importante loi a été adoptée pour indemniser les victimes des catastrophes naturelles dont les entreprises du secteur industriel. Mais pas les agriculteurs qui ont tout perdu : les terres inondées, les bâtiments détruits !

Il poursuit en se demandant pourquoi l’avant-projet de loi sur l’assurance agricole adopté par un comité comprenant des assureurs, des représentants de l’autorité publique, des professionnels des chambres d’agriculture le 17 avril 2012 attend pour passer en Conseil des ministres et ensuite au Parlement ?

M. Zane a bien précisé que l’Etat faisait beaucoup pour le développement de l’agriculture depuis le début des années 2000 :  «Le plan quinquennal 2009-2014 a dégagé 200 milliards de dinars pour le secteur ; celui de 2015-2019 prévoit 100 milliards de plus».M. Zane  informe que  seulement « 50 000 exploitants sur 1 million sont assurés, soit moins de 2% des exploitants».

 « Les grandes cultures occupent plus de la moitié des superficies cultivées » alors que l’arboriculture et le maraîchage ne représenteraient respectivement que « 6,5 % et 3,5 % de ces surfaces  alors que 35 à 40% sont chaque année en jachère. »Il laisse entendre que l’hectare assuré en céréaliculture est de 4500DA l’hectare pour le blé dur ce qui semble élevé, mais les primes en cas de sinistre pourraient s’élever à 20 ou 30 fois  les termes du  contrat. 

Le prix élevé des contrats d’assurances et les risques encourus mettent l’assureur dans une position inconfortable financièrement pour couvrir les pertes des assurés qui se conforment à des standards préétablis par leurs soins. D’où la nécessité de la réassurance…

Il est arrivé que des exploitants n’aient pas reçu la juste indemnisation  conformément à la police contractée : » A la suite d’un accident de voiture près de Biskra par la faute de la partie adverse qui a reconnu les responsabilités, la mutuelle m’a remboursé 50% des dégâts. Pour le reste, elle a argué que l’assureur de la partie adverse n’avait pas encore répondu à leurs injonctions.

En fait, cette mutuelle est réputée pour ne pas rembourser les autres assureurs… », selon les propos d’un exploitant d’un périmètre de mise en valeur dans la région de Biskra. L’assurance agricole est un secteur à fort potentiel : au 30 juin 2014, la Chambre nationale d’agriculture répartit les exploitations agricoles :
Grandes cultures : 336 917 exploitations soit 35,63%
Arboriculture : 196608 exploitants soit 20,60%
Grands élevages : 237 323 exploitants soit 25,49%
Petits élevages : 32455 soit 3,43%
Culture maraichère : 86042 soit 9,10%
Mise en valeur : 51263 soit 5,4%
Le portefeuille client d’un assureur agricole est donc très alléchant et peut se traduire en résultants financiers très gratifiants.

Pour cela, M. Zane informe de la tendance à l’innovation en matière de micro-assurance : elle consiste à couvrir les risques prévisibles compte tenu de l’expérience et de la climatologie. La nouvelle police d’assurance, dont le prix serait  fixé, pour une récolte, à par exemple, 10% de leur investissement en intrants (graines, engrais) pourrait répondre aux attentes des agriculteurs et les amener à s’assurer pour d’autres risques.

En tout état de cause, la souveraineté alimentaire est liée à la modernisation de l’agriculture, à l’investissement sous forme de partenariat de l’Etat, des producteurs et des assureurs. M. Zane espère qu’une ample campagne de vulgarisation suive pour intéresser durablement  les concernés à leur propre prospérité.

Par O. Larbi