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Gouvernance de l’internet : Quand l’ICANN joue la montre !

Publié par Samy YACINE le 14-03-2016, 18h27 | 83
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La dernière réunion de l’Icann à Marrakech, au  Maroc, du 5 au 10 mars  n’a pas pu lever  tous les obstacles devant l’accomplissement du  processus de ‘’détachement de cet organisme’’ de la tutelle du gouvernement américain, loin s’en faut.

Après cinq journées de négociations, les participants sont parvenus à un accord sur un plan destiné à sceller définitivement la libération de cet organisme de la tutelle du département c’état au commerce américain. Mais il lui reste encore quelques étapes que les observateurs jugent à la limite rédhibitoires, pour une telle mission que les prochaines élections présidentielles américaine de novembre prochain risquent fort de faire capoter.

 Après avoir été à la charge de la défense américaine, la gestion des ressources internet notamment les noms de domaine et les adresses IP, a été confiée à une université de la Caroline du sud avant de finir sous le contrôle de l’Icann (Internet Corporation for Assigned Names and Domains), un organisme associatif de droit américain, lié par contrat au département d’état américain au commerce. Ses attributions en apparence techniques revêtent en fait un rôle politique crucial donnant aux Etats Unis un lever  prépondérant dans la gestion et l’allocation des ressources de l’internet. Une situation dénoncée par Les partes en jeu dans le fonctionnement du réseau internet. Lors des deux phases du sommet mondial de la société de l’information en 2003 à Genève puis 2005 à Tunis, cette question a constitué une pierre d’achoppement qui a grandement participé à l’échec de cette rencontre mondiale  qui s’est avérée incapable d’apporter des réponses à l’épineuse problématique de la gouvernance mondiale de l’internet.

En 2014, le gouvernement américain faisait savoir qu’il ne comptait plus renouveler le contrat liant l’Icann au Département d’état au commerce ; prévue en septembre 2015, la fin de validité de ce contrat a néanmoins été prolongée d’une année, soit septembre 2016 ;

Mais, selon de nombreux observateurs, les prochaines élections présidentielles américaines ne sont pas pour rassurer le tenants de  la fin de la tutelle américaine, tant la situation politique peut changer et ramener sur le devant de  la scène politique américaine des politiciens  hostiles à la sortie des leviers de gestion du réseau internet de la tutelle américaine.

Après un long processus de travail, qui a vu les différentes parties prenantes  de la gestion de l’Icann, abattre plus « de 800 heures de travail, de 600 réunions et de deux ans de négociation », souligne le site du quotidien français lefgaro.fr, la réunion de Marrakech a fini par l’adoption d’un  ‘’ un plan pour prendre son indépendance du gouvernement américain’’, note ce site, précisant que ce résultat  « doit toutefois encore être accepté par les États-Unis ».

Parmi les principales innovations proposées pour le transfert de la gestion  de l’Icann vers un ‘’gouvernement multipartite et démocratique’’, le remplacement du puissant conseil d’administration par  «une sorte d'assemblée générale qui représentera la diversité des acteurs, où toutes les parties prenantes seront présentes, société civile, associations, chercheurs, professionnels et gouvernements», a indiqué, sur le site lefgaro.fr, le président du Conseil d'administration de l'Icann, Stephen Crocker. Présent à la réunion de Marrakech, le Français   Mathieu Weill, le patron  de l'Afnic (Association française pour le nommage Internet en coopération)  estime de son côté que la nouveauté dans le projet adopté réside dans le fait, explique-t-il sur le même site que, «désormais le conseil d'administration devra rendre des comptes. Il y aura une cour d'appel qui pourra siéger en cas de litiges sur ses décisions et l'AG aura la possibilité de démettre le conseil si ce dernier s'éloigne trop des statuts de l'Icann».

Mais, avec tout cela, des zones d’ombres demeurent et notamment la question du rôle des gouvernements qui semblent encore  diviser les communautés des acteurs intervenant dans la gestion de l’internet. Le Governmental Advisory Committee (GAC), représentant les Etats au niveau de l’ICANN, n’a pas été dans le consensus de Marrakech, si l’on en croit le site www.le360.ma qui mentionne  dans le projet de plan adopté, « une discorde sur la 11e recommandation qui impose un consensus au sein du GAC pour faire passer ses recommandations. De même, le projet de réforme prévoit un nouveau seuil pour le rejet des propositions du GAC. Il a été ramené à 60% des membres du conseil d’administration de l’ICANN au lieu des deux tiers. »

Le rôle des Etat demeure  en effet un point de discorde, tant les positions sont loin d’être conciliables. « Un groupe de 16 pays dont la France se sont opposés à ces dispositions craignant une marginalisation du rôle des états dans le processus de prise de décision au sein de l’ICANN », souligne le site marocain, confirmant l’intérêt de certains gouvernements à continuer à jouer un rôle dans la gestion de la ressource de l’internet. 

De son côté, le gouvernement américain n’entend pas laisser l’Icnann sortir de sa tutelles à n’importe quelle condition. L’actuel président de l’Icann,  l’américano-libanais, Fadi Chehadé   a ainsi indiqué au quotidien français  e Figaro qu’il n’excluait pas  une recrudescence « des demandes d'auditions du Congrès américain, certains parlementaires estimant que les États-Unis ont abandonné la supervision de l'Internet qui serait maintenant en danger d'être contrôlé par d'autres gouvernements, notamment par un front commun entre la Chine et la Russie. »

Samy YACINE

 

Le  départ précipité  de Fadi Chehadé

Nommé en 2012 à la tête de l’Icann, le libano-américain Fadi Chehadé a créé la surprise en informant,   au mois de mai dernier,  l’instance dirigeante de l’Icann de son intention de quitter ses fonctions avant les termes de son contrat. « Un départ prématuré, puisque son mandat devait se terminer en juin 2017, mais qu’il avait toutefois annoncé dès le mois de mai dernier », selon le site www.lecommercedulevant.com, qui ajoute que Fadi Chehadé  « d’origine libanaise, avait alors expliqué vouloir poursuivre sa carrière dans le secteur privé ».  Ce départ peut paraitre précipité dans la mesure où il interviendra avant la mise en œuvre du fameux plan de soustraction de l’Icann de la tutelle américaine dont justement il a été l’un principaux architectes. Il sera remplacé par  le Suédois Göran Marby,   actuellement en charge de l’organisme  régulateur des postes et des télécoms en Suède (PTS), tandis que l’intérim de la direction de l’Icann  sera assuré d’ici là par Akram Atallah, président de la division domaines de l’organisme.

 

Plus d’épée de Damoclès ?

Le site d’information français numerama.com consacre une longue analyse à la réunion de Marrakech dans laquelle il rappelle  que l’Icann  est le fruit d’une directive de 1998, du ministère américain du commerce qui maintient cet organisme à ce jour sous son contrôle. « C’est une épée de Damoclès, ou plutôt une laisse qui permet de s’assurer que l’ICANN veille d’abord aux intérêts américains » écrit ce site qui ajoute que depuis « 2014, l’administration de Barack Obama a toutefois annoncé qu’elle allait renoncer à ce moyen de pression, et laisser l’ICANN gérer en autonomie les fonctions de l’IANA, sans contrat ». A voir.

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