Les déserteurs de l'armée coloniale, noyau de la lutte armée dans la région de Ghardaïa

Publié par DK News le 04-11-2016, 18h18 | 141

La désertion en avril 1957 d'un groupe de soldats d'origine algérienne, avec armes et bagages, de la caserne coloniale "2e Bureau", dans la vallée du M'zab, devenue l'actuel hôtel "Rostomide", marquera à jamais l'histoire de la guerre de Libération nationale et de la région. Ils étaient sept (7) déserteurs, a indiqué à l'APS le moudjahid Bousmaha Ali, un des acteurs de cette désertion et responsable de l'association des condamnés  à mort de Ghardaïa.

Ils s'agit de Abderrahman Bahbah, tombé au champs d'honneur en 1958 prés de Daya Ben Dahoua (Ghardaïa) dans un accrochage avec les forces coloniales, Sila Mohamed, tombé également au champs d'honneur dans la région d'El Bayadh en 1959, Ben Sebgag Ahmed, vivant actuellement à Djanet (Illizi), Moulay Ahmed vivant actuellement à Ouargla, Messaoud Cheikh, décédé après l'indépendance, Tayeb  Boukhachba vivant actuellement à El Meneaa ( Ghardaïa) et Ali Bousmaha, comme en témoignent des documents présenté à l'APS.

Cette désertion représente une action visant à montrer aux forces coloniales que la glorieuse révolution du 1er novembre 1954 était une épopée reflétant la symbiose entre le Front de libération nationale (FLN) et le peuple algérien dans la lutte pour l'indépendance, a fait savoir M. Bousmaha.
Parmi les sept déserteurs qui ont rejoint le maquis dans la zone des Aurès, El Bayadh ou le mont Boukhil, deux  (Ali Bousmaha et Tayeb Boukhachba) qui ont été arrêtés le 25 juillet 1960 les armes à la main après un accrochage avec l'armée française à Ghardaïa, ont été condamnés à la peine de mort avant d'échapper à la guillotine grâce à l'indépendance de l'Algérie.

Tous les acteurs de la révolution affirment que l'oasis de Ghardaïa a été choisie par leurs soins comme un lieu de repli, de ravitaillement et d'approvisionnement en vivres et armes pour de nombreux maquisards des massifs du Djebel Amour, de Brezina et El Bayadh, a expliqué à l'APS un moudjahid de la région.

Une opération préparée minutieusement
Dans les entrelacs des ruelles de Ghardaïa au cœur du quartier de Theniet El Makhzen, Ammi Ali, septuagénaire, un des déserteurs, connu de tous raconte pendant des heures, l'étrange destin qui fut le sien et celui de ses compagnons d'armes tous natifs d'Ouargla.

"On nous a affecté à la caserne de Ghardaïa où notre tâche se limitait, sous l'autorité de l'armée coloniale française à  la sentinelle, les rondes et les travaux harassant de manutention tout en fournissant des informations et du matériel au noyau de l'organisation du FLN dirigé par Mohamed Djeghaba", a-t-il souligné.

"Nous renseignions sur les opérations et déplacement de l'armée coloniale française dans le sud et nous ravitaillions également en minutions qui une fois stockées ces munitions sont envoyées vers les zones de combat situées dans les Aurès et El Gâada dans la région d'Aflou", a précisé Ammi Ali , toute en notant que la désertion a été retardée sur ordre des responsables de la révolution pour motif de travail précieux que nous fournissons en matière de renseignement. "Avec une synchronisation  des plus déconcertantes et une maturité politique à point, nous avons décidé de passer à l'action le premier jour de Ramadhan d'avril 1957", a-t-il détaillé.

"Tout était minutieusement préparé, on s'est entendu de prendre le plus grand nombre d'armes et de munition juste après la rupture du jeûne, de mettre aux arrêts les soldats français en fraction et de coupé l'électricité et les fils de téléphone avant d'embarquer sur un camion appartenant à Amor Benkhelifa dit Beladjal à destination de Metlili en passant par Ben Izguen", précisent les nombreux témoignages recueillis auprès des moudjahidine de Ghardaïa. A l'aube du deuxième jour de Ramadhan (avril 1957), les soldats français soutenus par des hélicoptères ont infesté la région du M'zab et Metlili.

Une chasse à l'homme est déclenchée. La recherche des déserteurs cachés dans des sites aménagés situés dans la Chebka de Metlili où le premier contingent de Moudjahidine de la région à pris naissance avant de rejoindre les zones d'El Bayadh et les Aurès, avait alors commencé.
En réplique à cet acte, de violentes répressions contre la population locale civile ont été effectuées par l'armée française et plusieurs unités militaires ont été appelées au renfort, a souligné Mohamed  Djebrit, ancien responsable de l'Organisation nationale des moudjahidine de Ghardaïa.

Création de plusieurs réseaux de soutien
Cette désertion a engendré un impact extraordinaire et une prise de conscience chez les habitants de la région, ainsi qu'une maturation politique pour la propagation de la révolution sur l'ensemble du territoire national, a-t-il indiqué.

De son côté, le moudjahid Omar Benkhelifa a indiqué que l'engagement de la population dans la lutte qui a abouti notamment au renforcement des rangs de l'ALN, a nécessité de nombreux sacrifices tant sur le plan de l'approvisionnement en munitions, en armes et alimentation, qu'en ressources humaines.

L'épopée de ces déserteurs algériens enrôlés dans l'armée française à Ghardaïa a permis d'expliciter l'engagement indéfectible et irrévocable de l'ensemble des Algériens à la cause nationale.
Parmi les cinq déserteurs, deux ont été arrêtés les armes à la main après un accrochage avec l'armée française à Ghardaïa. Présentés devant la juridiction militaire, ils ont été condamnés à la peine de mort en 1960 avant d'échapper à la guillotine grâce à l'indépendance de l'Algérie.

Plusieurs réseaux  de soutien en armement, munitions et autre ravitaillement ont été créés dans les régions de Guerrara, Berriane, Melika, El Ateuf, Metlili, ainsi qu'à Mansourah par des patriotes locaux pour permettre aux moudjahidine des fronts Est et Ouest de s'approvisionner grâce à des caravanes de chameliers qui connaissent les pistes sécurisées dans le désert aride, ont soutenu des moudjahidine locaux.
APS