Système d’enseignement en France : La réforme de l’orthographe fait débat

Publié par Cherbal E-M le 17-01-2017, 10h09 | 74

Depuis la rentrée scolaire de cette année, la polémique ne cesse de prendre de l’ampleur dans les milieux pédagogiques français sur la pertinence de certaines innovations introduites par le Conseil Supérieur des Programmes qui a agi sur la base d’un constat généralement admis de tous. 

« Selon la dernière enquête du ministère de l'Education nationale, révélée en novembre sur le niveau en français des écoliers, le constat est affligeant, relève le site du quotidien leparisien.fr  qui note en effet  que « sur une dictée de dix lignes, proposée en 2015 à des élèves de CM 2, les enfants ont commis 17,8 fautes en moyenne, et ils n'étaient qu'un quart à mettre un ‘’s’’ à l'adjectif ‘’inquiets’’ au pluriel. »

Pour simplifier la vie  aux chérubins français et leur donner une chance de mieux assimiler les règles de langue de Voltaire, les spécialistes des programmes ont donc décidé d’introduire une innovation qui ne semble pas passer pour tout le monde.

Trouvant trop compliqué pour les élèves des premières années du cycle primaires, les compléments d’objet usités, ils ont introduit le ‘’prédicat’’, une notion nouvelle qui ne fait pas encore l’unanimité, loin s’en faut, même si ses défenseurs demandent du temps et de la patience pour en évaluer le véritable impact.

Le site de l’hebdomadaire français lexpress.fr présente le prédicat comme « la fonction du groupe verbal dans une phrase », poursuivant que « le prédicat est constitué des mots n'appartenant ni au groupe sujet ni au groupe complément de phrase. » Pour mieux expliciter la notion, le site  donne cet exemple : «  dans l'énoncé : "Sur le sable, les mouettes picorent les miettes laissées par les touristes", le prédicat est "picorent les miettes laissées par les touristes". Formé du verbe et des compléments de ce verbe, il délivre une information sur le sujet. »

L’introduction de cette nouveauté devait servir à simplifier la compréhension de la structure et de la consistance sémantique de la phrase  en se passant des fameux compléments d’objets, jugés trop compliqués et dont l’enseignement est différé après le CM1.

Le concept  n’est pas si nouveau, si l’on en croit certains écrits de la  presse française ; « il a été inventé par Aristote, et utilisé longtemps dans la grammaire latine puis française », affirme leparisien.fr tandis que pour lexpress.fr,  la « notion n'est pas une pure invention des grammairiens et linguistes pour la réforme, elle est déjà utilisée au Québec, par exemple ».

Pour Michel Lussault, président du conseil supérieur des programmes et néanmoins professeur à l’école normale supérieure de Lyon, l’innovation tient la route, dans la mesure où, « les notions anciennes de groupe verbal ou de complément d'objet ne font pas l'unanimité chez les linguistes.

Le terme de complément est très vague, il existe des compléments de tout... La notion de prédicat est plus claire, et elle est enseignée depuis très longtemps en sciences du langage », explique-t-il sur lexpress.fr

La presse française a tout de même noté une   méfiance  manifeste  de certains enseignants peu enclins à se départir des compléments d’objets pour décortiquer une phrase.  «Je continue de faire dictée sur dictée, mes élèves ont un tableau de conjugaison par semaine à apprendre et j'ai ressorti mon Bled et le Bescherelle », fait savoir cet enseignant de la région parisienne, interrogé par le quotidien Le Parisien.

D’autres ont fait part de leur sentiment d’un ‘’nivellement par le bas’’, à l’instar du maire Les Républicains  de la ville de Cannes qui s’est fendu d’un tweet pour dénoncer cela.

Dans une tribune publiée sur le site du journal la-croix.com, le professeur de français, Jean-Rémi Girard également  vice-président du SNALC-FGAF (Syndicat National des Lycées et Collèges), fait part de ses craintes de  voir la réforme   ‘’ aboutir à un enseignement très hétérogène ». 

«Actuellement, des documents académiques proscrivent noir sur blanc l’enseignement des compléments d’objets directs et indirects, mais certains inspecteurs prennent des positions inverses devant les instituteurs en formation, écrit-il sur ce site, ajoutant que le « risque est d’aboutir à un enseignement de la grammaire très hétérogène, différent d’une académie à l’autre, voire d’une classe à l’autre.»