Histoire

L'historien Gilles Manceron l’a affirmé à Paris : La France doit aller «plus loin» dans la reconnaissance des crimes coloniaux commis en Algérie

Publié par DKnews le 28-02-2017, 17h02 | 52
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La France doit aller «plus loin» dans la reconnaissance des crimes coloniaux commis en Algérie, a affirmé mardi à Paris l'historien Gilles Manceron, estimant que c'est une «condition indispensable» pour des relations apaisées entre la France et l'Algérie.

«Il faut que la France aille plus loin dans la reconnaissance des crimes qui ont marqué sa période coloniale.

Il faut des gestes forts de la part des plus hautes autorités du pays», a-t-il soutenu dans un entretien à l'APS, notant que «c'est une condition indispensable, non seulement pour que s'établissent des relations apaisées entre la France et l'Algérie, mais aussi pour faire reculer efficacement le racisme au sein de la société française».

Pour ce spécialiste du colonialisme français, la domination coloniale «entraînait des discriminations, des injustices et des crimes», relevant que «certains de ces crimes, comme les massacres du 8 mai 1945 dans l'est de l'Algérie, peuvent être assurément qualifiés de crimes contre l’humanité».

Il a rappelé, dans ce sens, que la France avait affirmé le principe d'égalité des humains, «mais il n'a pas été appliqué», soulignant que «c'est le paradoxe de la colonisation, elle a développé un discours de justification en contradiction avec la réalité».

Gilles Manceron a considéré, par ailleurs, que la présence des crânes de résistants algériens au Muséum national d’histoire naturelle (MNHN) de Paris est «une preuve de la barbarie coloniale», rappelant que la question a été soulevée en 2011 par un archéologue algérien qui a demandé le rapatriement en Algérie de ces restes mortuaires.

Les crânes de résistants algériens au musée de Paris : «une preuve de la barbarie coloniale»

«Parmi eux, il y a celui du cheikh Bouziane, chef de la révolte de Zaâtcha en 1849, écrasée par une terrible répression emblématique de la violence coloniale.

Celui de son fils, âgé de quinze ans, et de son compagnon Si-Moussa Al-Darkaoui, tous deux fusillés sur place puis décapités».

«Il y a aussi celui d’autres résistants, comme Al-Hachimi, Al-Hamadi, et du chérif Boubaghla, le principal résistant de Kabylie et d’Algérie dans les années 1851-1854, après la défaite d’Abd El-Kader, ceux de Moktar Al-Titraoui et de son fils, du chérif Bou Kedida, tué sous les murs de Tebessa», a-t-il dit, estimant que «ce serait un geste important de la part de la France, par une restitution solennelle rendant hommage à ces patriotes algériens, de sortir de l’oubli ces pages sombres de l’histoire de la France dont l’effacement participe aussi aux dérives xénophobes qui gangrènent la société française».

Au sujet de la déclaration à Alger du candidat à la présidentielle française Emmanuel Macron qualifiant la colonisation de «crime contre l'humanité», l'historien a estimé que si Macron a eu le «mérite» de lancer un «pavé dans la mare» dans la campagne présidentielle française en disant «clairement» que la colonisation était un «crime contre l’humanité», il a déploré le fait que les responsables politiques plus âgés «n'ont pas eu, avant lui, ce courage».

«C'est très probablement parce qu’il appartient a une génération qui n'a pas vécu la période coloniale», a-t-il expliqué ajoutant que «c'est au sein des générations les plus anciennes qu'on trouve le plus de réticences à une condamnation claire de la colonisation», a-t-il fait observer, relevant que «des gens de ces générations se sentent perdus, ils ont l'impression que +leur France+ a disparu.
Les jeunes voient les choses autrement».

Toutefois, il a considéré que Macron «est loin d’être un expert de cette histoire au sujet de laquelle il a dit d'ailleurs ensuite des choses contradictoires et mal informées», recommandant qu’il faut que d’autres responsables politiques «parlent aussi de ce sujet et le fassent encore mieux que lui».

Après la mort de De Gaulle, les forces nostalgiques de la colonisationont repris de la force
A propos des vives réactions survenues après cette déclaration, Gilles Manceron a indiqué qu'aujourd'hui, «c'est au sein de la droite et de l'extrême droite française qu'on trouve la reprise la plus insensée de l'idéologie coloniale et les discours racistes et islamophobes qui en sont la continuation», même si, dans le passé, a-t-il dit, les forces politiques françaises de gauche «ont souvent participé à la politique coloniale, il y avait en leur sein des éléments critiques de la colonisation ou franchement anticolonialistes».

Il a rappelé que le général de Gaulle a constitué, d'une certaine manière, une «exception», pour la droite.

«Après sa mort, les forces nostalgiques de la colonisation ont repris de la force au sein de la droite française, l'extrême droite s'est affirmée et Nicolas Sarkozy a renforcé, dans les années 2000 à 2016, le discours nostalgique de l'époque coloniale», a-t-il précisé, soulignant que la droite a oublié le jugement «sévère» de De Gaulle sur la colonisation.

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