Le procès des militants sahraouis, une violation du droit à un procès équitable

Publié par DKNEWS le 23-06-2017, 14h59 | 29

 Le procès des militants sahraouis devant la Cour d’appel de Rabat est marqué par de "multiples et graves" atteintes au droit à un procès équitable, a affirmé l’Action des chrétiens pour l’abolition de la torture (ACAT).

"Ce procès est marqué par de multiples et graves atteintes au droit à un procès équitable, notamment par la prise en compte d’aveux signés sous la torture, la partialité du tribunal et de nombreuses entraves posées aux droits de la défense, a précisé l’ACAT dans un rapport intitulé Communication conjointe aux Rapporteurs spéciaux sur la torture et les peines ou traitements cruels, dont l’APS a obtenu une copie.

La communication concerne 24 sahraouis victimes d’un procès inéquitable en cours au Maroc. Ils sont poursuivis pour leur participation présumée au meurtre de onze soldats pendant et à la suite du démantèlement du camp de  protestation sahraoui de Gdeim Izik le 8 novembre 2010.

L’ONG de défense des droits de l’homme basée à Paris, créée en 1974 et reconnue d’utilité publique, a évoqué la longue liste de violations constatées depuis le début du procès, notamment celles liées au droit d’être présent à son procès, droit d’être informé de façon détaillée de la nature et des motifs de l’accusation portée contre soi, droit d’être  représenté et de communiquer avec l’avocat de son choix, droit à l’égalité et le principe de l’égalité des armes, droit à l’égalité devant les tribunaux, etc.

Par ces violations, explique l’ACAT, "les accusés ne savent pas quels agents ils sont soupçonnés avoir tués et de quelle façon". Ils n’ont cessé d’être interrogés sur la base de leurs aveux signés sous la torture et les avocats de la défense ont été censurés tout au long du procès et n’ont pu aborder la question de la torture ainsi que celle de l’applicabilité du  droit international humanitaire.

Le rapport indique que le parquet a fait comparaître de nouveaux témoins sept ans après les faits et dont les récits sont pour la plupart "peu étayés", parfois "contradictoires et même invraisemblables", soulignant que le président censure les questions de la défense tendant à mettre en exergue le "peu de crédibilité" des récits.

L’ACAT estime que le président témoigne d’une "partialité manifeste" à l’encontre de la défense, en posant notamment lui-même et autorisant les parties à poser bien plus de questions à charge qu’à décharge.

"Il a autorisé la diffusion en audience d’un film de propagande dans lequel aucun accusé n’apparaît et ayant pour seule vocation de créer un climat hostile en violation de la présomption d’innocence", relève le document, signalant que la Cour a refusé que soit procédé à des tests ADN et des relevés d’empreinte sur les armes saisies et appartenant  prétendument aux accusés.

Le document rappelle que le 16 mai dernier, avocates françaises des accusés (Ingrid Metton et Olfa Ouled) ont été destituées d’office par le président de la Cour qui a fait procéder à leur expulsion de la salle d’audience dans la violence.

Pour l’ONG française, "le procès touche à sa fin et les accusés risquent d’être à nouveau condamnés à de  très lourdes  peines, sur la base de leurs aveux signés sous la torture". Le 13 juin, lors de son réquisitoire, le procureur a requis la peine de réclusion maximale pour tous les accusés. 

"Il ressort pourtant clairement des débats que les poursuites à l’encontre des 24 accusés ont été motivées par leur engagement en faveur de droits de l’homme et de l’indépendance du Sahara occidental", a-t-elle considéré.