Guerre de libération nationale : La bataille de l'information était «cruciale et déterminante»

Publié par Dk News le 15-12-2018, 16h34 | 22

La bataille de l'information durant la guerre de libération nationale était «cruciale et déterminante», a souligné à Tizi-Ouzou, Djoudi Attoumi, ancien officier de l’Armée de libération nationale (ALN) dans la wilaya III historique.

Rencontré au salon du Djurdjura du livre, qui s'est ouvert lundi 10 décembre à la bibliothèque principale de lecture publique, il a indiqué que «la bataille de l'information était aussi cruciale et déterminante que celle menée les armes à la main».

Toute information, explique le maquisard qui a passé l’essentiel de sa présence au maquis de 1956 à 1962 au poste de commandement (PC) du Colonel Amirouche, «devait, du fait du contexte de guerre, être exploitée à temps, et dans les plus brefs délais, ou alors elle perdait de son efficacité devenant même, parfois, dangereuse».

Qu’elle émane du PC vers la base, pour transmettre des instructions ou inversement pour faire parvenir des comptes rendus d’opérations ou de mouvements des troupes ennemies, le transfert de l’information par les agents de liaison était un «processus difficile et lent» souligne-t-il.

Ils étaient «obligés, parfois, de parcourir de longues distances et dans des conditions, atmosphérique et sécuritaire, souvent peu favorables et même risquées qui pouvaient les mettre en situation avec l’ennemi qui arrivait à récupérer le courrier sur un agent arrêté ou abattu», explique encore l’ancien maquisard.

Le Colonel Amirouche, témoigne-t-il, à ce propos, était «conscient de ce rôle capital de l’information et de cette nécessité de l’exploiter à temps et des risques et contraintes que cela engendrait» et «voulait installer des postes émetteurs pour abréger le temps de transfert des informations, mais n’a pu le faire par manque de moyens logistiques».

Le PC installé dans la forêt de l’Akfadou était doté d’un poste émetteur et les moudjahidines qui s’y trouvaient «avaient appris à s’en servir et acquis une expérience à l’utiliser sans éveiller les soupçons de l’ennemi.

Il y avait toujours des guetteurs lors de son utilisation et dès l’apparition des avions Dakota, chargés de capter les émissions, le poste était immédiatement éteint».

Il y avait aussi, ajoute-t-il «la nécessité de s’informer sur le cours de la guerre ailleurs dans d’autres régions et des développements de l’action diplomatique à l’extérieur du pays» et à ce sujet, a-t-il souligné «on recourait à la TSF qui avait joué un rôle important dans la guerre» avec, précise-t-il «là aussi, le risque de la désinformation qui était présent».

Cependant, explique-t-il «même si l’on se méfiait des comptes rendus des radios, françaises notamment, cela nous permettait d’avoir connaissance des faits, et avec des recoupements, à nous faire une idée de des mouvements de l’ennemi, voire même, parfois, de les anticiper».

L’autre moyen d’information qu’exploitaient les moudjahidines était le reportage de guerre qui «qui faisait parvenir des comptes rendus sur les opérations de l’armée française et permettait de connaître le nombre de morts, de blessés, les tortures et les destructions et de mesurer la présence des troupes et leurs mouvements», a-t-il souligné.

Il citera, à titre d'exemple, un reportage «extrêmement précis» publié par El Moudjahid concernant «l’opération espérance» menée par les troupes du général Dufourt du 27 mai au 2 juin 1956, pour tenter de déloger les moudjahidine dans les régions d’Aït Abbas, Aït Idel, Beni Maouche et jusqu'à Béni Ourtillane et Guenzet, sur le fanc Sud de la Soummam entre les wilayas actuelles de Béjaia Bordj Bou Arreridj et Sétif. 

S'agissant de l'information destinée aux populations, M. Attoumi explique qu'elle était transmise par tracts «quand elle n’était pas urgente» mais aussi par le biais des commissaires politiques «chargés de maintenir le lien avec elles, notamment, à travers les réunions dans les villages et douars pour les informer des succès et des faits d’armes de l’ALN, afin d’entretenir leur moral et combattre la propagande de l’occupant».