
Les violences intercommunautaires et les rancoeurs croissantes au sein des élites politiques pourraient forcer l'Ethiopie à prendre la décision controversée de reporter les élections législatives prévues en mai, a averti lundi le groupe de réflexion International Crisis Group (ICG).
«Une campagne clivante et sanglante, avec des candidats appelant ouvertement à voter sur des bases ethniques, pourrait faire basculer le pays», a affirmé ICG dans un rapport, estimant que si les tensions actuelles s'intensifient, le Premier ministre Abiy Ahmed pourrait dès lors «être contraint de chercher à reporter les élections».
Après plusieurs années de manifestations anti-gouvernementales, M. Abiy a été nommé Premier ministre en avril 2018 par la coalition au pouvoir depuis 1991 en Ethiopie, le Front démocratique révolutionnaire du peuple éthiopien (EPRDF). Ses initiatives en vue de la paix, principalement le rapprochement avec l'Erythrée, ainsi que son ambitieux agenda de réformes lui ont valu le prix Nobel de la paix 2019. Mais son ouverture a également libéré des ambitions territoriales locales et d'anciens différends intercommunautaires qui ont débouché sur des violences meurtrières dans de nombreuses régions du pays, faisant notamment près de trois millions de déplacés en 2018.
En octobre, des affrontements lors de manifestations de partisans de Jawar Mohamed, un ex-allié de M. Abiy hostile au centralisme du Premier ministre, ont fait au moins 86 morts.
M. Abiy, désireux d'obtenir la légitimité des urnes, souhaite maintenir les élections au mois de mai malgré la situation sécuritaire. Mais, estime ICG, de nombreux écueils pourraient perturber ce calendrier.