Crise en Libye: La paix compromise, les Libyens hantés par la guerre

Publié par DK NEWS le 01-01-2020, 16h15 | 13

Le processus de paix pour le règlement de la crise  en Libye a été compromis en 2019, suite à l’offensive armée menée depuis le  mois d'avril par les troupes de Khalifa Haftar avec velléité de contrôler  la capitale Tripoli. 
Une attaque qui avait avorté la tenue d'un dialogue national inclusif en  vue d'un consensus  pour la relance du processus de règlement politique d'une crise  multidimensionnelle frappant le pays depuis 2011.    
L'agression inattendue des troupes de Haftar pour la prise de Tripoli où  siège le Gouvernement d’union nationale (GNA) sous la direction du Faiz  al-Sarraj a surpris non seulement les Libyens mais également la communauté  internationale, à sa tête la Mission d'appui des Nations unies en Libye  (Manul), qui n'épargne pas d'efforts pour la résolution de la crise ayant  replongé le pays dans une guerre de trop. Ce dangereux tournant dans la situation est intervenu à la veille de la  Conférence nationale avortée qui devait se tenir entre les 14 et 16 avril à  Ghadames (sud-ouest libyen)  sous l'égide de l'Onu à travers la Manul avec la participation des toutes  les parties libyennes en quête de véritables jalons pour une réconciliation  définitive.  
 Selon les observateurs, les assises de Ghadames avaient toutes les  chances de réussir surtout qu'elles allaient intervenir quelques jours  seulement après la réunion de la Commission quadripartie, Union africaine  (UA), Onu, la Ligue arabe et l'Union Européenne (UE). La réunion avait insisté sur la mise en £uvre d'une réconciliation  nationale fédérant l'ensemble des parties libyennes pour une solution  pacifique soutenue par la communauté internationale. L'agression par les troupes de Haftar contre Tripoli, toujours sous la  menace de guerre,  n'a pas laissé la communauté internationale et les  partenaires du processus de paix indifférents.   
Deux jours après l’offensive sanglante, le secrétaire général de l'Onu,  Antonio Guterres,    s’était déplacé à Tripoli pour faire valoir la voie  politique pour «résoudre les différends», affirmant qu'il n'y avait pas  «une solution militaire mais uniquement une voie politique...» à même  d'éviter un nouvel embrasement. Même principe adopté par les pays voisins de la Libye dont l'Algérie qui  s'est toujours attelée à favoriser un dialogue inclusif entre toutes les  parties libyennes, sous l'égide de l'Onu et loin de toute ingérence  étrangère, avec le principal souci de préserver les intérêts suprêmes du  peuple libyen. 

L'arrogance de Haftar abaissée face à l'orgueil du GNA 
Sur le terrain, l’offensive des troupes de Haftar ne s’est pas  déroulée telle qu’elle a été présentée au départ «une promenade de quelques  jours». 
L’arrogance de Haftar et ses troupes s’est, en effet, heurtée à une  résistance farouche des forces du Gouvernement d'union national (GNA) le  contraignant à s’arrêter, à quelque 100 kilomètre de Tripoli. 
 Pour faire écho et enflammé la propagande militaire, il s’en est pris à  de nombreux camps d’hébergement pour migrants et des centres hospitaliers,  provoquant la mort des dizaines d'innocents dont des médecins.  Le souhait d'envahir Tripoli habite encore Haftar, en cette fin de  l'année 2019 sans  toutefois y parvenir, et ses velléités de prendre  possession de la capitale du pays deviennent de plus en plus périlleuses.  «Nous sommes prêts à repousser toute nouvelle tentative folle du  putschiste Haftar», a déclaré le ministre de l'Intérieur du GNA, Fathi  Bashagha, à la télévision Libya al-Ahrar, qualifiant l'annonce faite par  Haftar de «nouvelle tentative désespérée». 

1000 morts, des milliers de blessés et 140 milles déplacés 
Comme il fallait s'y attendre, l'offensive de Haftar contre Tripoli,  condamnée par la communauté internationale, n'a fait qu'empirer la  situation humanitaire et économique du pays. 
En effet, plus de 1000 personnes sont mortes et plus de 140 milles  personnes ont été déplacées, selon des bilans de l'Onu, alors que de  nombreuses infrastructures de base ont été réduites en cendres par le fait  de la guerre, ce qui a incité le GNA à conclure, en vue d'aide militaire,  des mémorandums d'entente avec la Turquie. 
Dans la foulée de ces développements, la Russie, partisane de  l'application du processus de règlement politique onusien, a montré sa  volonté de peser de son poids dans le dossier libyen, alors que les Etats  unis, qui voulaient rester à équidistances des parties libyennes, ont fini  par réitéré leur appui à l'accord politique inter-libyens de 2015,  favorisant une solution politique.         
En outre, la dégradation du secteur économique a été aggravée par la  suspension de la production pétrolière pendant des mois sur plusieurs  champs de pétrole. C'est le cas aussi du trafic aérien suspendu dans tous  les aéroports du pays y compris dans celui de Triploli qui fait, de temps  en temps, l'objet de raids aériens menés par l'aviation des troupes de  Khalifa Haftar    
L'agression contre Tripoli n'a pas épargné également les entrepôts de  denrées alimentaires privant les Libyens des vivres et produits nécessaires  pour le quotidien des populations.
 
Salamé s'inquiète face à l'escalade des ingérences  étrangères
Le chef de la médiation onusienne pour la Libye,  Ghassa Salamé, a exprimé son inquiétude face à la «nette escalade» des  «ingérences étrangères» dans la crise que traverse ce pays, regrettant le  fait que le Conseil de sécurité de l'Onu n'a toujours pas de résolution  appelant à un cessez-le-feu après neuf mois d'agression contre la capitale  Tripoli. Dans un récent entretien au quotidien Le Monde M. Salamé pointe  «l’intensification des ingérences étrangères» autour de l'attaque contre  Tripoli û commencée en avril û depuis que l'officier à la retraite Khalifa  Haftar tente de s'emparer de la capitale libyenne, où siège le gouvernement  d'union nationale (GNA), reconnu par l'ONU, et face à laquelle la  communautéinternationale s’est révélée «impuissante». A une question, le conflit libyen est-il en train de s’internationaliser  ?, l'émissaire de l'Onu a expliqué qu'«il s’agit d’une nette escalade du  conflit. Les dernières semaines ont été marquées par une aggravation de  cette ingérence extérieure».  «Je suis désappointé, déçu, blessé qu’après neuf mois de combats à  Tripoli, nous n’ayons toujours pas de résolution du Conseil de sécurité  appelant à un cessez-le-feu. Tout cela fait que les ingérences extérieures  se multiplient et s’aggravent», a-t-il ajouté. 
A propos de l'embargo sur la livraison d'armes à la Libye décrété par  l'Onu en 2011, et questionné sur l'«impuissance» du Conseil de sécurité à  le faire respecter, M. Salamé a répondu : «Il n’y a pas que des acteurs  régionaux qui violent cet embargo (sur les armes), il y a aussi des membres  du Conseil de sécurité» Ghassan Salamé est le chef de la mission des Nations unies pour la Libye  depuis l’été 2017. Outre ses activités de diplomate onusien.