Cinéma : Le documentaire «Patronymes algériens, haine française» projeté à Alger

Publié par DK NEWS le 14-03-2022, 17h55 | 9

Le documentaire «Patronymes algériens, haine française» de Fatiha Bourouina, qui pose la problématique de la généalogie et de la filiation sous l’administration coloniale, a été projeté dimanche soir à Alger.

Accueilli à la salle de cinéma El-Khayam, dans le cadre de la Semaine du film documentaire (12-17 mars), le documentaire décrypte la problématique des patronymes attribués abusivement aux Algériens par l'administration coloniale.

Présenté pour la première fois en Algérie, ce long métrage de 72 minutes s'appuie sur des éclairages d'universitaires et chercheurs en histoire, qui ont relevé les dégâts causés par l’administration coloniale à travers son Etat civil qui a prêté aux Algériens des noms patronymiques grotesques et humiliants.

Le code de l'Etat civil de 1882 imposait aux Algériens de porter des patronymes «humiliants» et «réducteurs», selon les témoignages recueillis dans ce documentaire. Pour ces chercheurs en histoire, interrogés, l'Etat civil de l’époque coloniale qui avait mené une politique d'assimilation en Algérie, visait à obliger les Algériens à porter des noms marquant ainsi une «rup ture dans les modes traditionnels de nomination».

Les intervenants ont mis également en exergue les desseins politiques des autorités coloniales qui, par la Loi du 23 mars 1882, œuvraient à dénationaliser et de détruire la cohésion sociale et la propriété collective.

«En procédant à l'adjonction d'un patronyme, parfois vulgaire, au prénom et surnom par lesquelles les familles étaient connues, les autorités coloniales ont voulu casser l’affiliation et la structure communautaire et sociale, en plus de poser des problèmes d’héritage».

Dans le Sud algérien, la démarche coloniale, appuyée par une série de lois, n’a pas eu l’effet escompté et l’opération entamée (tardivement) en 1920 a échoué, relève un chercheur en histoire de l’université de Tamanrasset.

L’administration coloniale a trouvé des difficultés à appliquer la loi de mars 1882, qui consiste à attribuer de nouveaux noms patronymiques, notamment chez les Touaregs du fait de la complexité de la nomenclature généalogique chez cette population pour qui les prénoms ont une forte symbolique et très attachés à leur environnement culturel et cultuel , relève cet universitaire.

D’autre part, le film donne la parole à des victimes de l’Etat civil colonial en procédant au changement de noms.

La réalisatrice a suivi les démarches d’un père de famille dont le nom patronymique jugé vulgaire, causait un tort psychologique à son fils, écolier.

Un décret datant de 1971, donne le droit à toute personne de changer de nom en adressant une demande motivée aux autorités judicaires, rappelle un avocat à la caméra de la réalisatrice.

Organisée par le Centre algérien de développement du Cinéma (Cadc), la Semaine du film documentaire a programmé jusqu'au 17 mars la projection de 12 longs métrages documentaires aux contenus en lien avec l'architecture, l'histoire, l'anthropologie et le patrimoine.

A raison de deux séances par jour, le public aura à découvrir des œuvres de cinéastes algériens et étrangers notamment «Babylone Constantine» de Sid Ahmed Semiane, «Sophonisbe, Reine sacrifiée de Cirta» de Abdallah Touhami, «André Ravéreau et l’Algérie» de Jean Asselmeyer ou encore «Enrico Mattei et la Révolution algérienne» de Ali Ayadi.

Deux autres documentaires «Bahrouna» de Fatiha Afiane et «Ni là-bas, ni là-bas» de Hocine Saadi seront également présentés pour la première fois en Algérie.