Burkina Faso : accord sur les institutions de transition, un nouveau paysage politique profile à l'horizon

Publié par DK News le 14-11-2014, 16h29 | 48

Le Burkina Faso a franchi une étape importante vers une sortie de crise après que l'armée et les civils aient approuvé à l'unanimité la "charte de transition", rendant possible une remise rapide du pouvoir aux civils par les militaires.

"Le projet de charte de transition", a été voté à l'unanimité par les membres de la commission intermédiaire qui rassemblait opposition, autorités religieuses et traditionnelles, société civile et armée.
Près de deux semaines après la démission forcée du président Blaise Compaoré, chassé après 27 ans au pouvoir par une insurrection populaire déclenchée par sa volonté de modifier la constitution pour pouvoir se représenter à la prochaine présidentielle prévue en 2015, les laborieuses tractations des derniers jours ont finalement apporté leurs fruits.

"Ce travail ouvre de nouvelles perspectives à notre pays, surtout à la jeunesse", dont l'avenir sera "protégé", s'est réjoui Ablassé Ouédraogo, ancien ministre des Affaires étrangères et icône de l'opposition, qui s'est dit "comblé".Adama Kanazoé, un jeune politicien, a qualifié la journée d'"extraordinaire". "Une belle page de notre histoire s'est écrite", a-t-il renchéri.

Barkissa Konaté, membre de la société civile, a fait part de sa "fierté" d'être "une jeune Burkinabè". "La révolution est en marche. Maintenant, nous allons avoir une vraie démocratie!", a-t-elle lancé.
Le lieutenant-colonel Isaac Zida, nommé chef du régime de transition depuis que l'armée a pris les commandes à la suite de la chute du régime Compaoré le 31 octobre, s'était montré rassurant dans l'après-midi.

Une étape désormais franchie en attendant la présidentielle

Le président de la transition, un civil, sera nommé par un collège électoral. Il ne pourra être issu d'un parti politique.Le président de l'assemblée, nommée Conseil national de transition (CNT), une chambre de 90 membres, sera également un civil.

Le Premier ministre, désigné par le président, pourra être un civil ou un militaire, selon les délégués, 80 élements en tout. Il sera à la tête d'un gouvernement de 25 membres. "Comme dans une démocratie normale, le président choisira une personnalité qu'il considère avoir les compétences" en tant que Premier ministre, a remarqué Luc Marius Ibriga, un responsable d'ONG, membre éminent de la société civile.

La présence d'un militaire en tant que chef du gouvernement avait été envisagée dans la journée.
Les autorités intérimaires doivent diriger cette ex-colonie française de quelque 17 millions d'habitants pour une durée d'un an et organiser des élections d'ici novembre 2015.Cependant, le lieutenant-colonel avait déclaré, "le fait qu'un civil dirige la transition, est notre solution depuis le départ".

Mais il est "tout à fait indiqué" que cette personne "ne soit pas un homme politique", faute de "garantie" qu'il ne fera pas campagne "pour son propre parti politique" lors des prochaines élections, ce qui replongerait le Burkina "dans une crise profonde", a fait valoir le lieutant-colonel Zida.

Des concessions réfléchies

Mis sous pression par l'Union africaine (UA) et les partenaires occidentaux du Burkina Faso pour qu'ils rendent le pouvoir, les militaires ont dû revoir leurs ambitions à la baisse.
"Nous avons fait beaucoup de concessions dans l'intérêt du Burkina Faso", a estimé le lieutenant-colonel Zida.

Le temps presse. L'Union africaine a posé le 3 novembre un ultimatum à l'armée pour qu'elle passe le flambeau aux civils dans les quinze jours, sous peine d'éventuelles sanctions. Le délai expire ce lundi.
De son côté, le Fonds monétaire international (FMI) avait annoncé qu'il attendrait la formation d'un gouvernement "reconnu internationalement" pour reprendre son aide.

Du côté burkinabè, on réclame du temps pour organiser la succession de Blaise Compaoré, exilé en Côte d'Ivoire. Les médiateurs africains "veulent aller directement aux élections, même dans six mois. Mais pour nous, il ne s'agit pas seulement de cela", insiste un délégué de la société civile.

Dans le projet de Charte initial, l'armée proposait notamment une assemblée de transition comporte 60 membres, répartis équitablement entre l'opposition (15 sièges), la société civile (15), l'armée (15) et l'ancienne majorité (15).

A l'inverse, les civils avaient prévus un président civil, un gouvernement de 25 ministres et une Assemblée de transition de 90 députés. Seuls 10 sièges sont attribués aux militaires et 10 autres à l'ancienne majorité dans ce projet. L'armée, qui avait des prétentions sur cle poste de président de l'Assemblée a "cédé" face aux civils, avait reconnu M. Zida.