Après les attentats de Paris : Internet, en souffre-douleur ?

Publié par Par Samy YACINE le 23-01-2015, 16h45 | 40

A peine  quelques instants après les horribles attentats de Paris, le 7 janvier 2015, la classe politique est montée au créneau pour désigner internet comme source de tous les maux et dangers qu’il faut surveiller de près.

Contraints, les opérateurs internet  anticipent le mouvement tout en criant à qui veut les croire qu’ils ne badineront avec les principes d’un nécessaire équilibre entre les raisons de sécurité et la liberté d’expression sur internet. A voir..

Internet est devenu en l’espace de ces quelques jours qui ont suivi les attentats de Paris un véritable réceptacle des tensions et luttes qui traversent les microcosmes sociopolitiques de nombreux pays, particulièrement la France.

Très tranchant, comme à son habitude, l’ancien président français, devenu patron de l’opposition, Nicolas Sarkozy, a clairement exprimé le souhait de sa famille politique de voir de près ‘’ce qui se passe sur internet’’.

Dans un même chœur, le premier ministre Manuel Valls n’a pas tardé à promettre des mesures pour ‘’dans une semaine’’,  à faire prendre par son ministre de l’Intérieur, pour,  selon le site de l’hebdomadaire français lepoint.fr,  suivre de plus près  «internet et les réseaux sociaux, plus que jamais utilisés pour l'embrigadement, la mise en contact et l'acquisition de techniques permettant de passer à l'acte».

Sans savoir précisément quelle  direction législative prendre, d’autant que la ministre   française de la culture et de la communication reconnaissait qu’en la matière, la France disposait des moyens juridiques adéquats, le gouvernement a vite fait de se tourner vers les opérateurs internet et notamment Youtube de Google pour l’inviter à supprimer les fichiers à contenus ‘illégaux’’. 

De son côté la presse française a mené une véritable campagne pour contribuer à ‘’faire le ménage’’ des contenus sur internet afin de faire taire  les commentaires et comportements apologétiques de la violence, du terrorisme et de l’antisémitisme.

Le comportement des principaux acteurs de l’internet a été ainsi passé au peigne fin pour les inciter à plus d’engagement dans ce mouvement de lutte contre les idées extrémistes et pour étouffer toute sonorité discordante. Ainsi le géant Google a du ‘’en prendre pour son grade’’ pour avoir du temps à bloquer une vidéo montrant l’exécution du policier français  Ahmed Merabet  lors de l’attaque contre le siège du journal Charlie Hebdo.    

La rédaction du site de l’hebdomadaire français lepoint.fr revient en effet longuement sur cette vidéo postée «tout juste deux heures après l'attaque contre Charlie Hebdo» et souligne avoir signalé «  par courriel aux équipes de Google France la publication sur YouTube de la vidéo, intégrale et non floutée, de l'exécution du policier Ahmed Merabet par les frères Kouachi », ajoutant que  quelques «minutes plus tard, nos deux contacts très réactifs accusent réception du message en nous remerciant. »

Le site de l’hebdomadaire remarquera néanmoins que la vidéo continuera d’être visionnée pendant 6 jours, avec un total de plus de 2,2 millions de visiteurs, avant qu’elle ne soit bloquée "en raison d'une réclamation d'ordre juridique émise par le gouvernement", expliquera-t-il.

 Le patron de Google en France, Nick Leeder s’est expliqué à l’occasion sur la politique de contrôle éditoriale appliquée par le moteur de recherche qui fait que  «lorsqu'il y a des choses qui ne correspondent pas à (sa) politique, comme de l'incitation au terrorisme, ses équipes les suppriment automatiquement», indique-t-il sur le site du quotidien leparisien.fr, avant de préciser que le souci est de  «trouver le bon équilibre entre la surveillance pour la protection des gens, et la liberté d'expression. 

Réputé comme le site de réseautage le plus fréquenté sur internet, Facebook qui reçoit sur son réseau des jeunes utilisateurs d’à peine 13 ans,   également mis à contribution pour faire le nettoyage de ses fichiers, s’était déjà mis, depuis quelques temps, à    « instaurer des barrières pour les utilisateurs les plus jeunes afin d'empêcher, par exemple, les moins de 18 ans de voir des vidéos choquantes ou offensantes qui sont partagées sur leur fil d'actualité », déclare un de ses portes parole à l’AFP, reprise par lepoint.fr, ajoutant que lorsque «les gens partagent quelque chose sur Facebook on attend d'eux qu'ils partagent de manière responsable, notamment en ciblant qui va pouvoir voir leurs contenus ».

Hormis cela, les suites  des attentats de Paris ont suscité un large débat sur les scènes médiatiques et politiques impliquant notamment des personnalités politiques et artistiques ainsi que des journalistes, acquis à l’idée que l’action précipitée et les mesures d’exception n’ont jamais permis d’assurer des conditions réelles d’une  sécurité pérenne.  

Certains ont également mis en exergue la nécessité de préserver internet comme cadre d’expression ouvert, pluraliste, respectueux des droits à la vie privée et à la confidentialité, faute de quoi il perdrait ses attributs originels qui ont fait le succès qu’on lui connait   et qui lui donne une plus grande aura que les medias traditionnels réputés, par trop ‘’surplombant’’.