«Chifra Min Sarab», un roman d'espionnage haletant de Ismaïl Bensâada

Publié par Par Fodhil BELLOUL le 12-03-2015, 16h06 | 69

Action, suspens, jolies femmes et intrigue en plein conflit arabo-israélien mêlant les services secrets de plusieurs pays: l'auteur algérien Ismaïl Bensâada réunit dans «Chifra Min Sarab», tous les ingrédients d'un roman haletant d'espionnage, rédigé en langue arabe.

Dans ce livre de 283 pages, paru aux éditions Chihab, dont le titre peut être traduit par «Code mirage» et qui a pour cadre Alger en 1968, le lecteur suit les aventures de Yaâkoub Maïr, un officier la CIA d'origine algérienne, en quête d'un microfilm contenant le code qui permet de décrypter les communications de l'armée égyptienne.

Mis au parfum par la sublime Francesca, l'épouse de Chérif Khan (qui a volé le code) -un transfuge des services français passé au FLN durant la guerre de libération puis devenu mercenaire au service du renseignement italien- Yaâkoub Maïr va affronter une multitude de dangers pour mettre la main sur ce code d'une valeur «inestimable» pour Israël, allié des Etats-Unis.

En plus de constituer un atout majeur pour le camp occidental dans un contexte de Guerre froide, ce code est aussi recherché par d'autres individus (roumains, italiens, etc) qui souhaitent, tout comme Chérif Khan, le céder au plus offrant.

Allié au brutal agent égyptien Yasri El Kachef qu'il convainc de trahir son pays contre de fortes sommes d'argent, Maïr enchaîne bagarres, planques, courses-poursuites et interrogatoires, sans réussir à mettre la main sur ce code qui lui échappe comme un «mirage».

Avec de multiples rebondissements, des scènes d'actions ou d'amour mémorables, une atmosphère nocturne qui sublime la beauté d'Alger et un humour très présent dans les dialogues, le romancier utilise avec brio les ressorts du roman d'espionnage pour dérouler l'intrigue et tenir le lecteur en haleine jusqu'à la dernière page du livre.

Cette narration efficace, servie par le style à la fois simple, précis et très imagé, se trouve renforcée par la profondeur psychologique que l'auteur confère progressivement à son personnage principal.

Espion aguerri, combattant farouche et séducteur invétéré, Yaâkoub Maïr s'avère aussi un homme sensible et très attaché à sa ville natale, une fêlure dans son caractère impitoyable qui facilite l'identification chez le lecteur, en dépit de son alliance avec la puissance sioniste qui en fait un anti-héros des plus achevés.

Ismaïl Bensaâda excelle également dans la construction de ses personnages secondaires: femmes plantureuses et fatales, agents doubles attirés par l'appât du gain, tortionnaires et autres individus constituent une galerie aussi diversifiée que convaincante.

Les lecteurs de «Chifra Min Sarab» pourront, par ailleurs, apprécier la description de la capitale algérienne post-indépendance, une ville cosmopolite, avec ses quartiers populaires ou huppés du centre-ville, et ses fermes coloniales de la périphérie que l'auteur reconstitue avec minutie et nostalgie.

Le dénouement du récit offre, quant à lui, un aperçu de la veine patriotique du romancier qu'il distille avec subtilité en mettant l'accent sur la solidarité panarabe et l'efficacité des services algériens, absents, non sans raison, tout au long du roman.

«Chifra Min Sarab» constitue une expérience rarissime dans la littérature algérienne où les thèmes de l'espionnage a été peu abordé, excepté quelques publications, peu connues, tentées dans les années 1970/1980 et plutôt orientées vers le polar.

Né en 1958 à Batna, Ismaïl Bensâada a également écrit  «Madjnoun Tarablouss» (Le fou de Tripoli), un premier roman paru en 2010 en Tunisie.

APS