Massacres du 8 mai 1945, l'étincelle qui a engendré la révolution du 1er Novembre

Publié par DK News le 07-05-2015, 19h50 | 210

Les historiens et enseignants sont unanimes à dire que les massacres du 8 mai 1945, indépendamment de la douleur subie par le peuple algérien, ont été l'étincelle qui a engendré la révolution du 1er novembre 1954, partant de la conviction que ce qui a été pris par la force, sera restitué par la force.

L'administration française a tenté de «minimiser» les massacres abjects qui ont fait 45 000 martyrs en les qualifiant de «non évènement», a déclaré le professeur d'histoire à l'université d'Alger, Amer Rekhila, dans un entretien à l'APS.

Il a précisé que les massacres du 8 mai «ne se sont pas déroulés seulement dans les villes de Sétif, Guelma et Kherrata comme prétendu par le colonilisateur mais ont eu également lieu dans 19 villes de l'Est algérien et plusieurs autres du Centre et du Sud pour se poursuivre jusqu'au 25 mai 1945».

Après avoir qualifié les tueries et les déportations d'«extermination collective», il a affirmé que la France qui «se vantait des slogans de liberté et de justice, avait commis des crimes identiques à ceux des nazis et des fascistes de l'époque». Evoquant le nombre des martyrs tombés lors de ces massacres, Amer Rekhila a relevé que c'est le parti du peuple algérien (PPA) qui «avait estimé leur nombre à 45000 dans le mémorandum adressé à la Ligue arabe, nouvellement créée alors que l'Association des Ulémas algériens en dénombrera 90 000».

Il a souligné également que le colonialisme français «a falsifié la vérité et trompé l'opinion publique nationale et internationale en déclarant que le nombre des victimes était de 1 200 et en écartant sa préméditation de ne pas porter les personnes décédées sur les registres de l'état civil pour avancer un chiffre erroné».

De son côté, le chercheur universitaire, Mohamed Taybi, a estimé dans un entretien à l'APS, que les évènements du 8 mai 1945 avaient révélé le colonialisme français sous son véritable jour au regard de son «architecture militaire à caractère fasciste» et au «déni de la France à l'égard des combattants algériens qui ont contribué à sa victoire sur le nazisme».

Concernant les tentatives de l'administration française de dissimuler les faits survenus il y a 70 ans, il a affirmé qu'«il ne s'agissait pas uniquement du nombre des martyrs mais aussi de l'impact psychologique, social et économique induit» ce qui démontre, selon lui, que l'objectif était d'atteindre tout un peuple qui a osé revendiquer la liberté à l'instar des autres peuples au lendemain du triomphe des forces alliées lors de la Deuxième Guerre mondiale». Rappelant le rôle de ces évènements dans la «prise de conscience nationale», il a qualifié ces derniers de «référence spirituelle de la déclaration du 1er novembre».

D'autre part, l'historien Mohamed Corso a estimé que le terme «massacres» pour décrire ces évènements était «faible», ajoutant qu'il serait pertinent de parler d'«extermination collective». Sur la base de témoignages et faits vécus, le colonialisme français «avait mobilisé les différents corps de l'armée pour réprimer les Algériens sortis dans la rue partager la liesse des Européens après la victoire des alliés lors de la Deuxième Guerre mondiale (1939-1954) notamment après avoir combattu aux côtés des Français».

Le 8 mai 1945, les forces coloniales avaient livré une guerre ethnique aux Algériens en massacrant hommes, femmes, enfants et vieux», a-t-il poursuivi avant de dire que «le massacre n'avait  pas duré un seul jour mais toute une année, soit de mai 1945 à juin 1946».«La presse et les rapports des autorités coloniales évoquaient un retour au calme en juin 1946», a-t-il encore avancé. L'ancien président de la fondation 8 mai 1945 avait demandé des «excuses» à la France, rappelant que le président Jacques Chirac avait présenté durant son mandat les excuses de son pays au peuple juif pour les évènements survenus du temps du Maréchal Pétain.

Par ailleurs, des Français joignent aussi leur voix pour dénoncer les massacres du 8 mai 1945, tel l'avocat Jacques Verges qui a affirmé en 2010 lors d'une rencontre pour la présentation de son livre «La passion de défendre», que la France continuait à ce jour de cacher la vérité de ce qui s'est passé à Sétif, Guelma et Kherrata. «Les massacres du 8 mai 1945 étaient un précurseur du déclenchement de la guerre de libération qui a été précédée par la défaite de la France à Diên Biên Phu (Vietnam). Gilles Manceron, l'historien français avait déclaré, lors d'une rencontre à Guelma en 2011, que les massacres du 8 mai 1945 en Algérie devraient être reconnus comme «crime contre l'humanité».