Les Burundais élisent leur président dans un scrutin controversé et boycotté par l'opposition

Publié par Par Ali KEFSI le 21-07-2015, 17h41 | 16

Les Burundais se sont rendus hier aux urnes pour une élection présidentielle controversée et boycottée par l'opposition, alors que deux personnes ont été tuées à Bujumbura où explosions et tirs ont résonné toute la nuit.

Les bureaux de vote ont officiellement ouvert à 04h00 GMT et quelque 3,8 millions de Burundais sont appelés aux urnes pour une élection boycottée par l'opposition et jugée «non crédible» par la communauté internationale.

Le président sortant burundais, Pierre Nkurunziza qui devrait obtenir un troisième mandat, a voté peu après 10h00 (08h00 GMT) à Buye, son village natal, où la participation dépassait 60%, selon les médias locaux.

Mais à la mi-journée, la mobilisation dans la capitale demeurait extrêmement faible, particulièrement dans les quartiers contestataires.Le scrutin est boycotté par l'opposition qui dénie le droit à M. Nkurunziza - élu en 2005 et en 2010 - de briguer un nouveau mandat et dénonce un «simulacre d'élection», dont elle a demandé sans succès le report.

Après la très large victoire sans surprise du parti au pouvoir, le CNDD-FDD, aux législatives et communales du 29 juin, également boycottées par l'opposition, la victoire de M.  Nkurunziza ne fait aucun doute, selon les observateurs.

En face, ne restent que trois candidats issus de petites formations réputées alliées au pouvoir, en plus de son principal opposant, Agathon Rwasa, qui n'a pas retiré officiellement sa candidature, mais conteste à l'avance la légitimité du scrutin et dit n'avoir pas fait campagne.

Les trois autres candidats enregistrés - Jean Minani, président du parti Frodebu-Nanyuki (opposition), et les deux anciens chefs de l'Etat Domitien Ndayizeye et Sylvestre Ntibantunganya, tous trois opposés à un troisième mandat de M. Nkurunziza - se sont retirés de la course, dénonçant «une mascarade» et une élection «pas aux normes (...) internationales».

Explosions et tirs à Bujumbura
L'élection présidentielle au Burundi se tient sous tension et deux personnes ont été tuées dans la nuit à Bujumbura où explosions et tirs ont résonné toute la nuit avant l'ouverture d'un scrutin.
Un policier a été tué dans la nuit par l'explosion d'une grenade dans le quartier de Mutakura (nord), selon un responsable de la police, tandis qu'un civil a été abattu par balles à Nyakabiga (est) dans des circonstances inconnues, d'après des témoins.

Une explosion suivie de tirs ont été entendus mardi matin peu avant l'ouverture des bureaux de vote dans le quartier de Musaga (sud de Bujumbura), ont rapporté les médias.Tout au long de la nuit d'autres explosions et tirs ont retenti dans la capitale, rappelant-on. Willy Nyamitwe, principal conseiller en communication du président Nkurunziza, a dénoncé des «actes terroristes», visant à «intimider les électeurs».

La candidature de M. Nkurunziza a plongé depuis fin avril le Burundi dans une profonde crise politique, émaillée de violences qui ont fait plus de 80 morts.Les autorités burundaises ont déjoué à la mi-mai une tentative de coup d'Etat militaire et étouffé à la mi-juin un mois et demi de manifestations quasi quotidiennes à Bujumbura.

Mais le pays a connu depuis une série d'attaques à la grenade et, depuis dix jours, des combats et escarmouches entre armée et rebelles dans le nord du pays, près de la frontière avec le Rwanda.

Appels à la retenue et au dialogue
La communauté internationale - ONU, partenaires occidentaux, Union africaine - estime que le climat politique et sécuritaire actuel ne permet pas un processus électoral crédible. A quelques heures de l'ouverture du scrutin, le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon a appelé les autorités burundaises à «tout faire pour assurer la sécurité et la tenue pacifique» de l'élection présidentielle.

Il invite «toutes les parties à s'abstenir de commettre toute forme de violence qui pourrait compromettre la stabilité du Burundi et de la région».Prenant acte de la suspension sine die du dialogue inter-burundais, M.  Ban a noté que cette suspension «intervient alors qu'aucun accord n'a été trouvé sur un ensemble de questions susceptibles de contribuer à la création d'un environnement propice à la tenue d'élections crédibles et pacifiques».

M.  Ban a, dans le même contexte, réitéré son appel à la reprise d'»un dialogue franc entre toutes les parties».Pour sa part, le ministre des Affaires étrangères de la Belgique, qui est un important partenaire de son ancienne colonie, a «regretté» l'organisation de ces élections et rappelé que son pays allait «réexaminer sa coopération avec le Burundi».