Mauritanie: Le Parlement adopte une loi incriminant l'esclavage

Publié par DK News le 14-08-2015, 18h18 | 20

L'Assemblée nationale mauritanienne a adopté à l'unanimité une nouvelle loi portant sur l'incrimination de l'esclavage, désormais considéré comme un «crime contre l'humanité» passible à 20 ans de prison, ont rapporté des médias locaux.

L'article premier de la loi votée mercredi soir par les députés stipule que «l'esclavage constitue un crime contre l'humanité. Il est imprescriptible», selon l'agence de presse mauritanienne AMI.
Le parlement a adopté le projet de loi abrogeant et remplaçant la loi 2007-048 du 3 septembre 2007 portant incrimination de l'esclavage et réprimant les pratiques esclavagistes.

Dans l'ancienne loi, l'esclavage était considéré comme un crime, à travers une seule de ses formes liées à la privation de liberté et à un travail sans salaire.Le nouveau texte adopté par l'Assemblée nationale criminalise «dix autres formes» d'esclavage et «double les peines» contre leurs auteurs, selon le ministre mauritanien de la Justice, Brahim Ould Daddah, cité par AMI.


Parmi ces nouvelles formes incriminées, figurent le mariage forcé d'une femme, considérée comme esclave, «moyennant une contrepartie en espèce ou en nature», sa «cession à (un) tiers» ou sa «transmission par succession, à la mort de son mari, à une autre personne».
Les peines maximales encourues pour ces pratiques passent à 20 ans de prison dans la nouvelle loi, assorties d'amendes, contre cinq à 10 ans de détention auparavant.
Le nouveau texte institue aussi des juridictions spécialisées pour juger les infractions relatives à l'esclavage et accorde aux victimes une assistance judiciaire et une procédure gratuite.
Il permet en outre «un dédommagement» des victimes de l'esclavage et impose au juge de prendre des mesures conservatoires, la saisie de biens par exemple, contre les auteurs d'infractions pour garantir les droits des victimes. La nouvelle loi permet par ailleurs aux ONG «reconnues» le droit de dénoncer les cas d'esclavage, d'assister les victimes et de se constituer partie civile.
Le projet de loi intervient conformément aux modifications de la Constitution et aux recommandations de la feuille de route sur l'éradication des formes contemporaines de l'esclavage.
Il introduit une terminologie claire et précise relative à l'esclavage et incorpore les infractions prévues par les conventions internationales en  la matière.
Les députés ont exhorté le gouvernement à appliquer strictement ce projet de loi qui, selon eux, constitue le «premier texte réaliste et applicable pour lutter contre le phénomène de l'esclavage».
Ils ont appelé à la généralisation des tribunaux compétents dans toutes les wilayas pour que toutes les victimes puissent jouir de leurs droits, appelant à l'organisation des campagnes de sensibilisation dans toutes les zones du pays pour informer les citoyens du contenu de ce projet de loi.Ils ont, en outre, rappelé l'ensemble des départements ministériels la nécessité de s'acquitter convenablement de leurs rôles dans la mise en oeuvre et le suivi de la feuille de route pour l' éradication des séquelles de l'esclavage. Officiellement, l'esclavage a été aboli en 1981 en Mauritanie. Le phénomène perdure néanmoins, selon des ONG.