Selon une historienne française : La «barrière scolaire», instrument majeur de discrimination pendant la période coloniale

Publié par DK News le 18-09-2015, 22h49 | 103

La «barrière scolaire» figureparmi les instruments majeurs de la discrimination à l'égard des Algériens en quête d'emploi pendant la période coloniale, a affirmé jeudi à Oran l'historienne française, Annick Lacroix.

«Bien avant la mise en oeuvre de la barrière juridique, la misère du système éducatif de l'administration coloniale française privait d'emblée les Algériens d'accès aux emplois publics», a souligné l'historienne lors d'une conférence animée au siège du Centre national de recherche en anthropologie sociale et culturelle (Crasc). L'intervenante a fait présentation dans ce cadre de son travail de recherche mené durant cinq années (2010-2014) à partir de documents d'archives conservés en Algérie et en France.

Cette étude, intitulée «Une histoire sociale et spatiale de l'Etat dans l'Algérie colonisée: l'administration des Postes, Télégraphes, Téléphones du milieu du XIXe siècle à la Seconde Guerre mondiale», a également fait l'objet d'une thèse de doctorat soutenue par Annick Lacroix en décembre 2014.

La conférencière a notamment observé que l'administration coloniale française n'a pas eu besoin de «fabriquer» les règles discriminatoires, puisqu'il y avait l'exigence du certificat d'études primaires comme niveau minimal scolaire pour accéder au concours d'embauche. «Du fait de la misère du système éducatif colonial, une petite minorité d'Algériens possédait ce certificat», a-t-elle rappelé, insistant sur le fait que «la barrière scolaire fut plus forte que la juridique qui, dans le secteur postal, limitait l'accès des Algériens aux seuls postes de facteur ou guichetier». L'historienne a évoqué en outre la Loi Jonnart (1919) permettant aux Algériens d'accéder à tous les grades sauf celui de directeur, alors que la barrière scolaire n'offrait aucune possibilité dans ce sens. «L'administration des Postes en période coloniale a offert des débouchés à la population européenne, tandis que les Algériens demeuraient au mieux au  grade subalterne sans perspective d'avancement», a-t-elle relevé. S'agissant des motivations l'ayant amenée à aborder la thématique postale en période coloniale, Annick Lacroix a indiqué que l’administration de ce secteur constitue «un observatoire efficace des rapports sociaux complexes et asymétriques qui se jouent en situation coloniale». «Ce travail de thèse a été rendu possible par la consultation de nombreuses archives conservées en France et en Algérie, notamment au niveau des Archives nationales (Alger), dans les wilayas d’Oran et Constantine ainsi que dans les locaux de la poste algérienne», a-t-elle fait savoir. Agrégée en histoire, Annick Lacroix est actuellement chercheuse associée à l’Institut des sciences sociales du politique, de l'Ecole normale supérieure de Cachan (France) et attachée temporaire d’enseignement et de recherche à l’Institut national des Langues et Civilisations orientales (Inalco, France).