Souk Ahras recherche des débouchés à son abondante production laitière

Publié par DK News le 05-10-2015, 22h20 | 77

La production abondante de lait réalisée la saison dernière à Souk Ahras (110 millions de litres) a mis au jour un déficit criant en matière d’unités de transformation, a indiqué le directeur des services agricoles (DSA), Abderrahmane Mansouri.

Grand bassin laitier par excellence, Souk Ahras ne compte que deux petites laiteries d’une capacité de 50.000 litres, ce qui est «très en deçà» des capacités de production de cette filière en constante évolution en termes de cheptel et de nombre d’éleveurs, a souligné ce responsable à l’APS. Ajoutant que 32% de la production totale est le fruit de la traite de 9.000 vaches laitières de races modernes représentant 17 % du cheptel de vaches laitières de cette wilaya, fort de 50.100 têtes, M. Mansouri a indiqué que 40 % du volume produit est écoulé auprès de petits commerçants spécialisés dans le lait et ses dérivés, et de cafetiers de cette wilaya où la consommation de lait cru de vache reste très appréciée. Le reste est livré à des laiteries situées dans les wilayas d’Annaba, de Constantine, d’El Tarf, de Guelma, d’Oum El Bouaghi et de Béjaïa.

Pourtant, selon ce responsable, le Comité d'assistance à la localisation et à la promotion des investissements et de la régulation du foncier (Calpiref) a validé, dans la wilaya de Souk Ahras, six (6) projets d’unités de transformation de lait à Sedrata dont le périmètre agricole irriguée se prête à la culture des fourrages verts.

La localité de Machroha, distante de 20 km au Nord de Souk Ahras, avait occupé en 2012, avec 26 millions de litres, le premier rang national en matière de production de lait, a rappelé le directeur des services agricoles.

 

Dominance de la pratique traditionnelle d’élevage

L’élevage bovin reste largement pratiqué de manière traditionnelle par les éleveurs en l’absence d’investissements pour la modernisation des équipements qui restent très onéreux, voire «hors de portée» de la majorité des producteurs laitiers de cette wilaya, selon M. Mansouri.

Les avantages consentis par les pouvoirs publics aux producteurs et collecteurs de lait ont permis de porter en peu de temps de 10% à 38% le taux des quantités de lait collectées.

Malgré les efforts déployés pour promouvoir la filière, de nombreuses insuffisances persistent, notamment en matière de diversification des aliments de bétail, de suivi sanitaire et d’organisation du réseau de collecte. La wilaya de Souk Ahras compte 102.000 bovins dont 50.100 vaches laitières dont 9.000 de races modernes à haut rendement, 12.100 de races hybrides et 29.000 de races locales ainsi que 5.000 éleveurs dont 2.100 sont associés au programme de collecte de lait. Selon M. Mansouri, l’Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers (Onil) assure depuis fin 2013 des aides de 12 dinars/litre aux éleveurs, 5 dinars/litre aux collecteurs et 5 dinars/litre aux laiteries.

 

Appel à l’ouverture d’une annexe de l’ONIL

Pour dynamiser davantage cette filière lait, le DSA préconise l’ouverture, à Souk Ahras, d’une agence de l’Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers (Onil) qui assurerait une prise en charge «plus rapprochée» des aspects technique, économique et de contrôle liés aux différentes phases de production ainsi que la formation des éleveurs et de leurs enfants. Le même responsable souhaite également une implication «plus engagée» dans le développement des ressources humaines de la filière de la part de la direction de la formation professionnelle et de l’université qui dispose, à Taoura, d’un institut des sciences agronomiques et vétérinaires. Il propose en outre l’institution d’une prime «sanitaire» pour les éleveurs qui obtiennent l’agrément sanitaire vétérinaire et l’augmentation de l’indemnisation attribuée en cas d’abattage sanitaire des bovins.

 

L’avenir de la filière tributaire

de l’industrie de transformation Pour le président de la Chambre de l’agriculture, Mohamed Yazid Hambli, l’avenir de l’agriculture, y compris celui de la filière, reste tributaire de l’émergence et du développement d’une industrie de transformation qui inciterait les producteurs à investir davantage dans l’extension et la modernisation de leurs activités.

Une plus large disponibilité des fourrages assurerait l’augmentation de la production laitière, d’où la nécessité d’étendre les surfaces consacrées à la culture des fourrages verts, a encore estimé M. Hambli, rappelant que la Chambre a lancé une première expérience avec le concours d’un entreprise privée de Constantine portant sur la culture, sur une surface de 30 hectares situés dans une exploitation agricole de Sedrata, d’une variété nouvelle de fourrage présentant l’avantage de préserver pour de longues périodes la valeur nutritive de cet aliment de bétail. Le président de la Chambre de l’agriculture a estimé «vital» d’inciter les jeunes, à travers les différents dispositifs de soutien à l’emploi, à se lancer dans de petits projets de transformation et de production de divers dérivés du lait. Pour protéger les intérêts des professionnels de la filière, le ministère de l’Agriculture a prévu, à la suite d’une rencontre avec les éleveurs laitiers, des mesures destinées, sur le court et le moyen termes, à améliorer l’accès aux fourrages, à accélérer les délais d’octroi des primes de soutien et à réviser le prix de vente aux laiteries. Il est également prévu la mise en place d’un mécanisme de suivi et de surveillance associant les opérateurs de la filière afin d’augmenter le taux d’intégration de la production nationale et réduire la facture des importations. Au cours de la même rencontre, il a été convenu d’adopter, à court terme, de mécanismes de facilitation des approvisionnements en fourrage auprès des minoteries et la décentralisation du dispositif de soutien pour lui conférer avantage d’efficience. A moyen terme, il a été décidé d’examiner les possibilités d’améliorer l’actuel dispositif de soutien, de développer les crédits collectifs et de parachever le processus de structuration de la filière. Des premières mesures qui gagneraient à être concrétisées pour permettre  aux éleveurs de Souk Ahras, dont quelques-uns vouent une vraie passion pour  leur métier et pour les vaches qui constituent leur gagne-pain, de donner la pleine mesure de leur savoir-faire.  L’un de ces éleveurs, un universitaire reconverti, ne cachant pas son amour pour son petit cheptel bovin laitier, va même jusqu’à citer le Grand Timonier chinois Mao Tsê-toung : la bouse de la vache est plus utile que les dogmes : on peut en faire de l’engrais.