Les magasins de brocante poussent comme des champignons à Médéa où chaque jour de nouveaux arrivants investissent ce créneau, devenu lucratif en raison de la flambée des prix des meubles et autres produits de décoration d’intérieur neufs, a-t-on constaté.
L’érosion continue du pouvoir d’achat de pans importants de la société a favorisé la prolifération de ces commerces, autrefois peu nombreux dans l’ancienne capitale du Titteri, où seuls quelques rares magasins proposaient des meubles usagés, à bas prix, ou certains objets anciens destinés à la décoration.
La marché de la brocante a connu, au cours des dix dernières années, une expansion fulgurante, avec l’ouverture de dizaine de magasins, principalement au centre ville de Médéa, dans certains quartiers comme Rabelais, Sidi-Sahraoui, place Bologhine, Ain-El-Kebir, la cité Ouchène et Bab-El-Kouas, devenus le centre de tous les échanges et les transactions entre vendeurs et acquéreurs.
D’ailleurs, une grande partie de l’ancienne ville, qui date de l’époque ottomane, a prix l'allure de «plaque tournante» de la brocante. Tout ce négocie sur place : meubles, boiserie, produits électroménagers, mais, aussi, toutes sortes d’objets à usage domestique ou utilitaire.
On y trouve de tout et il suffit de taper à la bonne porte et de mettre le prix car, même dans ce domaine, il existe une spécialisation et certains ont, plus que d’autres, «pignon sur rue», à l’intérieur de cette sphère, grâce à l’expérience acquise, au fil des ans, mais, surtout, les moyens financiers dont ils disposent. Ces derniers comptent également une clientèle «assez fidèle» qui fait tourner leurs affaires, à longueur d’année.
La brocante demeure, à bien des égards, le refuge pour nombre de familles aux revenus modestes qui peuvent s'équiper, à moindre coût et vendre ou échanger des objets usagés pour arrondir leurs fins de mois.
Si la multiplication de ce type de magasins constitue une aubaine pour les familles aux maigres ressources, assurées de vendre à «bon prix» leurs meubles ou appareils usagés ou d'en acquérir des produits similaires, retapés, cette profusion de brocantes est autrement vue par les propriétaires de ces commerces.
Ces derniers parlent de «chute» du chiffre d'affaires, en raison de la «saturation» de l’activité de brocante, de la concurrence, mais également du fait du «recul» du pouvoir d'achat des citoyens. Ce facteur a eu pour effet une augmentation de l'offre, alors que les ventes ne cessent de régresser, a fait observer un vieux brocanteur, installé, au quartier «Sidi Sahraoui».
Pour ce commerçant, «les gens vendent pratiquement tout ce qu'ils jugent encombrant ou superflu pour pouvoir payer des factures, des dettes contractées ou pour faire face aux dépenses quotidiennes», relevant au passage un «recul» des ventes, regrettant ainsi les années «fastes» où son magasin ne désemplissait jamais de clients à la recherche d'un meuble à «bon prix».
Pour lui, cette situation s'explique par les effets de la concurrence, mais également par le changement de comportement des citoyens qui préfèrent, selon lui, consacrer l'essentiel de leur budget à la consommation, au lieu de dépenser leur argent dans des meubles ou des produits pas nécessairement «indispensables».
Pour Laid, un brocanteur installé à la place Bologhine, au centre-ville de Médéa, la brocante passe par une étape difficile, dont les conséquences se font déjà ressentir, affirmant que certains lots de meubles passent trois à quatre mois avant d'être revendus à des prix dégraissés, alors qu'il y a quelques années, les gens commandaient à l'avance leurs produits.
«Il nous arrive de jeter d'anciens meubles invendus qui, à force de les déplacer, finissent par s'user davantage ou se briser, engendrant un manque à gagner supplémentaire», a-t-il avoué à l’APS.
En dépit de ces difficultés, la brocante reste un ultime refuge pour nombre de familles, notamment celles issues des zones enclavées qui, faute de ressources financières suffisantes, préfèrent se rabattre sur ces magasins pour s'offrir un meuble ou un appareil électroménager à bon marché.