Prix pétroliers : Les compagnies pétrolières internationales sur la corde raide

Publié par DK News le 05-02-2016, 20h18 | 30

Les compagnies pétrolières internationales continuent de subir les effets de la chute drastique des cours du brut, les bilans de 2015 faisant état de pertes à coup de milliards de dollars, entraînant des coupes dans leurs budgets d'investissements et des réductions d'effectifs.

Jeudi, c'est au tour du groupe pétrolier anglo-néerlandais Royal Dutch Shell de faire état de son plus faible bénéfice depuis treize ans, une situation contre laquelle il s'est dit prêt à prendre de nouvelles mesures drastiques si nécessaire.

Cette major pétrolière anglo-néerlandaise a dégagé un bénéfice net de 1,9 milliard de dollars en 2015 contre près de 15 milliards de dollars en 2014.

Son activité «amont» (exploration et production) a été particulièrement affectée, le groupe évoquant les conséquences de la chute des cours du pétrole et du gaz, tandis que l'activité «aval» (raffinage, pétrochimie) a mieux limité les dégâts grâce à de meilleures marges.

«En 2015, nous avons réduit les coûts de façon importante en réduisant nos projets d'investissement et en privilégiant des solutions à moindre coût», a expliqué le directeur général de Shell, Ben van Beurden, dans un communiqué.

Le groupe pétrolier a fait face l'an passé, comme ses concurrents, à une chute vertigineuse des cours du pétrole qui ont récemment atteint le seuil symbolique des 30 dollars le baril.

Shell a déjà annoncé une réduction d'effectifs de 10.000 personnes et réduit ses investissements face à cette évolution défavorable, mais M. van Beurden a prévenu que l'entreprise était prête à «prendre de nouvelles mesures marquantes pour gérer la baisse des cours du pétrole si nécessaire».

La même situation a été vécue par le groupe norvégien de l'énergie Statoil qui a annoncé jeudi une réduction de ses investissements et l'intensification d'un programme d'économies après être profondément tombé dans le rouge en 2015.

Le groupe a perdu 37,5 milliards de couronnes (3,96 milliards d'euros) l'an dernier contre un bénéfice de 21,9 milliards en 2014.

La compagnie prévoit de réduire ses investissements de 3,5 milliards de dollars en 2016, à 13 milliards de dollars.

Ces bilans affirment le coup de frein brutal sur les investissements des compagnies pétrolières à travers le monde, ainsi que la cascade de suppressions d'emplois décidées dans le sillage de la dégringolade des cours de brut qui ont perdu environ 75% de leur valeur depuis juin 2014.

Mi-janvier, le numéro deux du secteur pétrolier en Russie, Loukoïl, avait annoncé une baisse de 1,5 milliard de dollars de ses investissements initialement prévus pour l'année 2016.

«Si on se base sur un prix du baril de 30 dollars, il nous faudra réduire d'environ 1,5 milliard de dollars nos investissements qui étaient prévus à 8,5 milliards», avait déclaré Vaguit Alekperov, directeur général de cette compagnie.

Au total, il a évalué que le marché mondial avait perdu 400 milliards de dollars d'investissements l'an dernier: «Il est probable que le chiffre sera le même cette année», a-t-il prédit.

La suppression des postes d'emploi est une mesure à laquelle ont eu recours de grandes compagnies pétrolières.

C'est le cas du groupe pétrolier britannique BP qui a annoncé son intention de supprimer pas moins de 4.000 emplois dans le monde en deux ans.

Les effectifs de l'activité amont de ce groupe vont ainsi passer de 24.000 à moins de 20.000 employés d'ici à la fin de 2017.

De son côté, le groupe pétrolier britannique Tullow Oil a fait part, début janvier, de son intention de réduire d'au moins 600 millions de dollars ses investissements en 2016.

Le brésilien Petrobras envisage, quant à lui, de baisser ses investissements de 24,5% jusqu'en 2019, et a également réduit ses objectifs de production au Brésil pour 2016 en les faisant passer de 2,185 millions de barils par jour à 2,145 millions.

Saudi Aramco, propriété de l'Etat saoudien et la plus grande compagnie pétrolière au monde avec des réserves d'environ 265 milliards de barils, soit 15 % des réserves mondiales, n'a pas été à l'abri des conséquences de la chute des cours du brut.

L'Etat saoudien envisage de placer en Bourse une partie du capital de sa compagnie dans le cadre d'une vague de privatisations destinées à lever des fonds pour le royaume, selon le vice-prince héritier du pays, Mohamed Ben Salaman qui avait affirmé début janvier à ce sujet «qu'une décision sera prise dans les prochains mois». Ce premier pays exportateur mondial de pétrole a vu ses réserves financières baisser à 611,9 milliards de dollars à la fin 2015, leur niveau le plus bas depuis 2011, alors qu'elles atteignaient 732 milliards de dollars il y a un an et peuvent encore reculer à 500 milliards de dollars à la fin de 2016.

Deuxième producteur mondial de pétrole après la Russie, l'Arabie saoudite a enregistré en 2015 un déficit budgétaire record de 98 milliards de dollars après la baisse de 60% de ses revenus pétroliers à 118 milliards de dollars.

 

Une baisse prévue de 16% des investissements mondiaux en 2016

«Nous observons une pression à la baisse sur les prix du pétrole et il semble que cette pression à la baisse continuera à s'exercer en 2016», a déclaré le directeur exécutif de l'Agence internationale de l'énergie (AIE), Fatih Birol.

«Ce qui m'inquiète le plus, c'est que les investissements dans de nouveaux projets pétroliers ont été réduits de 20% l'an dernier par rapport à 2014.

C'est la baisse la plus forte dans l'histoire du pétrole», a-t-il observé.

«En outre, nous anticipons cette année, dans un environnement à 30 dollars le baril, une baisse supplémentaire de 16% des investissements dans les projets pétroliers», a-t-il ajouté.

«Si les prix du pétrole demeurent à 30 dollars en 2016, les pays du Moyen-Orient perdront l'équivalent de 20% de leur PIB, et la Russie 10% de son PIB», avait prévenu le directeur de l'AIE.

Selon une étude du cabinet de conseil Wood Mackenzie publiée en janvier, 68 grands projets pétroliers et gaziers représentant un investissement total de 380 milliards de dollars, ont été différés depuis que les prix ont amorcé leurs descente.