L’Histoire de Jeanne d’Arc revisitée : L’anneau de la discorde

Publié par Cherbal E-M le 23-04-2016, 19h24 | 61

Le retour, fin mars, de l’anneau de Jeanne d’Arc en France, suite à une vente aux enchères
organisée en Angleterre, rallume la flamme des «nationalistes», souvent ligués dans les bords extrêmes de la droite française, autant qu’il ranime les rivalités historiques entre la France et son «meilleur ennemi» l’Angleterre.

A l’œuvre l’homme politique Philippe de Villiers, ancien ministre, aux thèses proches de l’extrême droite, fondateur, en 1978 du   Puy du Fou, ce parc de loisirs à thématique historique situé en Vendée qui a servi à la récupération de l’anneau.

L’anneau a été acquis en février dernier au cours d’une vente aux enchères par le Puy du Fou, mais juste « avant son arrivée triomphale en Vendée, les Britanniques avaient adressé une mise en demeure au fondateur du parc vendéen, Philippe de Villiers», rapporte lefigaro.fr, précisant que  «deux musées anglais sont sur le point d'exiger la saisie conservatoire de l'anneau par les Douanes françaises et sa mise sous séquestre avant que l'affaire ne soit réglée devant un tribunal.»  Le Conseil national des arts britanniques  a vivement protesté auprès de l’avocat de la partie française en lui faisant notamment remarquer que «ce bijou fait partie intégrante du patrimoine anglais (...). C'est un objet à haute valeur symbolique».  L’affaire est donc entre les mains des juristes et, de l’avis de son avocat, « Philippe de Villiers encourt jusqu'à six ans de prison et une amende d'un million d'euros pour détournement de bien national », rapporte lefigaro.fr.

Mais, sur  le territoire français, l’affaire suscite une polémique politique, du fait notamment des insinuations à peine  voilées émises par ci par là  sur les véritables motivations de Philippe de Villiers, auquel certains attribuent des ambitions politiques pour sa personne  et un marketing pour le Puy du Fou. Pour garder «ce petit bout de la France», dit-il, il est prêt à tout pour «ne pas livrer Jeanne d’Arc une deuxième fois».

Dans une chronique publiée sur le site lefigaro.fr, Alban Gérard, fondateur des Gavroches, estime qu’avec cet épisode, «un souffle mystérieux est à l'œuvre. L'histoire rêvée d'une France lointaine retrouve pour quelques heures un peu de son panache! »
Le journaliste du site du quotidien lemonde.fr,  moins emballé par cet événement jugé, dans une tribune intitulée «Comment Philipe de Villers  récupère le mythe de Jeanne d’Arc», comme une opportunité pour revenir sur l’histoire complexe de Jeanne d’Arc.  

« En effet, depuis plusieurs décennies, nombre de professionnels de la recherche historique, comme Colette Beaune, Olivier Bouzy, Philippe Contamine, Gerd Krumeich, ont donné une vision plus complexe de Jeanne d’Arc. Etait-elle une patriote?», s’interrogent-ils, avant de souligner que «le travail des historiens a abouti à la création, en 2015, avec l’aide de fonds publics, de l’Historial Jeanne d’Arc à Rouen.

Ce lieu, loin de promouvoir une vision nationaliste, s’attache au contraire à éduquer tous les publics à la complexité du personnage de Jeanne d’Arc, et aux nombreuses utilisations mémorielles et politiques dont elle a été l’objet. Un projet irréconciliable avec celui défendu par le Puy du Fou». Dans un droit de réponse exercé suite à cette tribune, de Villiers dément toutes les accusations de récupération, avant de conclure par  «ce  curieux contraste : dans les hautes sphères, on fait la moue mais devant l’anneau, on fait la queue».