Libye : Le renversement du régime de Kadhafi sans préparation est une « erreur stratégique »

Publié par DKNews le 16-09-2016, 17h01 | 52

Le renversement, sans préparation, de Mouammar Kadhafi, au cours des événements ayant plongé la Libye dans l'anarchie, fut une «erreur stratégique» des Occidentaux, a affirmé le chercheur français Thierry de Montbrial, dans une analyse.

«L’une des erreurs stratégiques de la présente décennie a été de provoquer la chute du colonel Kadhafi sans la moindre préparation pour la suite», a écrit Thierry de Montbrial, président de l’Institut français des relations internationales (IFRI), dans une longue analyse sur les perspectives mondiales, parue dans Ramses 2017, un rapport annuel mondial sur le système économique et les stratégies.

Pour cet enseignant universitaire et chercheur français en économie et relations internationales, la Libye est devenue «un carrefour opérationnel» pour la pénétration du terrorisme en Afrique et «un portail» pour les mouvements migratoires, estimant que la mise en place en 2015 d’un gouvernement d’union nationale, sous les auspices de l’Onu, est «un résultat fragile mais encourageant».

Thierry de Montbrial, qui est également membre de l'Académie des sciences morales et politiques depuis 1992, a indiqué que «si les Occidentaux ont une leçon à tirer de l’histoire du Moyen-Orient au sens large +de Afghanistan à l’Afrique du Nord+, depuis la chute de l’Union soviétique, c’est qu’on ne joue pas impunément avec les régimes d’autrui».

«Quand on est conduit à interférer avec les affaires intérieures des autres, les passions domestiques ou l’idéologie ne sont jamais bonnes conseillères», a-t-il souligné, faisant remarquer que «Paris et Londres l’avaient oublié en Libye».

Il a estimé, par ailleurs, que la sécurité de l’Afrique du Nord «est plus que jamais une question essentielle, et la condition de base pour toute coopération ambitieuse au développement de l’Afrique dans son ensemble».

Dans ce sens, il a affirmé que l’Afrique a géopolitiquement vocation comme «le continent en développement complémentaire de l’Europe», relevant que les Etats européens «n’ont jamais cherché sérieusement à s’entendre pour élaborer une politique cohérente et robuste dans ce domaine».

«Le vaste continent africain, insuffisamment organisé par lui-même, reste ouvert à toutes les convoitises d’acteurs immédiatement intéressés par l’accès à ses immenses ressources que par la participation à un effort de longue durée pour assurer sa stabilité», a-t-il soutenu, précisant que le décollage économique de l’Afrique «reste une réalité porteuses de grandes espérances».

Toutefois, a-t-il averti, à court et moyen termes, «on risque de voir se poursuivre l’implantation de mouvements issus du fondamentalisme islamiste et les actions terroristes».