Turquie: Le chef de l'opposition désavoue la reconduction de l'état d'urgence

Publié par DKNews le 30-09-2016, 17h00 | 20

Le chef de l'opposition turque, Kemal Kilicdaroglu, s'est insurgé vendredi contre la reconduction de l'état urgence instauré après le putsch avorté de juillet, accusant le pouvoir du président Recep Tayyip Erdogan de s'en servir pour "réduire au silence toute voix discordante".

"Les propos de M. Erdogan renforcent la perception que nous sommes en train d'assister à un contre-coup", a déclaré, lors d'une conférence de presse à Istanbul, Kemal Kilicdaroglu, chef du Parti républicain du peuple (CHP, social-démocrate).

En effet, M. Erdogan avait défendu jeudi la reconduction attendue de l'état d'urgence qui doit expirer le 20 octobre, laissant entendre qu'il pourrait rester en place jusqu'à douze mois.

De fait, la situation actuelle d'état d'urgence a laissé les coudées franches aux autorités pour mener de vastes purges qui selon les observateurs visent notamment à écarter les partisans présumés de l'ex-prédicateur Fethullah Gülen, accusé d'être l'instigateur du putsch du 15 juillet.

Ce qui fait réagir le leader du parti social démocrate (CHP) en s'engageant, sans illusions aucune, à s'"opposer à cet état de fait imposé par Erdogan au parlement".

"Lorsque la demande d'extension sera présentée au Parlement, nous nous y opposerons", a promis M. Kilicdaroglu, tout en reconnaissant que son parti, qui dispose de 133 députés sur un total de 550, n'avait aucune chance de tenir tête sur ce vote à la majorité de l'AKP, le parti de M. Erdogan.
"Mais nous allons défendre la démocratie jusqu'à la fin", a-t-il dit.

Le chef de l'opposition a en outre critiqué l'ampleur des purges lancées par les autorités à la suite du coup d'Etat avorté, accusant le pouvoir de mettre à profit l'état d'urgence "pour faire taire ses opposants".

"Nous sommes contre l'arrestation de journalistes et d'artistes", a-t-il dit, affirmant que "plus de cent journalistes ont été arrêtés et des milliers d'universitaires et des professeurs limogés".

Pour M. Kilicdaroglu, le pouvoir se sert aussi des purges en cours pour "régler ses comptes" avec les réseaux gülénistes accusés d'être à l'origine d'un scandale de corruption impliquant M. Erdogan qui avait éclaté en décembre 2013.

"Leur but n'est pas seulement de lutter contre le coup, c'est aussi une vengeance pour les évènements de décembre 2013", a-t-il dit.

Enfin, le chef de l'opposition a en outre critiqué la concentration des pouvoir aux mains de M. Erdogan, estimant que le système est devenu "de facto" présidentiel alors que la Turquie est censée être gouvernée par un régime parlementaire.