Algérie : Les récents «actes infanticides» sont liés à des troubles psychiques

Publié par DKNews le 14-10-2016, 16h47 | 114

Le chef de service de pédopsychiatrie à l’Hôpital psychiatrique «Drid Hocine» d'Alger a estimé jeudi à Oran que les récents crimes commis à Constantine et Tipaza par des mères contre leurs progénitures relèvent d’infanticides liés à des troubles psychiques qui surgissent durant la grossesse ou l'accouchement. Interrogé sur ces récents drames, le Pr Ould Taleb Mahmoud a qualité ces crimes d’»actes infanticides» liés à des troubles psychiques surgissant durant la grossesse ou l’accouchement et «qui n’ont pas été soignés au bon moment».

«Ce sont des pathologies qui évoluent malheureusement durant des années.
Ce sont des femmes qui ne reçoivent pas les soins psychiatriques nécessaires au bon moment donc leur santé mentale se dégrade. Elles deviennent schizophrènes, psychotiques, dépressives.

Ces femmes ont même des complications avec des tentatives de suicide, individuelle ou à plusieurs», a ajouté ce spécialiste à l'APS, en marge du 2ème congrès international de Psychiatrie universitaire.
Pour ce spécialiste, la seule prévention possible des complications des troubles psychiques réside dans l’accès aux soins.

«Chaque femme ayant des difficultés psychologiques doit avoir un accès aux soins, c'est à dire une bonne prise en charge de sa santé mentale le plus rapidement possible», a-t-il précisé, d'où l'importance de «multiplier les hôpitaux psychiatriques, les consultations spécialisées. La santé mentale doit devenir une priorité», a-t-il estimé.

Selon le Pr Ratiba Azzedine, chef de service des Urgences psychiatriques au CHU d'Oran, les troubles mentaux sont une maladie comme une autre, nécessitant inéluctablement un traitement et une prise en charge adéquate.

Pour elle, «c'est dans un contexte délirant et hallucinatoire que ces femmes sont passées à l'acte et ont mis fin aux jours de leurs progénitures, elles étaient déjà malades mais leurs proches ne se rendaient pas compte de la gravité de leur état mental».

La spécialiste a précisé qu'en l'absence de traitement et de prise en charge, les conséquences peuvent être désastreuses, comme c’était le cas à Constantine et Hadjout dans la wilaya de Tipaza, d'où la nécessité de consulter un psychiatre.

«La consultation en psychiatrie reste hélas un tabou surtout si elle concerne des femmes», a-t-elle rappelé.

De son côté, le Pr Mohand Tayeb Benatmane, chef de service de psychiatrie au CHU Mustapha-Pacha, a indiqué que lorsqu'une femme est exposée à plusieurs problèmes en même temps d'ordre socio-économique mais aussi familial et affectif, elle peut commettre des crimes odieux comme ceux de Constantine et Tipaza.

«Nous appelons cette situation de suicide altruiste car, la femme décide de mettre fin à ses jours en emportant avec elle ses enfants», a-t-il précisé. Le congrès, organisé sous le thème «les conduites addictives», a vu la participation de spécialistes algériens et étrangers, venus de France, du Maroc et de Tunisie. Il a abordé plusieurs sujets comme «l’addiction et la santé mentale», «la schizophrénie et les conduite addictives» et «les conduites addictives sans drogues».

A ce titre, le Directeur général du CHU d'Oran, Benali Bouhadjar, a souligné à l'APS que la toxicomanie prend des proportions alarmantes à Oran, relevant, toutefois, qu’un grand  travail est en train de se faire par les services concernés aussi bien sanitaires que sécuritaires pour endiguer ce phénomène.

Si ce problème impliquait, dans le passé, des catégories souffrant de problèmes socio-économiques et de chômage, aujourd’hui, il touche des jeunes issus de familles riches et aisées.

«Nous accueillons dans notre service des Urgences psychiatriques de plus en plus de jeunes d'un niveau culturel appréciable, des gens ayant tous les moyens mais qui s'adonnent aux drogues», a-t-il relevé, soulignant l’importance d'étudier ce phénomène de plus en plus croissant à Oran.

Le 2ème congrès international de Psychiatrie universitaire est organisé par le service des urgences psychiatriques du CHU d'Oran, en collaboration avec l'Association algérienne d'addictologie et d'autres établissements sanitaires du pays.