Epilogue de l’affaire Tapie en France : Ce qui suscite l’incompréhension

Publié par Cherbal E-M le 24-12-2016, 19h09 | 76

Après de longues années d’enquête et de bataille judiciaire, l’affaire Tapie a connu son
épilogue, ce 19 décembre, par une condamnation pour «négligence coupable», sans peine à l’encontre de l’ancienne ministre des finances, Christine Lagarde, actuellement directrice générale du Fond Monétaire International, à Washington.

Le verdict de la Cour de Justice de la République (CJR) n’est pas passé sans commentaire, notamment de la classe politique et a été contesté par une pétition populaire qui a recueilli près de 137000 signatures en quelques jours, pour demander « un vrai procès pour Christine Lagarde ».

L’ancienne ministre des finances sous Sarkozy est poursuivie pour avoir été l’organisatrice, en 2007, d’une opération d‘arbitrage privé comme issue au conflit qui opposait Bernard Tapie à l’Etat français.

« Il s’agissait de solder un conflit vieux de quinze ans, remontant à la vente contestée d’Adidas, propriété de Bernard Tapie, par le Crédit lyonnais », explique lemonde.fr au sujet de ce différend qui s’est soldé en 2008 par l’octroi au couple Tapie d’une indemnisation de 404 millions d’euros, dont 45 millions accordés pour «préjudice moral».

Les soupçons se sont braqués sur la ministre pour, surtout, n’avoir pas fait appel de ce verdict.
A partir de là, les supputations sont allées bon train sur le rôle exact de Madame Lagarde dans ce feuilleton dont beaucoup disent qu’il a été orchestré depuis l’Elysée, et particulièrement par son secrétaire général, un certain Claude Guéant.

L’accusée a clamé n’avoir  «reçu aucune instruction politique » dans la conduite de cette affaire, devant les trois juges et douze parlementaires composant la CJR.

Il est clair que l’affaire a été conduite en bonne coordination avec le pouvoir politique de l’époque, ce qui fait dire à certains observateurs, comme le souligne le site lemonde.fr, qu’il est difficile d’imaginer que « l’arbitrage en faveur de Tapie ait été décidé sans l’aval de l’ancien président de la République ».

Pour autant le verdict a aussi surpris par le peu d’empressement de la CJR à décréter une condamnation contre Madame Lagarde, qui, au, passage, n’a même pas daigné se présenter pour entendre le verdict, préférant rejoindre son bureau au FMI, où une confiance totale lui a été témoignée pour la continuité de ses fonctions.

Les considérations avancées par la cour pour dédouaner l’ancienne ministre des finances de toute peine ont également de quoi soulever de nombreuses critiques.

Pour avoir la clémence de la CJR, la directrice générale du FMI a avancé la crise financière mondiale de 2008, qu’elle du affronter en tant que ministre, l’éloignant souvent de son bureau, comme pour justifier sa négligence.

Elle s’est également prévalue de sa « personnalité et sa réputation nationale et internationale », pour obtenir la dispense de peine, alors que pour le journaliste du site lemonde.fr, « s'il y avait procès, c'est que cette personnalité et cette réputation étaient justement à réévaluer ».

En réaction à cette issue, un collectif citoyen a lancé une pétition adressée aux présidents de la République, du sénat, de l’assemblée nationale, de la cour de cassation ainsi que de la CJR, qui a obtenu 137000 signatures en trois jours.

Les signataires estiment que « l'ancienne ministre de l'Economie doit répondre de ses actes devant un tribunal correctionnel ordinaire et en assumer les conséquences.

» Les sentences de la justice « selon que vous serez puissant ou misérable », en référence à la fameuse fable de La Fontaine, sont devenues d’actualité à la faveur de ce procès qui a fait bouger la classe politique.

François Bayrou ne s’est pas gêné pour rappeler cette fable et dire sa conviction que les « responsables sont évidemment au sein de l'État, pour les uns dispensés de peine, pour d'autres protégés par des immunités », s’offrant ainsi une occasion, encire une autre, d’égratigner son meilleur ennemi, Sarkozy, note lemonde.fr.

De son côté, Manuel Valls s’est également prononcé pour notamment demander la suppression de la CJR ; "On ne peut plus continuer avec ce type d'institution qui donne le sentiment, à tort ou à raison, de protéger ceux qui gouvernent", déclare-t-il rejoignant beaucoup de voix à gauche, à l’instar d’Arnaud Montebourg et même François Hollande convaincu de son anachronisme.