Le débat, pour ne pas dire la polémique se poursuit en cette période de rentrée scolaire, depuis que la possibilité a été officiellement donnée à l’école française d’utiliser les services de Google, Apple, Facebook Amazon et Microsoft (GAFAM).
Par un mail du directeur du numérique du ministère de l’éducation nationale, Mathieu Jeandron, adressé en mai dernier aux délégués académiques, il leur indiqué qu’il n’y a «pas de réserve générale» à ce qu’ils recourent aux services de ces géants américains, plus «de blocage, donc, à ce que toutes sortes de données personnelles et scolaires leur soient confiées», écrit le site lemonde.fr.
De nombreuses associations activant dans le domaine de l’éducation ou en rapport avec le monde éducatif, ainsi d’ailleurs que des experts, et même la très officielle Commission Nationale Informatique et Liberté (CNIL) ont immédiatement réagi pour crier au «loup dans la bergerie» et demander des mesures de protection et de garantie des usages qui pourraient être faits des données personnelles, notamment.
Jugeant ce genre d’information «très sensible», la CNIL a émis le vœu de voir mis en place un cadre réglementaire contraignant.
La presse française n’est pas restée loin de ce débat et a ouvert ses espaces aux nombreux experts et observateurs venus disserter sur les tenants et aboutissants de la politique numérique de l’éducation nationale en France.
Sur la question de la protection des données personnelles, il y a évidemment un consensus pour que le cadre réglementaire imposé aux éditeurs français soit également opposable aux géants américains, réputés ne pas s’encombrer de ce genre de considération.
Auteur d’un livre sur les dessous de la stratégie numérique des grandes multinationales américaines, intitulé «La nouvelle servitude volontaire : Enquête sur le projet politique de la Silicon Valley», paru en 2016, Philippe Vion-Dury, journaliste, a fait part sur le site http://rmc.bfmtv.com de ses craintes de voir s’instaurer un système de fichage systématique des élèves ; «Les consignes du ministère ouvrent clairement la porte aux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft) et incitent les professionnels de l'éducation à utiliser leurs logiciels, peut-on lire sur ce site qui ajoute que, «de là, ce sont toutes les données relatives à l'utilisation du service par les élèves et les étudiants qui sont collectées par eux, mais aussi des données personnelles tel que l'identité, l'âge, le lieu de l'établissement...».
Des représentants de syndicats des corps de l’enseignement ont également pointé le manque de définition d’un cadre et d’outils à même d’accompagner cette liberté d’utilisation des services des grandes multinationales américaines du numérique.
Sur le site www.la-croix.com, qui consacre un article au sujet en date du 27 août dernier, Jean-François Clair, responsable des questions numériques au Syndicat national des enseignements de second degré (Snes), s’inquiète de voir, qu’en application des nouvelles instructions du ministère de l’éducation, «mes collègues ont pris ce qu’ils trouvaient, comme Facebook pour faire un blog avec les élèves, ou leur compte Gmail.
Et tout cela sans avoir conscience que les données qu’ils transmettent pourraient être utilisées», déclare-t-il.
Ce site a également donné la parole à un chercheur en informatique, expert en questions liées à la protection de la vie privée et des données personnelles, selon lequel, «les appréciations des enseignants ont une valeur marchande immense, notamment auprès des chasseurs de têtes ou des employeurs. L’éducation nationale a ainsi accès à une mine d’or et la gère avec une certaine désinvolture, puisqu’elle est prête à la donner à n’importe qui».
Le débat n’a pas manqué de déborder sur la politique numérique de l’éducation nationale en France, et notamment sur les grandes promesses lancées par l’ex président François Hollande, à travers son fameux «plan numérique» et l’engagement de doter tous les écoliers de tablettes.
Commentant la première conférence de presse du ministre de l’éducation du gouvernement Macron, le site www.nextinpact.com a constaté que «Jean-Michel Blanquer, n’a évoqué à aucun moment le sujet. Pas un mot non plus au fil des 73 pages du dossier dévoilé dans la foulée par l’exécutif...».
Cherbal E-M