Histoire

L’Emir Abdelkader dans la légende

Publié par Par Amar Belkhodja le 20-06-2015, 17h40 | 1651
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Pour mieux comprendre les véritables desseins de la France, il est utile d’évoquer l’effort financier qu’elle a mis dans l’expédition contre l’Algérie. L’ampleur de l’arsenal et des moyens humains déployés le 14 juin 1830 démontre de l’ancienneté du projet dont les plans topographiques localisant les objectifs remontent à 1808 déjà.

Abdelkader : l’âme de la résistance algérienne
        Les batailles, du moins les plus célèbres, se distinguent par des scènes de bravoure qui démontrent du sentiment élevé du patriotisme et de l’esprit de sacrifice des combattants algériens et de leur chef Abdelkader qui dira : « Nous n’avons d’appui que nos armes et nos chevaux. Le sifflement des armes a plus de prix que l’eau fraîche pour celui que la soif dévore et le hennissement des chevaux nous séduit plus que le charme d’une voix harmonieuse.

   Pendant toute la résistance, l’Emir Abdelkader s’abstient de toute violence inutile, de toute cruauté. Il s’efforça de donner à la lutte un visage humain en se montrant toujours bon et généreux envers ses ennemis. Il est le premier dans l’histoire militaire universelle à penser au sort des prisonniers, en leur assurant les meilleurs traitements et en proposant leur échange contre des captifs algériens.

  A l’image de leur chef, les combattants algériens sont braves et prêts au sacrifice. Les chroniqueurs relatent : « Un des porte drapeau d’Abdelkader, poursuivi par le sous-lieutenant Savarez et sur le point d’être atteint par lui, se précipita dans le lit de la Tafna, dont les bords sont à pic et très élevés. Il périt dans la chute, mais il sauva son drapeau qui fut ramassé par un autre arabe, descendu dans le lit de la rivière par un endroit plus facile » (Janvier 1836, bataille de Sidi Yaqoub).

 Dans un autre récit on lira : »L’étendard des arabes passa trois fois en des mains différentes. Ceux qui le portaient ayant été successivement tués. Le dernier le fut par le fourrier  Bourdillon du 2ème régiment de chasseurs, qui fut lui-même tué au moment où il venait de s’emparer de l’étendard, lequel resta définitivement aux arabes ». (Accrochages dans la région de Mascara, octobre 1841).
        Toutefois dans cette guerre où il y avait un agresseur et un résistant, les forces étaient inégales. Au fait de sa puissance, l’Emir Abdelkader n’a jamais mobilisé plus de 15 000 hommes entre volontaires et réguliers, tandis que l’armée française d’invasion avait dépassé un effectif de plus de 100.000  avec l’avènement du général Bugeaud, impatient d’écraser la résistance algérienne.

Face à un  ennemi supérieur en hommes et en matériel de guerre, l’Emir Abdelkader adopte la stratégie de la guérilla dont s’inspireront plus tard tous les leaders des mouvements de libération nationale du XXe siècle : Mohamed ben Abdelkrim El Khettabi, Ho Chi Minh, Mao-Tsé-Toung, Che Guevara, et bien sûr les chefs de l’ALN en 1954.

  L’avantage de cette stratégie, c’est la mobilité des unités régulières qui harcèlent sans cesse les troupes ennemies et l’adhésion des masses qui constituent le réservoir de la résistance nationale. Le duc d’Orléans dira à ce sujet : « Le partisans faisant plus de mal aux français que tout le reste des forces ennemies et empêchaient l’armée de dormir en la tenant sur un qui-vive perpétuel ».

  Pour venger l’affront du Mactaâ, le général Clauzel décide de prendre Mascara. La ville est investie, brûlée et abandonnée par les Français puis réoccupée par l’Emir Abdelkader. C’est toujours Clauzel qui prend Tlemcen vite réoccupée par l'’mir Abdelkader qui garde l'initiative en s'installant à Médéa et Miliana. Il met en péril le général d'Arlanges en janvier 1836 près de Sidi Yaqoub dans la Tafna (Aïn Témouchent). La bataille de la Sikkak (Tlemcen) est livrée aux français en juillet 1836.

   Bugeaud arrive à la rescousse. Ce général, maréchal puis Gouverneur général de 1840 à 1847, va devenir le principal acteur dans la conduite de la conquête. Il est refoulé en 1837 par Abdelkader. Ce nouveau commandant de l’armée d’invasion, conscient de la puissance de l’Emir Abdelkader, résolut de négocier une trêve. Le traité de la Tafna est signé le 30 mai 1837.

   Il s’agit là d’une deuxième victoire diplomatique de l’Emir Abdelkader. Les Français avouent eux-mêmes que « Le traité de la Tafna est encore plus désastreux que le traité Desmichels ». Le nouveau traité reconnaît à l’Emir Abdelkader la souveraineté sur les deux tiers du territoire nationale. La France ne se réservait que la banlieue d’Alger et d’Oran et le constantinois. Le traité contenait des clauses secrètes qui vont confondre Bugeaud dans le procès scandaleux de  Perpignan.

 Le traité de la Tafna est violé par les Français. Les hostilités reprennent en 1839. Paris dépêche de nouveaux renforts. Les effectifs, comme nous l’avons vu plus haut, vont passer à plus de 100.000 hommes. Le commandement est appuyé par les propres fils du roi qui se relaient pour tenter de vaincre Abdelkader.      

        Face à cette puissante armée, l’Emir Abdelkader fait de la guérilla sa principale stratégie de combat. Habile stratège, l’Emir est insaisissable. Il est présent à tous les combats (durant les 17 années de résistance, Abdelkader ne fut jamais blessé mais il perdit plusieurs chevaux sous lui). Il harcèle les troupes françaises, détruit les arrières gardes, capture les postes isolés et cause d’importante pertes à l’ennemi.

  Pour affaiblir la résistance des Algériens, Bugeaud lance contre le pays la politique de la terre brûlée. En réalité c’est un véritable génocide qui est imposé au peuple algérien.
        L’année 1841 sera fatale à l’Emir Abdelkader. Ses places fortes, Taza, Boghar, Tagdempt, Saïda, Mascara sont détruites les unes après les autres. Cependant il ne donne jamais la chance aux Français de lui prendre ses villes intactes. Il les évacuera de leur matériel et les leur abandonnera à moitié brûlées.

 Ce n’est pas pour autant que l’ardeur dans la lutte va s’atténuer. L’un des plus braves lieutenants de l’Emir Abdekader, Mohamed Ben Allal, périt à l’âge de 29 ans au combat de Sidi Yaqoub en 1843. En 1845, le colonel Montagnac, l’un des plus grands criminels de guerre, est mis en échec dans la célèbre bataille de Sidi Brahim, près de Ghazaouet (Nemours).

Le grand massacreur d’Algériens et ses 400 hommes périssent dans ce combat. Il n’y eut que 12 rescapés. Quelques jours auparavant, c’est le valeureux Bouhamidi, khalifat de Tlemcen, qui inflige une défaite à un détachement français composé de 200 hommes près de Aïn Témouchent.

  Dans le camp français, c’est le désarroi. Bugeaud qui se trouvait momentanément en France, revient en toute hâte avec de nouveaux renforts. Il met sur pied 18 colonnes qui vont poursuivre Abdelkader avec acharnement.
A suivre

 

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