Histoire

Un criminel nommé Achiary

Publié par Par Amar Belkhodja (*) le 13-06-2014, 16h54 | 63
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« Dans l’enfer de Guelma, l’épouvante amplifie. Au nom de la République, à l’ombre de la bannière tricolore, la terreur s’instaura. Les exécutions collectives commencèrent au rythme rapide des mitrailleuses en action. Le sang musulman, un sang généreux, versé à flots pour l’honneur de la France et l’affranchissement de l’humanité, continua à couler pour le plus grand profit du plus grand reich colonialiste ». (Abdelkader Safir - Egalité du 29 septembre 1947).

Néanmoins, au coueur de cette horde d’assassins et de pillards, quelques bonnes âmes quittent les rangs, indignés et révoltés par la furie des miliciens et leurs agissements inacceptables. C’est justement, même s’ils n’étaient pas n ombreux, pourquoi il faut leur rendre hommage, pour leurs potions courageuses alors que la situation était fort délicate et les circonstances peu favorables à des oppositions de cette nature. « Les quelques honorables exceptions qui ont sauvé l’honneur français en s’élevant contre ces tueries sans utilité ont dû s’incliner sous la menace et s’enfermer chez elles. L’iniquité a régné ainsi en maîtresse pendant les jours sombres qui ont Sali à jamais ceux qui participèrent à cet horrible carnage ». (M.Reggui - p.47).
Cependant, un autre français, investi de responsabilités administratives, avait osé tenir tête aux bandes de miliciens décidées à anéantir les arabes : »L’administrateur de la commune mixte de Sédrata eut une attitude héroïque. Aux miliciens de Guelma venus pour arrêter les notabilités musulmanes de la commune, il répondit catégoriquement : « Dans ma commune, je suis libre. Je vous prie en conséquence de quitte rimmédiatement Sédrata ». (M.Reggui - p.119).

Les tueurs reviendront une deuxième fois menaçant le fonctionnaire de leur livrer « sa part » d’être humains destinés à l’immolation. A nouveau il opposa un non catégorique, cette fois en saisissant le préfet de Constantine en lui faisant part qu’il n’avaitn aucune raison de « livrer des otages » » à la milice en lui précisant que sa commune « faisant partie de l’arrondissement de Constantine et que  i lez sous-préfet de Guelma ni les miliciens n’étaient habilités à y faire la police et encore moins à y trouvbler l’ordre public ». (Jean-Pierre Peyroulou  - p.181).
       
Le peuple algérien ne demandait pas du pain. Il réclamait des armes

Les émeutes de Sétif, Kherrata et Guelma ont démontré que le peuple algérien était capable d’entrer en insurrection, s’il avait été organisé et armé. Les troubles furent induits par des circonstances très particulières tant à Sétif qu’à Guelma, notamment par le comportement des autorités française locales décidéées coûte que coûte à faire disperser les défilés organisés âr les algériens qui avaient, pour leur part, désiré commémorer la fête de la victoire sur la nazisme à leur manière.

     La mort d’hommes - les portes-drapeaux - déclencha les affrontements. La riposte des algériens, dans une légitime défense, s’est faite dans l’improvisation et le désordre. Point de chefs, point d’organisation, point d’armes, les émeutes n’avaient aucune chance de se transformer en une véritable insurrection et conquérir davanta de temps et d’espace.

     Les cadres centraux et locaux du PPA clandestin sont pris au dépourvu, surpris par l’ampleur du mouvement constaté durant les trois ou quatre premiers jours. Les forces politiques furent carrément dépassées par les événements à tel point que les responsables du PPA avaient carrément envisagé de généraliser le « soulèvement ». L’ampleur du massacre leur fera changé d’avis.

Désordre chez les insurgés ; désordre, incohérences, ordre et contre ordre chez les responsables du PPA. La situation confuse et incontrôlable va encourager les forces colonialistes à déclencher l’une des plus violentes et des plus meurtirèes répression pour « mater la révolte arabe » qui n’avait d’ailleurs duré que trois ou quatre jours. Mais cela n’a pas empêché la répression de se poursuivre, cette fois ci, contre des populations qui, dans leur majorité, n’avaient pas été impliquées dans les émeutes.

     Les pieds - noirs de Sétif tiennent Ferhat Abbas pour responsable. Sa pharmacie est saccagée. Le leader des AML, mis aucourant dans sa cellule du drame qui se déroulait dans l’est algérien, accusa à son tour les éléments du PPA d’être à l’origine des troubles. Le PCA et les Oulams épousent, à des nuances près, les mêmes positions. Certains cadres du PPA-MTLD accusent à leur tour Ferhat Abbas :

« A Guelma, Boudjerida, militant responsable du MTLD, accuse publiquement Ferhat Abbas d’être responsable des événements du 8 mai 1945 et le traite d’assassin. Boudjerida est un lâche provocateur, lècheur de bottes de Lestrade-Carconnel et d’Achiary et qui déshonore son pays et son parti. (Egalité du 21 novembre 1947).

     Finalement, chaque partie se sentait menacée ou victime d’un « complot ». Côté administration française et Européens, il faut se préparer déjouer un « complot » dont les auteurs seraient les nationalistes algériens et d’autres acteurs étrangers qui visaient la souveraineté française pour ébranler l’empire colonial. C’est dire que l’atmosphère était chargée de toutes les suspicions. Chacun criait sus au complot. 
     Mais en toute logique personne n’était capable de prévoir l’allure qu’allait prendre tel ou tel événement ni de prédire les événements eux-mêmes sauf quand ils surviennent, les tenants du pouvoir, ont la latitude d’user de manipulations pour les amplifier ou les orienter.

     Ce qu’il faut retenir, c’est avouer que le camp français est manifestement connu pourses prédispositions à utiliser la force, en puisant dans les prétextes pour justifier la répression. Alors comme nous l’avions signalé, la phobie du danger arabe entrenue par les Achiary et ses semblables ne pouvait pas ne pas créer le sentiment d’insécurité qui sécrète lui-même la panique chez la communauté Européenne. Cependant, sur le terrain la situation est tout autre. Rien ne pouvait provoquer la peur et la panique.

Quelle crainte pouvait-elle susciter une femme et ses enfants, un vieillard terrassé par le typhus ou encore des paysans sans défense fuyantv une répression snasw limite et qui, dans leur majorité, n’étaient guère impliqués dans les premières émeutes ni commis ultérieurement des actes d’hostilité.      Puis on a tant palabré sur la thèse du complot colonial pour conclure sur le piège de la provocation tendu aux algériens et aux éléments irréfléchis du PPA. Thèse qui va en quelque sorte culpabiliser le parti de Messali Hadj. La couleuvre est de taille puisqu’elle a tout l’air de justifier la taille de la répression.

Le scénario nous propose les images suivantes : le colonisateur provoque. L’algérien à son tour réagit à la provocation. Il devient fautif puisqu’il va donner l’occasion au colonisateur d’utiliser les armes contre lui. En fin de parcours, c’est le provocateur qui prend la place du provoqué. C’est trop simpliste. Le PPA avait bon dos. Alors on l’oblilge à porter la croix. Les rôles sont inversés et on l’accuse d’avoir conduit le peuple à la boucherie.

     Autrement dit l’accusateur devient le coupable et par voie de conséquence la démonstration conforte le colonisateur dans toutes les légitimités. Il a réagit contre les fauteurs de troubles, quoi de plus normal. Les querelles persistent jusua’à la veille de l’insurrection de novembre 1954 ; à tel point que dans le mouvemnet national, tous courant confondus, y compris dans les rangs du PPA-MTLD, l’on affichera des hésitations avant l’engagement aux côtés du FLN.

Les plaies et le drame du 8 mai 1945 sont encore vivaces dans les mémoires et  on craignait que le peuple algérien pouvait connaître une nouvelle aventure sanglante.
     La polémique qui survient au lendemain des massacres de mai-juin 1945 et qui ooposera le PPA à ses adversaires politiques, engendrera des abcès de fixation avec cette tendance d’oublier carrément l’auteur principal des malheurs qu’avait subi le peuple algérien. Il aurait suffit d’aller frapper à la porte de l’Histoire pour lui demander quelques renseignements et voir un peu plus clair dans la situation du présent.

     Généreuse pour ceux qui savnet la convaincre, l’Histoire détient les points essentiels sur l’ensemble des acteurs, sur les sytèmes et les hommes qui les représentent. Alors, sur les tablettes, les livres et les manuscrits, nous découvrons sans prendre une loupe, une caractéristique principale du colonialisme français : c’est sa prédispostion au crime collec tif. Toute l’histoire de la colonisation est rélélatrice d’un cortège d’assassinats collectifs et de répressions sanglantes. Des tribus entières, souvent sans armes, furent systématiquement rayées de la carte.

     Les massacres de mai-juin 1945 entrent dans cette logique. Le crime collectif est désormais inscrit dans la nature des choses, dans la nature du régime. Il a persisté depuis les premières années de la conquête jusqu’au sursaut final de novembre 1954. Les théoriciens du colonialisme ont décrété tous les crimes comme étant licites.

Alors à quioi bon s’attarder à rechercher les causes qui ont conduit aux massacresd comme si nous étions obligés à accorder des circonstandces atténuantes aux tueurs de 1945, précédés eux-mêmes par les tuerus de 1830 et suivis par ceux de la guerre d’Algérie (1954-62).
     C’est en termes de légitimité d’illégitimité que nous devons aborder la question. Violence barbare et illégitime chez l’agresseur de 1830 et violence légitime chez l’agressé même si celle-ci est révélatrice d’atrocités qu’on est en droit de mettre sur le compte d’une humiliation aux mille et une facettes et trop longtemps accumulées.

     Le PPA, lui aussi partira en guerre contre l’administration française en lui jetant à la face la thèse du complot parce que la veille, les rumeurs dans les milieux colonialistes propageaient l’idée qu’un grand parti ‘les AML) allait disparaître. A ce niveau aussi il est utile de souscrire à quelques interrogations à savoir par quel hasard ce « complot » ne se limitera qu’aux manifestations de Sétif et Guelma ? Les circonstances ont voulu tout simplement que l’on s’acharna dans ces deux villes à neutraliser les défilés algériens et les priver aussi et surtout de leurs portes-drapeaux.

      Un élément concret nous écarte de la thèse du « complot ». Il figure dans le rapport (partiel) de la commission Tubert : « Enfin, il importe de préciser si les ordres de n e tolétrer aucun cortège avec banderoles séditieuses étaient d’initiatives du sous-préfet ou d’une autorité supérieure, car, d’après les renseignements non contôlés, d’autres manifestations se sont déroulées en Algérie ce jour-èlà, et notamment à Sidi-Bel-Abbès avec des pancartes portant les mêmes inscriptions qu’à Sétif sans causer d’incidents sanglants, la police étant demeurée passive ». (Rapport Tubert cité par M.Reggui -p.148)
 

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