Santé

Médicaments : 8 questions qu'on se pose

Publié par DK NEWS le 14-03-2023, 14h42 | 4
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Régulièrement, des médicaments sont retirés de la vente en raison d'effets secondaires importants. Et des affaires comme celle du Médiator l'an dernier renforcent notre méfiance. Les médicaments sont-ils suffisamment évalués et surveillés ? Réponses des experts.  

Comment sont évalués les médicaments avant leur commercialisation?

Pour vendre un médicament, le laboratoire doit obtenir une autorisation de mise sur le marché (AMM) délivrée par l'Afssaps (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé) pour le territoire national. Dans ce but, il présente des essais qui attestent de son efficacité.

La Commission d'autorisation de mise sur le marché accorde son feu vert si ses experts estiment que le rapport bénéfice/risque est favorable, autrement dit si la molécule présente des avantages supérieurs à ses inconvénients. Si tout produit actif est susceptible d'entraîner des effets indésirables, on en acceptera davantage pour un médicament traitant une maladie grave que pour celui qui soigne le rhume ou l'acné.

 

Les laboratoires trichent-ils?

Il a été clairement mis en évidence que le laboratoire Servier connaissait les dangers du Médiator et avait dissimulé le fait que son produit était un anorexigène : une substance proche des amphétamines que les pharmaciens n'avaient plus le droit d'utiliser dans leurs préparations depuis 1995, et qui avait été interdite en 1997 dans un autre coupe-faim très proche du même laboratoire, l'Isoméride.

Le Pr Philippe Even (auteur de La recherche biomédicale en danger) affirme qu'au cours des 7 années qu'il a passées à la commission chargée d'autoriser les médicaments (de 1981 à 1988) il a découvert que l'industrie pharmaceutique dissimule parfois les résultats des essais lorsqu'ils s'avèrent négatifs. L'Afssaps tempère ce constat : "Les laboratoires ont moins la possibilité de tricher aujourd'hui et nous ne sommes pas totalement démunis. Mais si on peut faire que la porte soit solide pour dissuader, aucun système n'est inviolable pour celui qui veut tromper."

Et il n'y a pas de fonds publics pour effectuer d'autres études que celles financées par les laboratoires.

 

Peut-on faire confiance au choix des médecins?

Les médecins français prescrivent énormément : 90% de leurs consultations se concluent par une ordonnance contre 72% en Allemagne et 43% aux Pays-Bas. Et cette ordonnance comporte en moyenne de 3 à 5 médicaments. "Ils ont l'habitude de proposer un médicament par symptôme, explique le Pr Jean-François Bergmann, ce qui augmente les interactions et les effets indésirables." Pris entre le patient (souvent demandeur) et l'industrie pharmaceutique qui pousse à la consommation, les médecins n'arrivent pas toujours à bien hiérarchiser. Ils ont cependant des circonstances atténuantes. «Les AMM sont accordées beaucoup trop facilement et il y a trop de médicaments, dénonce le Pr Autret-Leca. Pour le médecin, le tri est difficile. Beaucoup ignorent qu’un nouveau médicament n’est pas forcément meilleur que les plus anciens. Et, tout comme leurs patients, ils ont tendance à penser que les récents sont mieux, d’autant que c’est ce que leur font croire les visiteurs médicaux des laboratoires. »

 

Les médecins peuvent-ils prescrire hors AMM ?

« Légalement, un médecin a le droit de prescrire hors des indications d’autorisation de mise sur le marché s’il pense que cela peut être utile à son patient, explique le Pr Bergmann, mais la Sécu ne rembourse que dans le cadre de l’AMM. »

Une limite cependant : en cas de problème, le médecin doit être capable de justifier son choix. L’Assurance maladie a par ailleurs mis en place des systèmes de contrôle des prescriptions des médecins. Si elle constate que l’un d’entre eux prescrit beaucoup plus que les autres tels ou tel médicament, elle va lui demander des comptes.

 

Est-il normal qu’un médicament puisse se révéler dangereux ?

Il est inévitable que des effets indésirables se manifestent après la commercialisation. Les essais ont été menés sur quelques milliers de personnes, mais le traitement sera ensuite absorbé par des millions. Si un médicament a été testé chez 3 000 malades et qu’un risque très grave n’apparaît que dans un cas sur 10 000, il sera passé inaperçu.

Par ailleurs, les patients sont soigneusement sélectionnés lors des essais : le laboratoire choisit, évidemment, des personnes atteintes de la pathologie que la molécule vise à soigner, mais qui ne souffrent pas d’autres maladies et sont, le plus souvent, assez jeunes. Le problème est qu’ensuite, la molécule sera consommée par des patients très divers, parfois fragiles, souffrant de plusieurs pathologies, prenant plusieurs médicaments et pas toujours dans les conditions recommandées. Voilà pourquoi on découvre parfois des années plus tard des effets indésirables qui viennent rallonger les contre-indications figurant sur la notice ou conduisent au retrait du produit.

 

Que se passe-t-il si on a des doutes sur un médicament ?

 « Si l’on identifie des risques potentiels ou avérés, nous lançons une procédure de suivi renforcé, explique Fabienne Bartoli. L’Afssaps alerte les centres de pharmacovigilance pour qu’ils encouragent les médecins à surveiller particulièrement ces points, tout en confiant à un comité régional le soin de mener une enquête approfondie. »

En cas d’alerte, sur la tolérance d’un médicament, la Commission nationale de pharmacovigilance peut conseiller diverses mesures, allant jusqu’à sa suspension. Mais la décision finale revient au directeur général de l’Afssaps. Et lorsqu’un médicament a obtenu une AMM européenne, son ­retrait ne peut se faire qu’au niveau de l’Europe. « En cas d’alerte particulière sur notre sol, on peut faire un rappel des lots et déclencher une procédure au niveau européen », précise Fabienne Bartoli. Mais les laboratoires se défendent.

 

Les médicaments anciens sont-ils aussi ré-évalués ?

Le bénéfice/risque est ré-évalué cinq ans après sa mise sur le marché, mais plus après, sauf si un problème de tolérance apparaît. « Nous avons tendance à penser que, si un vieux médicament était dangereux, on s’en serait rendu compte plus tôt », reconnaît Fabienne Bartoli. Mais certains effets indésirables peuvent se constituer lentement et mettre longtemps à se révéler.

Et, plus le problème survient tard, plus on a du mal à penser à une relation avec le médicament et à la démontrer. « De plus, l’obligation de procédures correctes d’évaluation n’est apparue que dans les années 1980 », rappelle le Pr Bergmann. C’est ainsi que le Mediator® a été commercialisé durant 33 ans.

 

Quel est le parcours-type d'un médicament?

Il s’écoule 7 à 12 ans entre les premières études sur un médicament et le moment où il arrive dans nos estomacs ou dans nos veines. Mais sur cent molécules soumises à un premier essai chez l’homme, sept seulement aboutiront dans les pharmacies.

- En laboratoire, on teste la nouvelle molécule sur des cellules, pour évaluer son efficacité et son potentiel toxique. Puis on la teste sur l’animal pour confirmer son action et s’assurer qu’elle n’est pas dangereuse.

- À l’hôpital, on teste le médicament sur un petit nombre de volontaires sains (phase I). Puis on teste son action sur un petit échantillon de malades (phase II), à la recherche de la posologie idéale. Enfin, on élargit l’échantillon (phase III) pour vérifier la tolérance du médicament.

- À l’Afssaps ou à l’Agence européenne du médicament, les experts étudient la demande d’autorisation de mise sur le marché (AMM) déposée par le laboratoire.

- La Commission de transparence évalue le Service médical rendu. Puis le prix et le taux de remboursement sont fixés au ministère de la Santé.

- Dans la " vraie vie", le médicament est surveillé en permanence (phase IV).

 

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