Histoire

Aïssat idir1915 - 1959 - La conscience du syndicalisme algérien

Publié par Par Amar Belkhodja (*) le 17-03-2015, 17h02 | 48
|

Aïssat Idir est mort comme il a vécu, au service des déshérités, des gueux, des miséreux. Il est mort au service de sa patrie. Il est mort pour que vive l’Algérie libre, indépendante, démocratique et sociale.

(L’Ouvrier algérien - Numéro spécial, août 1959).Le parti communiste français a d’ailleurs soutenu Abdelkrim El Khettabi, chef de l’insurrection rifaine, avec un engagement sans réserve et avec une action très dynamique sur le terrain ; tout est à l’honneur des dirigeants et des militants de base de ce courant qui dénonçaient le colonialisme et s’opposaient avec détermination à la domination des peuples par la puissance militaire et capitaliste. 

Des Algériens comme Aziz Menouar ou Mahmoud Benlek’hal, étaient mêlés à ces premiers combats anticolonialiste du début du XXe siècle. C’étaient les beaux moments, certainement les meilleurs moments dans la vie politique du Parti communiste français.

En Algérie, à cette époque marquée par un mouvement des idées de liberté, d’émancipation des peuples et de solidarité entre eux, un mouvement qui éclos avec passion et enthousiasme dans le Paris des communards, en Algérie, par contre, le mouvement syndical donne l’impression d’être dormant et apathique.

Le colonialisme, plus féroce que jamais, sévit toujours et tient en captivité les Algériens en les étouffant dans les oppressantes dispositions du Code de l’Indigénat. Il suffit d’élever le ton, dire un mot malveillant contre le caïd ou l’administrateur de la commune mixte, pour qu’on vous jette en prison par simple décision administrative, sans jugement ni assistance judiciaire.

Le courant assimilationniste, prônée par le docteur Mohamed-Salah Bendjelloul cherche désespérément une «entente franco-musulmane». Ferhat Abbas, qui milite dans le même courant à cette époque, est un jeune Algérien qui vacille entre le rêve et la réalité, sans jamais renoncer à la légalité, plantée au cœur d’un bouquet de revendications qu’il offre chaque matin à Marianne sans parvenir à la séduire. L’Emir Khaled, lui, lègue un héritage insuffisamment exploré, abandonné en friches. Khaled, un grand absent qui n’a jamais eu tort.

     « La fille aînée de l’Eglise » se prépare à fêter le centenaire d’une occupation dévastatrice ; Ben Badis tente de libérer, culturellement, la société musulmane de sa torpeur, enchaînée par les envahisseurs de 1830 mais dominée aussi par une aristocratie religieuse et terrienne qui fait de l’obscurantisme le breuvage de la soumission qu’on inocule aux masses rurales, traquées, de surcroît, par la misère, l’ignorance et la maladie.

 

Les délégués du Congrès musulman de 1937, retournent de Paris la besace effroyablement vide, avec dans leurs bagages un Messali tonitruant, décidé à transplanter et planter la semence en Algérie même. Les Français ne sont pas tellement disposés à céder à la moindre revendication des Algériens qui semblent être réduits à une mendicité politique, dans un pays qui est le leur et qu’on leur a dérobé en 1830.

Mais alors, par quelle fente le mouvement syndical pouvait-il s’introduire, dans une colonie placée sous haute surveillance ? La CGT sur le plan juridique et politique s’adresse d’abord aux travailleurs européens qui jouissent au préalable du statut de la citoyenneté française. Ce n’est pas le cas des Algériens qui doivent se contenter des places disponibles dans des compartiments déjà occupés par des Européens auxquels s’adresse le droit syndical.

Combien est-il utile de rappeler, qu’en ces années 1930, des instructions formelles furent données aux formations politiques françaises d’êtres vigilantes aux adhésions autochtones qui risquaient d’alimenter et de provoquer des troubles. Mesures qui expliquent certainement l’absence de solidarité  des travailleurs européens avec leurs camarades algériens  lorsque ces derniers observaient  des grèves pour protester contre les iniquités. Le principe de l’égalité des salaires entre les deux éléments n’était pas scrupuleusement pris en charge par la CGT. Le prolétariat connaissait à ce niveau le clivage imposé par el système des deux collèges relatif  au système électoral.

Néanmoins, comme à toute règle il y a une exception, c’est en 1930 que les mineurs d’Algérie, en général ceux de Béni-Saf sont défendus par Gabriel Gonzalès, représentant d’Afrique du Nord au Conseil national de la Fédération des mineurs et maire en 1929 de la ville de Béni-Saf sous l’étiquette socialiste. Le maire s’engagea à soutenir plusieurs motions visant à anéantir les inégalités dont étaient frappés les mineurs d’Algérie par rapport à ceux de la Métropole.

Dans cette démarque, la maire obtint l’alignement des rentes qu’on versait aux accidentés des mines ; un acquis ressenti avec aise et satisfaction par l’ensemble des mineurs algériens. Cependant comme le soulignera Aïssat Idir, plus tard et jusqu’en 1950, les mineurs Algériens souffrent encore d’inégalité et leurs luttes sont très peu soutenues par leurs camarades européens.

Toutefois, selon Mohamed Mebarki, qui ne cite pas ses sources «le premier Congrès ouvrier arabe d’Algérie réuni en juin 1930, arrive à dénoncer les expropriations, le refoulement vers les régions du Sud, le code de l’Indigénat dont étaient victimes des millions d’Algériens. Une motion fut même adoptée pour la formation d’une centrale algérienne autonome».

(Revue El Djazaïr n° 47 - p.90 - février 2012). Revendication sociale et revendication nationale, deux notions inséparables que nous avons développées dans la première partie de cet ouvrage, partie qui traite du syndicalisme tunisien.Des troubles avaient eu lieu dans l’Ouest algérien dans les années 1930. C’est plus particulièrement à Sidi Bel-Abbès que de violentes manifestations eurent lieu le 25 février 1937. Les cheminots occupent la rue, suivis par la population locale. Un affrontement s’en suivit avec les autorités répressives. Bilan : un mort et neuf blessés parmi les Algériens. L’atmosphère reste tendue.

Moins d’une semaine après les émeutes de Sidi Bel-Abbès, des incidents éclatent à Sfisef (ex-Mercier-Lacombe) le 2 mars 1937. Les populations des villages avoisinants rejoignent la masse des ouvriers agricoles en grève. L’administration fait appel à la légion étrangère et aux brigades de la garde mobile d’Oran pour briser le mouvement de grève et réprimer les populations solidaires. Le calme n’est revenu  qu’en début de soirée. (Source : article du docteur D.Refas - Le Quotidien d’Oran du 14 novembre 1999).
A suivre

|
Haut de la page

CHRONIQUES

  • Walid B

    Grâce à des efforts inlassablement consentis et à une efficacité fièrement retrouvée, la diplomatie algérienne, sous l’impulsion de celui qui fut son artisan principal, en l’occurrence le président de la République Abdelaziz Bouteflika, occupe aujour

  • Boualem Branki

    La loi de finances 2016 n’est pas austère. Contrairement à ce qui a été pronostiqué par ‘’les experts’’, le dernier Conseil des ministres, présidé par le Président Bouteflika, a adopté en réalité une loi de finances qui prend en compte autant le ress

  • Walid B

    C'est dans le contexte d'un large mouvement de réformes sécuritaires et politiques, lancé en 2011, avec la levée de l'état d'urgence et la mise en chantier de plusieurs lois à portée politique, que ce processus sera couronné prochainement par le proj

  • Boualem Branki

    La solidité des institutions algériennes, la valorisation des acquis sociaux et leur développement, tels ont été les grands messages livrés hier lundi à Bechar par le ministre de l'Intérieur et des Collectivités locales Nouredine Bédoui.

  • DK NEWS

    Le gouvernement ne semble pas connaître de répit en cette période estivale. Les ministres sont tous sur le terrain pour préparer la rentrée sociale qui interviendra début septembre prochain.

  • Walid B

    Dans un contexte géopolitique régional et international marqué par des bouleversements de toutes sortes et des défis multiples, la consolidation du front interne s'impose comme unique voie pour faire face à toutes les menaces internes..

  • Walid B

    Après le Sud, le premier ministre Abdelmalek Sellal met le cap sur l'Ouest du pays où il est attendu aujourd'hui dans les wilayas d'Oran et de Mascara pour une visite de travail et d'inspection.