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La famine dans le sersou : I - Tiaret Au Debut Du Xxe Siecle Tiaret Au Debut Du Xxe Siecle

Publié par * Une étude de Amar Belkhodja - Journaliste-auteur- le 11-02-2014, 16h39 | 361
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Cinquante ans après la création du centre de colonisation de Tiaret en 1843, les tribus algériennes commencent à subir les effets du paupérisme et de la dépossession. Le chef-lieu de la commune de plein exercice de Tiaret connaît sans répit des afflux interminables de la population rurale (1).

La région de Tiaret a connu en 1897 une saison sèche suivie d’un autre sinistre causé par la grêle. L’année suivante, la préfecture d’Oran délègue un secours de 1.500 francs à la commune de Tiaret au profit d'arabes nécessiteux.(2). 500 francs de cette allocation étaient accordés en nature. Les 1.000 autres francs étaient destinés à l’ouverture de chantiers pour employer les algériens qui avaient perdu leurs récoltes.

Considérant que de nombreux arabes dont le nombre augmente tous les jours sont dans un état d’extrême misère la municipalité de Tiaret demande au préfet d’Oran d’accorder à la population arabe un nouveau secours.
Une telle démarche nous donne l’impression que la municipalité de Tiaret et le préfet d’Oran manifestent de la clémence envers les paysans algériens réprouvés par la sécheresse et démunis de moyens de subsistance.

Une année après il n’est plus question d’être philanthrope avec les arabes. La même  municipalité réagit avec d’autres sentiments à l’égard des mendiants algériens.
La commune demande que des mesures énergiques soient prises à l’encontre des mendiants indigènes qui pullulent depuis quelque temps en ville(3).
Des élus, colons Européens, demandent que  ceux qui mendient dans la plaine soient ramassés par la garde champêtre et qu’on les empêche surtout de stationner (3). 
Le commissaire fut saisi pour exécuter le vœu du conseil  municipal de Tiaret.

De telles mesures seront constantes à Tiaret. A différentes dates de la vie économique  de la région, des mesures de refoulement frappaient tous les miséreux algériens réduits à la mendicité et contraints d’affluer vers la ville de Tiaret dans l’espoir d’y trouver une hypothétique charité.
 A Tiaret, le début du XXe siècle s’ouvrira sur l’appauvrissement des populations algériennes. Les familles traquées par la misère convergent vers le centre de colonisation où les premiers colons sont installés. Confortablement.

Les colons, affairés à construire la capitale de leur empire, n’aiment pas être dérangés par des hères à la recherche d’une obole.
En 1901, les mendiants algériens n’étaient pas encore partis de Tiaret. Ils sont trop nombreux. Cette situation irrite la municipalité. Le conseil demande leur expulsion (4).
Le sort veut que la nature et le colon se liguent contre les paysans qui habitent une région réputée être le grenier de l’Algérie. Les années agricoles sont mauvaises. 

Les années 1908-1909 sont dramatiques. L’hiver a été terriblement dur, et nul ne saura- il n’y a  pas  d’historiographes pour ce triste bilan- tout ce que les arabes ont souffert pendant les huit mois qui viennent de s’écouler… Je me rends compte, plus qu’autrefois encore, que sur les quatre millions d’indigènes  que gouverne la France dans le Nord de l’Afrique  trois millions ont toujours faim (5).
Pour la population algérienne, il n’existe aucun espoir de voir les choses s’améliorer. Bien au contraire le dénuement ira en s’accentuant. La situation devient tragique chaque fois que survient la sécheresse.

La ville de Tiaret continue à accueillir des miséreux, obligés de tendre la main pour la survie. La presse coloniale locale refuse d’admettre le spectacle et signale que depuis le 1er janvier (1913) une nuée d’éclopés ou d’infirmes indigènes s’est abattue sur la ville  et paraît devoir y demeurer. La mendicité étant  interdite dans le département d’Oran, nous espérons qu’ils seront avant peu invités à regagner  leurs douars d’origine (6).

Au printemps de 1914, « le Réveil Républicain » se réveille sur le même ton pour prendre à partie les mendiants devenus trop nombreux à Tiaret : La ville est depuis quelque temps peuplée d’une tribu de mendiants loqueteux qui envahissent les terrasses des cafés et même les maisons, y propageant, avec tous les microbes connus et inconnus, les parasites dont  sont peuplés leurs haillons. Ne serait-il pas possible au service compétent de faire réintégrer aux uns et aux autres leur pays d’origine(7), s’interroge le journal local qui déplore la situation et souhaite assainir le paysage d’un tableau que supportent très mal les européens de la ville qu’ils croient avoir héritée légalement de Lamoricière.
Pendant que la paysannerie se débat dans  les difficultés dominées par la question vivrière, la colonisation construit la ville européenne.

En 1914, les entrepreneurs européens se font rares. En Europe c'est la guerre. Ils ont été tous mobilisés. La municipalité de Tiaret entame sur régie des travaux de rechargement et d’empierrement de la rue Bugeaud, du boulevard Gambetta et des environs de la synagogue. Pour cela, elle fait appel aux chômeurs.
Dans l’Algérie colonisée, la condition du chômage entre un européen et un algérien n’est pas la même. Le système applique une discrimination dans la distribution des salaires.

 A cette époque, le tarif journalier à travers tout le pays est de l’ordre2,75 francs pour les algérien. Sur le terrain, les uns et les autres accomplissent les mêmes  travaux, la même tâche.
Pendant la première guerre mondiale, les algériens se battent et meurent sur le front aux côtés des français, pour la cause française. Quand la guerre sera finie, ils retournent en Algérie, à leur misère. La paysannerie algérienne connaîtra un appauvrissement continu.

Les paysans pauvres et sans terre abandonnent une situation fort précaire et prennent le chemin de la ville. Comme nous l’avons vu,  la procession est quasi permanente. Comme nous le verrons, la situation sera plus critique pendant la famine de 1920.
En 1915, le maire de la ville de Tiaret entreprend une véritable chasse aux mendiants et familles étrangères à la ville de Tiaret. 

Il entend purger la cité de tous ces indésirables qui habitent des réduits de 2 ou 3 mètres carrés, sur lesquels ils logent au moins 7 ou 8 compromettant ainsi la salubrité et l’hygiène publique  (8).
Le chef de la commune de plein exercice, après avoir recensé l’ensemble des familles et situé leur origine, demande à l’administrateur de la commune mixte de Tiaret de les faire refouler vers leurs douars respectifs.

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