Histoire

La famine dans le Sersou: III -Le Colon, La Secheresse Et La Misere

Publié par Une étude de Amar Belkhodja - Journaliste-auteur le 15-02-2014, 16h50 | 628
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Mais pendant que l’on palabre dans les journaux dont la position est souvent versatile et paternaliste, les algériens continuent à mourir dans les rues de Tiaret. « Le 10 février 1927 au matin, le cadavre d’une cinquantaine d’années a été découvert près de la pépinière Bouscarin » (6).  Le drame de la misère est quotidien. Une femme abandonne un enfant de 15 jours sur le trottoir. Privée elle-même de nourriture, elle avait les seins taris. Elle proposa son enfant à une coreligionnaire qui ayant déjà plusieurs enfants à sa charge, refusa le bébé.

La mendicité s’installe définitivement à Tiaret. Ce n’est pas pour autant que l’administration coloniale abandonne le refoulement. Les meskines sont traqués par la misère et par la répression. On leur donne la chasse sans répit.
Le maire de la ville de Tiaret ordonne au commissaire de procéder au ramassage de mendiants de jour et de nuit et de les enfermer dans la halle à grains avant de les expulser manu- militari vers leurs douars d’origine (7). 

Les mendiants «constituent pour la commune de Tiaret et pour le bureau de bienfaisance une lourde charge. Et le danger que présente pour l’hygiène publique le séjour dans les rues et dans les maisons de tous les porteurs de microbes, justifie les protestations énergiques qui se sont déjà élevées» (8).
Pour la paysannerie algérienne des zones montagneuses, les années se suivent et se ressemblent. « Le nommé Tahar Ben Mohamed, 65 ans, est trouvé mort sur la voie publique »(9). « Les sans – abri », affaiblis par le manque de nourriture, sont pour la plupart, achevés par la congestion. Le 28 octobre 1928, une femme est trouvée morte près de l’infirmerie «indigène».

Quoique faiblement structurée en Algérie, l’«Etoile Nord–Africaine » dénonce le système colonial en appelant que « depuis la conquête, onze millions d’hectares des meilleurs terres ont été volés et les indigènes, refoulés vers le Sud aride, sont décimés par les famines  périodiques. Les amendes collectives frappent des tribus entières, les séquestres finissent de ruiner le peuple algérien qui est plongé dans la misère » (10).

Nous sommes à la veille de la célébration du centenaire de la colonisation. L’œuvre «civilisatrice» de la France est éloquente : après un siècle de présence française, le peuple algérien se débat dans un extrême misère. C’est l’asphyxie. 
Les colons, eux, vivent dans l’opulence. Tout ce qui s’était réalisé dans le pays, ne l’a été que dans leur intérêt et celui du capitalisme français. Terriens implantés dans la colonie et industriels de la « métropole » exploitent sol et sous- sol. Ils se sont partagé le butin d’un pays conquis au prix du massacre, de l’enfumage, du génocide.

La paysannerie algérienne se trouve dans l’étau. Elle repose sur l’enclume de la misère. Puis deux marteaux s’abattent sur elle : la colonisation et la féodalité. Alors, tout est malheur, tout est désarroi, incertitude. La famine provoquée par la sécheresse cyclique constitue pour ainsi dire un coup de grâce qui achève un peuple dépossédée et vilement exploité.

Adroitement, les historiens de la colonisation affirment que «  la misère est la cause incontestablement la plus active de la criminalité … C’est pourquoi toute année où la récolte est mauvaise est marquée invariablement par une recrudescence de la criminalité » (11). 
Pour tenter de prouver quelques raison sociale à l’occupation française, les historiens français, soutiennent sans pudeur des thèses fantaisistes que seul le profane (celui qui ne vit pas en Algérie) est prédisposée à assimiler où à admettre :

« Il n’y a plus de sans travail en Algérie : tout le monde trouve à s’occuper, les salaires des ouvriers musulmans sont devenus rémunérateurs, un grand nombre d’arabes et surtout Kabyles vont chercher en France un travail largement payé. Dans les villes, les femmes indigènes qui veulent s’occuper trouvent aisément à s’employer comme femmes de ménage, et toutes ces causes réunies font que la misère a notablement diminué » (sic) (12). 

M. Norès affiche un optimisme gratuit teinté de contractions à savoir que la misère, comme le naturel , quand en veut la chasser, elle revient au galop dans des écrits destinés à justifier – avec beaucoup d’efforts- la présence française et énumérer ses «bienfaits» que seul une plume malhonnête est en mesure d’inventer.

Pour fêter le centenaire, l’administration coloniale a commandé des ouvrages. Les plumes se sont mises alors à écrire des choses qui ne s’adressent pas évidemment aux algériens. Les auteurs, tous engagés pour la cause coloniale, peignent des tableaux aux mille et une couleurs pour occulter la misère que les algériens subissent tous les jours.

On écrit à qui veut lire que le régime colonial a apporté des bienfaits. Il est fort difficile de faire admettre des mensonges. Le régime colonial vit d’une nature tissée de contradictions. Car la misère du peuple algérien, personne n’osera la nier. Les algériens la subissent quotidiennement.

Au lendemain de la célébration du centenaire de la colonisation, contrairement à ce que soutenaient la veille les Norès et les Depont, les Algériens vivent toujours sous l’embrigadement du régime de l’exploitation et de l’oppression. La circulation est sévèrement contrôlée. Le refoulement pratiqué à grande échelle. En mars 1931, le Gouverneur général ordonne aux préfets d’empêcher les «indigènes» miséreux de l’extrême Sud à se rendre dans le Nord du pays.

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