La fête de la distillation d’eau de rose et d’extrait de fleurs d’oranger, tradition intemporelle s’il en est à Constantine, a été lancée samedi après-midi avec une grande parade multicolore formée de cavaliers, de calèches ornées de bouquets de roses géants et de troupes folkloriques, qui a sillonné les rues de la ville jusqu’au palais Ahmed Bey.
Annonciatrice de la reviviscence de la nature dans l’antique Cirta, la fête a donné lieu à une exposition de tous les équipements traditionnels servant à la distillation au palais Ahmed-Bey où l’odeur suave et enivrante de plusieurs variétés de pâtisseries aromatisées à l'eau de fleur d'oranger ou à l'eau de rose a suscité un vif engouement auprès des visiteurs, parfois ébahis par un savoir-faire ancestral, transmis de génération en génération.
La distillation est une opération «délicate» où la technique et les petits secrets utilisés doivent être bien assimilés pour obtenir un authentique «rass el qettar» (essence de l’eau de rose), affirme à l’APS Hadja Yasmina, une sexagénaire qui s’emploie à offrir aux visiteurs une part de succulente «tamina baïdha», une sorte de friandise à base de grosse semoule, de beurre et de miel, traditionnellement préparée et distribuée à Constantine avant l’entame de la distillation.
Fatiha B, une jeune femme de 30 ans, membre d’une association versée dans l’artisanat, confiant avoir découvert ce savoir-faire millénaire par un «heureux hasard providentiel», raconte avoir appris à distiller en «fréquentant assidûment des femmes adeptes de cette activités depuis des lustres».
La jeune femme se dit «fière» d’activer dans une association qui s’attache à perpétuer cette activité et à assurer la promotion de ce métier ancestral.
Elle souligne aussi qu’autour de cette activité, son association £uvre à «ressusciter» des métiers artisanaux tels que la vannerie, pour envelopper d’osier les fiasques, indispensables pour préserver l’odeur de l’eau de rose ou d’oranger distillée, et garantir sa bonification, ou encore la fabrication des alambics.
Organisée par l’Association El Baha des arts et des cultures populaires, à l’occasion du mois du patrimoine dans un lieu des plus emblématiques de la ville du Vieux Rocher, l’exposition, forte de nombreux stands mettant en valeur les différents ingrédients et autres équipements de distillation, se poursuivra jusqu’au 10 mai prochain. Elle réunit des artisans spécialisés de Constantine, mais aussi de Tunisie où l’eau de rose et l’eau de fleurs d’oranger sont tout aussi appréciées.
Célébrer le patrimoine immatériel de Constantine c’est aussi l’occasion de revisiter l’art culinaire d’une cité bimillénaire qui ne cesse de dévoiler son art et son savoir-faire. L’eau de fleurs d’oranger et de rose est très présente dans sa gastronomie locale.
Dans le patio du palais Ahmed Bey, la fête aux multiples facettes et la reviviscence de la nature sont célébrées de mille et une manières. En véritables artistes, des chefs créent des moments de plaisir et d’émotion uniques, renouvelés à chaque dégustation de M’chelouech, de Shbah Essafra, de R’fiss, de Taminet el louz, de T’charek, ou encore de Makroud. Autant de petits délices parfumés au «ma ouard» (eau de rose) qui racontent la riche histoire des multiples saveurs de la cité des ponts.
