L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a été épinglée jeudi pour sa mauvaise gestion de l'épidémie d'Ebola qui a frappé certains pays de l'Afrique de l'ouest, par des experts, qui ont réclamé des réformes d'envergure et un doublement de son budget pour éviter d'autres morts «inutiles» à l'avenir.
«Il est crucial d'agir maintenant au niveau de l'OMS et du système global de santé, avant que la dynamique politique actuelle ne s'estompe,» avertissent des chercheurs de l'Institut O'Neill pour la santé globale, basé à Washington, dans la revue médicale britannique The Lancet. En termes de moyens financiers, lls suggèrent notamment un doublement d'ici à 5 ans du budget de l'organisation, qui s'élève actuellement à un peu moins de 4 milliards de dollars (3,5 milliards d'euros).
Ils préconisent la création d'un fonds d'urgence spécifique permettant de fournir des fonds dès qu'une éventuelle épidémie sera identifiée. Le bilan de l'épidémie d'Ebola qui frappe depuis l'an dernier trois pays d'Afrique de l'ouest (Liberia, Sierra Leone et Guinée) dépasse désormais 11.000 morts, soit près de la moitié des 26.500 personnes touchées par le virus, selon le dernier bilan fourni jeudi par l'OMS.
L'OMS avait dès l'été dernier été accusée d'avoir mal anticipé l'épidémie et d'avoir réagi avec retard.
Parmi les raisons de ce retard, Lawrence Gostin et Eric Friedman citent une baisse du budget de l'OMS de 500 millions de dollars (440 millions d'euros)en 2011, qui s'est traduite par des réductions d'effectifs, notamment dans son unité des interventions d'urgence. Mais ils évoquent également des «lacunes» dans les réglementations sanitaires internationales destinées à prévenir la dissémination de l'épidémie à travers les frontières.
«Le personnel sanitaire tout comme les fonds nécessaires sont arrivés lentement et de manière imprévisible» relèvent-ils aussi. L'origine de l'épidémie actuelle remonte à un enfant de deux ans découvert en décembre 2013 en Guinée, mais le diagnostic n'avait été confirmé qu'en mars 2014, alors que l'épidémie s'était déjà étendue au Liberia et à la Sierra Leone.
Dès le mois de juin, l'organisation Médecins sans frontières, qui avait fustigé la réponse lente de l'OMS, estimait que l'épidémie n'était «absolument pas sous contrôle», mais l'OMS avait attendu le mois d'août pour décréter une «urgence de santé publique mondiale» et demander une «réponse internationale coordonnée». L'OMS a indiqué qu'elle présenterait des propositions visant à modifier les interventions dans les situations d'urgence, lors d'une réunion organisée d'ici à la fin du mois. Une évaluation indépendante de sa gestion de la crise Ebola est également en cours.