L'Ukraine a renoué avec les violences dans la capitale Kiev où 25 personnes sont mortes et des centaines ont été blessés lors d'affrontements entre manifestants de l'opposition et forces de l'ordre, sucitant des appels de la communauté internationale à la retenue.
Après plusieurs semaines d'accalmie, une nouvelle vague de violences a secoué le pays, dans laquelle vingt-cinq personnes ont été tuées et plus 241 personnes autres hospitalisées parmi lesquelles 79 policiers et cinq journalistes, selon des chiffres du ministère de la Santé.Un journaliste du quotidien ukrainien Vesti a été tué par balles par des inconnus non loin du lieu des affrontements. Mardi, la police anti-émeute a pris d'assaut les camps de manifestants installés dans le centre de Kiev après l'éclatement de violentes agitations.
Ces heurts sont survenus alors que l'opposition avait promis une «offensive pacifique» pour mettre la pression sur les députés qui devaient examiner une réforme constitutionnelle réduisant les pouvoirs présidentiels, rassemblant plus de 20 000 personnes pour un défilé qui a dégénéré.
Les forces de l'ordre devant les accès au parlement ont utilisé du gaz lacrymogène, jeté des grenades assourdissantes et tiré des balles de caoutchouc sur les manifestants jetant pavés et cocktails Molotov, selon les images diffusées par les chaînes de télévision.
Au cours des affrontements, les manifestants ont pris d'assaut au cocktail molotov et brièvement occupé le siège du parti du président ukrainien Viktor Ianoukovitch dans le centre de la capitale ukrainienne.
Il s'agit des premiers affrontements à Kiev depuis ceux de la fin janvier qui avaient fait quatre morts, dont deux tués par balles réelles et plus de 500 blessés. Le renoncement des autorités ukrainiennes à un projet d'association avec l'Union européenne, au profit d'un rapprochement avec la Russie, a déclenché fin novembre un mouvement de contestation sans précédent.
L'opposition a accusé le pouvoir ukrainien de céder aux pressions de Moscou, tandis que la Russie accuse les Occidentaux d'encourager l'escalade et les provocations envers le pouvoir légal en Ukraine.
M. Ianoukovitch a exhorté mercredi l'opposition à «prendre ses distances avec les radicaux», l'appelant à résoudre la profonde crise qui secoue l'Ukraine par le dialogue et les négociations. «Nous devons nous asseoir à la table des négociations pour sauver l'Ukraine. Si nous détruisons l'Etat, les générations futures ne nous pardonneront pas», a-t-il déclaré dans un discours à la nation.
Dans son adresse à la Nation après une rencontre sans résultat avec les chefs de l'opposition, le président Ianoukovitch a accusé cers derniers d'avoir «franchi les limites» en appelant selon lui à une «lutte armée» pour prendre le pouvoir.«Ces soi-disant hommes politiques ont tenté de prendre le pouvoir en violant la Constitution par la violence et les meurtres», a-t-il dit, en assurant que les coupables «comparaîtraient devant la justice».
La communauté internationale appelle à la retenue
Soulignant l'urgence d'entamer le dialogue avec les leaders de l'opposition, le vice-président américain Joe Biden a appelé mardi le président ukrainien pour lui faire part de ses «graves» préoccupations face à la crise qui se poursuit dans les rues de Kiev, précisant que les Etats-Unis «condamnent la violence venant des deux côtés, mais qu'ultimement, il revient au gouvernement de désamorcer les tensions».
La Maison Blanche a exhorté M. Ianoukovitch à mettre fin au «violences de rues et le recours excessif à la force des deux côtés (autorités et manifestants)», prévenant que le recours à la force ne «résoudra pas la crise».
La chef de la diplomatie européenne, Catherine Ashton, s'est quant à elle déclarée «très préoccupée» par «l'inquiétante escalade» de la violence à Kiev, et a exhorté les autorités ukrainiennes à «s'attaquer aux racines de la crise».«Les décisions politiques doivent être prises au Parlement» et les «responsables politiques assumer leurs responsabilités partagées pour rétablir la confiance et créer les conditions pour une solution durable à la crise politique», a-t-elle insisté. Elle a ajouté que cette solution doit comprendre «la formation d'un nouveau gouvernement rassembleur», «des progrès pour une réforme constitutionnelle» et «les préparatifs d'élections présidentielles transparentes et démocratiques».
De son coté, le ministre allemand des Affaires étrangères, Frank-Walter Steinmeier, a exhorté «les parties en Ukraine à poursuivre le chemin engagé ces derniers jours et chercher une solution politique, par les moyens de la discussion».La Pologne indiqué qu'elle «oeuvrera toujours pour un compromis» en Ukraine car une guerre civile dans ce pays «n'est pas dans (son) intérêt». Elle s'est également dit prudente quant aux éventuelles sanctions de l'Union européenne envers le pouvoir en Ukraine.
La Russie a dénoncé une «tentative de coup d'Etat» en Ukraine, appelant les leaders de l'opposition à faire «cesser l'effusion de sang dans leur pays, reprennent sans délai le dialogue avec le pouvoir légitime sans menaces ni ultimatum» afin de permettre au pays de sortir d'une crise profonde. Le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon s'est dit «extrêmement inquiet» et «réitère son appel à tous ceux qui sont concernés à agir avec retenue pour éviter de nouvelles violences».
