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Suspension d'importations - M. Benmeradi : Une économie en devises de 1,5 milliard de dollars annuellement

Publié par DKNews le 04-02-2018, 18h20 | 42
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La mesure de suspension à l’importation de 851  produits devrait permettre  à l’Algérie d'économiser un montant en devises  de l'ordre de 1,5 milliard de dollars  sur une année, a indiqué le ministre  du Commerce, Mohamed Benmeradi,  dans un entretien accordé à l’APS.

  "Nous espérons gagner 1,5 milliard dollars sur une année grâce à la  suspension à l’importation des 851 produits comprenant 400 produits  industriels dont l'importation avait coûté 1 milliard de dollars en 2016,  et 451 produits agricoles et agroalimentaires", estime le ministre. 

Concernant les craintes de certains opérateurs quant au risque de voir  leurs activités entravées en raison de la suspension de l'importation de  certains intrants, le ministre considère que s'il est légitime que ces  derniers s'inquiètent, il n'en demeure pas moins qu'ils doivent savoir que  "le but est de les protéger". 

 "Ceux qui sont en train de contester cette mesure sont ceux qui activent  dans des filières que nous avons totalement protégées puisque nous avons  interdit l'importation du produit fini. 
Donc déjà, nous leur avons offert  un marché sur un plateau", affirme-t-il. 

Plus explicite, M. Benmeradi relève que le problème dans l’économie  nationale réside dans le fait que des opérateurs, par méconnaissance de ce  qui est produit dans le pays ou pour des objectifs inavoués, préfèrent  importer les intrants alors qu'un certain nombre est produit localement. 

Selon lui, de nombreux opérateurs ont réalisé des investissements mais  sont restés dans l'aval de l'activité et ne remontent pas en amont pour  développer les intrants locaux à quelques très rares exceptions. 

A ce propos, il cite le cas des premières conserveries de tomates: ces  premiers investisseurs ont construit des usines pour la transformation de  tomates mais ramenaient le concentré de tomates de Turquie et ne faisaient  donc que de la mise en boîte. 

Mais par la suite, relève le ministre, un  certain nombre d'entre eux ont commencé à remonter en amont en travaillant  étroitement avec les agriculteurs. 

 Mais citant l’exemple de la filière boissons, il indique que les  producteurs locaux utilisent l’eau comme seul intrant local et considèrent  le sucre comme produit national par le seul fait qu’il soit raffiné  localement, tandis que le reste des intrants est importé de l’étranger y  compris les arômes et les purées de fruits qui sont, pourtant, fabriqués  localement. 

Par ailleurs, M.  Benmeradi fait savoir que son département va lancer une  évaluation de l’économie nationale en remontant jusqu'au début des années  2000: "Nous sommes en train de préparer un rapport pour le gouvernement sur  la situation du commerce extérieur de 2017 dans lequel nous allons  expliquer pourquoi un déficit de plus de 11 milliards de dollars a été  enregistré et pourquoi les importations n'ont pas baissé suffisamment. 

Et  puis surtout nous allons faire, pour la première fois, une évaluation de  long terme à partir de l'année 2000 et étudier ce qui s'est passé dans  l'économie nationale. 

Nous y allons étudier les raisons qui ont fait que la  part de l'économie nationale dans la couverture de la demande nationale n'a  fait que baisser". 

 Citant l'industrie nationale, il observe que lorsque le pays exporte 4  produits industriels, il en importe 100: "Mais comme ça, on va droit au  mur". 
  
Très peu d'investissements industriels dans le secteur privé

Interrogé sur la difficulté d'endiguer les importations en dépit des  différentes mesures prises durant ces toutes dernières années, M.  Benmeradi  explique qu’elles sont nombreuses dont, en premier, le système de  subventions indirectes et involontaires des importations. 

En effet, explique-t-il, avec un taux de change tel qu'il est pratiqué  actuellement, "l'Etat est en train de subventionner les importations dans  le sens où les importateurs obtiennent, auprès des banques, des devises  contre dinars à un prix qui n'est pas réel, c'est-à-dire ne reflétant pas  la réelle parité entre le dinar et la devise.  En plus, les produits  importés sont très souvent subventionnés dans leur pays d'origine. 

Donc, il  est préférable pour les opérateurs nationaux d'aller les acheter à  l'étranger que de les produire localement".  La deuxième principale raison de la persistance des importations à un  niveau élevé est l’incapacité du secteur industriel privé de réaliser la  diversification et de contribuer, significativement, à la couverture de la  demande nationale, détaille encore le ministre qui déplore la "très faible"  production industrielle du pays. 

 "Nous avions pensé, pendant très longtemps, que le secteur privé allait  faire dans la diversification, mais le gros de ses investissements a été  réalisé dans les services et le bâtiment mais très peu dans l’industrie",  note-t-il.  Relevant que l'industrie algérienne est restée "basique", M.  Benmeradi  cite une étude faite par son ministère qui montre que 45.000 opérations  d'importations, réalisées en 2017 par les 35 entreprises membres de  l'Association des producteurs algériens de boissons, font ressortir un coût  d’importation oscillant entre 250 et 300 millions dollars, alors que les  exportations de ces entreprises ne dépassent pas les 12 millions dollars.  Dans ce sens, le ministre préconise de travailler, systématiquement, sur  la base de la balance devises par filière d'activité permettant une vraie  intégration nationale comme est le cas, selon lui, de la filière  médicament. 

Notant qu'il y a une vingtaine d’année, plus de 95% des besoins nationaux  en médicaments étaient couverts par les importations, le ministre rappelle  que le gouvernement avait alors décidé de suspendre les autorisations  d'importation de médicaments sauf pour la Pharmacie centrale des hôpitaux  ou d'autres établissements publics. 

 Ce dispositif a permis de booster les investissements dans l'industrie  pharmaceutique en produisant localement l'équivalent de 2 milliards dollars  actuellement contre moins de 2 milliards dollars d'importations, sachant  que la demande est de 4 milliards de dollars: "Donc ça s'équilibre" . 
"Aujourd'hui, nous sommes le pays qui compte le plus d'usines de  médicaments dans l'ensemble de la région. 

Nous avons dépassé la Tunisie,  qui nous devançait, ainsi que le Maroc et nous sommes proches de l'Egypte",  fait-il valoir. 

Interrogé sur sa récente déclaration quant à la levée de la suspension des  importations dans 2 ou 3 ans, il indique que cela n’est pas une décision du  ministère du Commerce mais qu'elle émane de la loi régissant le commerce  extérieur qui prévoit que dans le cas d'un déficit de la balance  commerciale, le gouvernement peut prendre des mesures de sauvegarde dont la  suspension "provisoire" des importations. 

 Il ajoute que le décret exécutif sur les 851 produits soumis au régime  des restrictions à l'importation précise aussi que les produits concernés  sont "temporairement" suspendus à l'importation jusqu'au rétablissement de  l'équilibre de la balance des paiements. 

Selon lui, d’autres mesures visant à rééquilibrer les deux balances seront  prises prochainement.  "La mesure de suspension de l’importation de ces produits permettra de  libérer les capacités nationales de production, sachant que la majorité des  usines algériennes ne tournaient qu’à seulement 20% ou 30% de leurs  capacités réelles car leurs produits, finis ou intrants, n’étaient pas  achetés malgré leurs prix très compétitifs", avance-t-il. 

 C'est le cas, entre autres, des filières de la céramique et des boissons  dont les prix proposés des intrants produits localement sont inférieurs à  ceux importés, selon le ministre.   Le ministre espère, cependant, qu'une fois ces mesures de suspension  levées, les opérateurs ne vont pas retourner aux importations car le  véritable enjeu, insiste-t-il, est d'ancrer la culture de consommer  national. 
 "Il faut être conscient qu'il y a le feu à la maison. 

Hormis la balance  commerciale énergétique qui est à l'avantage de l'Algérie, toutes les  autres balances sont déficitaires. 

Le tarif douanier contient 99 chapitres  dont 95 sont déficitaires avec tous les pays du monde y compris les pays  arabes.  Si nous ne faisons rien, dans deux ou trois ans nous n'aurons plus  les ressources financières pour importer quoi que ce soit y compris les  céréales.  Nous avons perdu en trois ans 50% de nos réserves de change, soit  44 milliards dollars", avise-t-il. 

Interrogé si cette période de suspension d'importations de produits était  suffisante pour développer et diversifier l'outil de production national,  M.  Benmeradi estime que le pays possède déjà un outil de production mais  qui est sous-utilisé et que sa protection, à travers ces mesures de  sauvegarde, lui permettrait de monter en cadence: "Il faut que les  entreprises locales apprennent à ce qu'une bonne partie des intrants soit  produite localement. 

C'est ce que nous voulons. En créant ce choc (à  travers la suspension d'importations), nous allons encourager les  entreprises algériennes à développer leur production et à utiliser les  intrants produits localement". 

Cependant, ajoute-t-il, "nous recevons à la fois des demandes de  protection et des demandes de levée de suspension et nous sommes en train  de les évaluer pour rajouter des produits et supprimer d'autres. 

Cette  opération est suivie par le Premier ministre, Ahmed Ouyahia".  A la question de savoir si cette suspension d'importations ne  risquerait-elle pas de créer des situations de monopole de producteurs  nationaux en l'absence de la concurrence étrangère et au détriment de la  qualité, le ministre juge que le pays "vit déjà une situation de monopole  qui est celui des importateurs". 

 Cependant, ajoute-t-il, "nous veillerons, à travers des organismes comme  le Conseil national de la concurrence et d'autres instruments, à ce qu'il  n'y ait pas de monopole dans ce sens.  Dans toutes les filières  industrielles, il y a des dizaines d'entreprises algériennes qui y  activent. 

Donc, il y aura certainement de la concurrence.  Actuellement, je  ne connais pas un secteur où il y a un seul producteur national". 

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