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Tunisie: la grève de la fonction publique, une menace pour la situation économique

Publié par Dk News le 23-11-2018, 16h09 | 4
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Une grève générale de la fonction publique, observée jeudi en Tunisie et décrétée par la centrale syndicale pour des revendications salariales, est considérée par des observateurs de la scène politique tunisienne comme "néfaste" pour la situation économique du pays à l'approche des échéances électorales.

Le porte-parole du ministère de l’Intérieur, Sofiène Zaag, a indiqué, jeudi, que le département a pris toutes les dispositions nécessaires pour sécuriser les mouvements de protestation organisés à l’occasion de cette grève.

Le taux de réussite de la grève, observée depuis la matinée, est estimé à 95 pc, a indiqué dans une déclaration à l'agence TAP Monem Amira, secrétaire général adjoint de l'UGTT chargé de la fonction publique.

Une importante affluence des centaines d'employés de la fonction publique a été enregistrée à la place de Bardo depuis 9h du matin, avec le déploiement d'un important dispositif sécuritaire, a notamment constaté une correspondante de l'agence.

Les grévistes ont scandé des slogans appelant au droit à l'augmentation salariale et protestant contre le "refus" du gouvernement de procéder à une amélioration du pouvoir d'achat des employés.

"Dignité, liberté, et justice professionnelle", "Rassemblés pour défendre le pouvoir d'achat et le secteur de la santé publique " et "La Tunisie n'est pas à vendre", étaient parmi les banderoles brandies par les grévistes, rapportent les médias locaux.

Dans le secteur de l'éducation, la Fédération Générale de l'Enseignement Secondaire tunisienne a dénoncé une décision des ministères de l'Education et de l'Enseignement Supérieur de suspendre, jeudi, les cours suite à la grève générale dans la fonction publique, la qualifiant de "pratique provocatrice héritée de l'ancien régime déchu".

"Cette décision tend à perturber la grève qui sera, également, observée et soutenue par le secteur de l'enseignement secondaire", souligne la fédération, ajoutant que de telles pratiques privent les enseignants de leur droit à la grève, "un droit préservé par la constitution".

La fédération a appelé l'"ensemble des directeurs, surveillants et professeurs à faire la grève, jeudi, avec présence sur les lieux du travail à partir de 07.45h du matin et à rejoindre, ensuite, le rassemblement prévu à 11H00 du matin" devant l'Assemblée des Représentants du Peuple (ARP).

Le ministère de l'Education et celui de l'enseignement supérieur et de la recherche scientifique ont décidé, mercredi après-midi, de suspendre, jeudi, les cours dans l'ensemble des établissements éducatifs et universitaires. Les cours reprendront, normalement, vendredi.

Dans la ville de Bizerte, l'activité administrative était quasi paralysée, jeudi, à cause de la grève générale observée par les fonctionnaires dans tout le pays à l’appel de la centrale syndicale. La plupart des services administratifs sont fermés, à Bizerte, à l’exception du transport, des guichets de la poste, du service des urgences à l’Hôpital universitaire Habib Bougatfa, de la direction régionale de la Caisse nationale d’assurance maladie et du dispensaire Aziza Othmana.

Les services du gouvernorat et des délégations assurent un service minimum à l'instar de la délivrance de certificat de décès. Contrairement aux établissements scolaires publics où les cours ont été suspendus, sur décision du ministère de l’éducation, les établissements privés ont accueilli normalement les élèves.

Dans la ville de Sfax, une large adhésion des établissements de la fonction publique à la grève générale était observée, dès la première heure de la matinée de jeudi, constate l'agence TAP sur place.

L’activité dans la plupart des administrations régionales et locales et les établissements publics à caractère administratifs est gelée, notamment dans les hôpitaux publics où le personnel observe une grève présentielle à l’exception des services des urgences qui fonctionnent normalement.

La satisfaction des revendications salariales impliquerait une "aggravation" de l’inflation

Plus d'un acteur de la scène politique tunisienne s'est d'ores et déjà positionné par rapport à cette grève générale de la fonction publique décidée par l'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT) pour appuyer les revendications salariales. Entre autres, il y a lieu de citer l'économiste et ancien ministre des Finances, Hassine Dimassi qui a estimé que la tenue de cette grève est "une décision suicidaire qui aggravera les difficultés que traverse le pays" actuellement.

"Les syndicalistes qui espèrent que des augmentations salariales puissent améliorer le pouvoir d’achat des citoyens dans un contexte pareil, ont tort. En fait, injecter de l’argent dans une économie qui ne crée pas de richesses, se traduit automatiquement, par une aggravation de l’inflation et de la dépréciation du dinar, ce qui lèsera davantage les citoyens, surtout la classe moyenne", a-t-il expliqué.

Face à "une économie en panne où la création de richesses est bloquée, que va-t-on distribuer, autre que la pauvreté?", s'est il interrogé. "Cette grève est une fausse tactique. C’est une poursuite des graves erreurs que nous commettons depuis une longue période et qui nous emprisonnent aujourd’hui, dans un cercle terriblement vicieux", a-t-il poursuivi.

S’agissant du coût de la grève, l’économiste a considéré que cette grève sera très coûteuse pour l’économie du pays. La fonction publique étant étroitement liée à toutes les activités économiques.

Cette grève "ne va pas seulement paralyser la fonction publique et les affaires courantes des citoyens mais elle va aussi, perturber toute l’activité économique du pays", a-t-il soutenu.

"Le coût pour l’économie est donc très difficile à cerner. Toutefois, le coût pour le budget de l’Etat, peut varier entre 150 et 200 millions de dinars, soit l’équivalent du coût de la réalisation d’une trentaine de kilomètres d’autoroutes", a-t-il précisé.

"Ce n’est pas du tout le moment de décréter la grève. Les syndicalistes auraient mieux fait de se mobiliser pour améliorer la productivité. Ce n’est qu’ainsi que leurs revendications de partage des richesses pourront avoir un sens. Agir autrement, c’est du suicide", a-t-il conclu.

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