
La visite à Alger du tout nouveau président de la République arabe d'Egypte, le général Abdelfettah Al Sissi, est de celles qui montrent toute la vigueur de la diplomatie algérienne, comme elle confirme qu'Alger reste un pays écouté. Sinon comment interpréter cette visite «algérienne» d'un président égyptien juste après son élection autrement que par le fait que Le Caire, dans la conjoncture politique internationale et régionale actuelle, a un grand besoin du soutien et de l'aide de l'Algérie.
D'abord parce que l'Algérie n'a pas succombé au chant des sirènes du printemps arabe, et est restée sereine, quand les autres pays arabes ont été laminés par une vague de fond qui hypothèque aujourd'hui leur avenir. Ensuite, le tout nouveau «Raïs» d'Egypte, a besoin d'écouter la partie algérienne, et en particulier les conseils du Président Bouteflika, sur nombre de dossiers stratégiques de la coopération bilatérale, et d'avoir le point de vue sur d'autres questions régionales, dont le terrorisme, la mise en place de nouvelles relations de coopération dans la région et, surtout, remettre de l'ordre dans une Egypte à cheval entre paix et terrorisme.
D'autant que le pays traverse une dure crise économique sur fond de violence armée. Il y a des litiges commerciaux et économiques entre les deux pays, que l'Egypte veut résoudre, même si l'Algérie a fait de son côté ce qu'il y a lieu de faire, notamment dans l'affaire Djezzy. Et puis, il y a le gaz algérien dont l'Egypte a grandement besoin dans la phase actuelle, d'autant que l'Algérie consent aux Egyptiens un prix intéressant pour faire tourner leur industrie. Autant de raisons donc qui ont fait que la première visite du nouveau président égyptien dans un pays étranger a été l'Algérie.
Et le président Al Sissi, au sortir de son entretien avec le chef de l'Etat, n'a pas manqué de confirmer cette analyse : «Ma visite en Algérie a pour objectif de dégager une véritable entente et une vision conjointe des intérêts communs et des défis qui se posent aux deux pays et à la région». Une déclaration qui laisse cependant transparaître l'empressement du Caire à bâtir de nouvelles relations de travail avec l'Algérie et, surtout, de repartir sur de nouvelles bases, après tout ce qui a été dit et fait après l'épisode des éliminatoires de la coupe du monde 2010.
Il rappellera ainsi dans cette logique que «les deux pays ont besoin d'œuvrer ensemble sur nombre de questions», dont celle du terrorisme, ce «problème» qui nécessite «une coordination des positions» et des efforts communs pour lutter ensemble contre ce phénomène. Il n'en faut pas tant pour que l'Egypte retrouve ses esprits et se remette à travailler avec l'Algérie, un pays qui s'est toujours astreint à une grande réserve et retenue dans les moments de crise et, surtout, qui peut aider l'Egypte à se «remettre debout».
Car il ne faut pas être dupe à ce niveau de l'analyse : la présence du nouveau président égyptien en Algérie a quelque part une raison économique et financière, même sécuritaire. Une donnée qui ajoute du crédit au fait que l'Algérie est devenue aujourd'hui très écoutée sur nombre de dossiers, dont la lutte antiterroriste et les aides au développement.