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Bejaia - Ferme aquacole « Malikate Al Bahr » : Les déboires d’un géant-pionnier

Publié par Arslan-B le 06-10-2014, 16h30 | 450
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« Aux aléas et autres impondérables climatiques s’ajoutent diverses autres contraintes et obstacles d’ordre administratif ou bancaire…Si bien que l’unique ferme aquacole (au gigantisme impressionnant) de la wilaya effectivement opérationnelle est, depuis quelque temps, à l’arrêt, paralysée. Dire qu’elle avait pourtant commencé à produire et en qualité. Un élan aussitôt brisé, hélas ? »

« Aujourd’hui la ferme est à l’arrêt et ce en dépit de nombreuses correspondances adressées aux plus hautes instances de l’Etat pour que celles-ci daignent intercéder auprès de la BADR en faveur d’un rééchelonnement et retraitement par celle-ci de la dette que nous avons contractée.

Telle est, en tout cas, la condition formulée par sofinance en vue d’un financement de la ferme aussi bien en terre ferme que sur le plan d’eau (mer) (cages flottantes à créer…

Nous, nous souhaitons relance et croissance… » confie à DK NEWS M. Djamel Hocini, gérant et propriétaire de la ferme aquacole « Malikat al bahr », depuis quelque temps confronté à des difficultés, notamment d’ordre bancaire.

La toute première cause de cet arrêt brutal, cependant, c’est cette tempête-catastrophe naturelle- de février 2012   et qui avait provoqué une marée basse exceptionnellement fatale, en ce sens qu’elle avait empêché l’acheminement de l’eau de mer dans le puisard (chambre d’alimentation en eau de mer), engendrant ainsi la cavitation des pompes, incident technique ayant causé 80% de perte de cheptel…

Le pisciculteur déplore, en outre, le fait qu’aucune compagnie d’assurance à travers tout le pays ne propose quelconque police d’assurance pour la protection du cheptel aquacole (poisson). « Il n’en existe pas ! », « ce qui expose plus que jamais notre activité à toutes sortes de risques potentiels » soupire, exaspéré et dépité,  l’investisseur.

Dans une correspondance adressée au PDG de la BADR (Banque de l’agriculture et du développement rural), banque dont, en définitive, semble absolument dépendre le sort-voire la survie, la « réanimation »- de la ferme aquacole des Hocini, le pisciculteur explique que ses nouveaux emprunts étaient dus à la nature accidentée du terrain-site ainsi qu’à la complexité particulière de l’activité pisciculture, notamment en terre ferme, à des difficultés techniques, bureaucratiques, logistiques et financières, ayant surgi inopinément lors du lancement de la production en novembre 2005.

Et d’évoquer de nombreux déboires avec l’administration des douanes et celle des Impôts en relation avec l’accès à la carte magnétique d’identification fiscale, l’Agriculture, la DCP pour l’obtention du certificat sanitaire de l’aliment, d’attirer également l’attention sur l’absence d’assistance technique de la part du Ministère de la pêche et des ressources halieutiques et des différents instituts publics spécialisés, la non-disponibilité sur le marché national du matériel spécifique à ce type d’activité, dont les souffleurs, les générateurs d’oxygène, les pompes de grand débit « spécial eau de mer »…

« …Sur ces diverses contraintes et autres embuches sont venues se greffer les mises en demeure, à l’époque (2004-2005), du Ministère de la pêche et des ressources halieutiques, nous enjoignant de procéder à la mise en exploitation diligente de la ferme ou alors de rembourser la subvention qu’il nous avait accordée, si bien que nous nous étions vus contraints de procéder au lancement de l’exploitation mais hâtivement, précipitamment sans avoir au préalable fait les essais techniques requis afin d’évaluer la capacité des pompes ou la disponibilité de l’eau de mer dans le puisard entre les inter-saisons (tempêtes et marées basses)…

Le choix du type de bateau  (ferry ou cargo) pour le transport de l’alevin en provenance de Lorient (France)était aussi un autre dilemme, pour nous…En provenance de Lorient (France), il est arrivé que l’alevin, avant de nous parvenir enfin, a dû transiter par Marseille, Almeria (Espagne) et Ghazaouet…Avec, à la clé, des risques sûrs de détérioration ».

Avant de « reconnaître » que « toutes ces tracasseries auraient pu nous être évitées si, à l’époque, c’était M. Sid Ahmed Ferroukhi qui était Ministre de la pêche et des ressources halieutiques avec son nouveau staff, suivant de très près l’évolution de la pêche et de l’aquaculture, constamment à l’écoute des professionnels de la pêche, ne ménageant aucun effort pour faire bénéficier les investisseurs dans cette activité (pêche et aquaculture) de savoir-faire…

M. Djamel Hocini dit également « beaucoup apprécier l’attitude franche et encourageante de SOFINANCE, et de citer un extrait de la toute récente correspondance de cette institution financière en réponse au courrier « de détresse » (en quelque sorte) que lui avait adressé la gérance de « Malikat al bahr » :

« …SOFINANCE est disposée à étudier le projet en vue de permettre la relance de l’exploitation. Cependant, nous subordonnons au préalable notre participation au retraitement (durée, effacement des agios et commissions) bancaire avec différé pour assurer un démarrage dans de meilleures conditions financières ».

En attendant, toujours selon le pisciculteur, la BADR serait loin de cette flexibilité tant souhaitée par ce dernier, d’autant qu’elle « a exigé d’hypothéquer le terrain-site sur lequel est réalisé la ferme aquacole, ainsi que le bien-immeuble qui s’y trouve bâti… ». « …Il se trouve que la valeur de notre terrain est le triple du prêt… », ajoute  M.Dj. H. En tout état de cause, s’il est vrai qu’ une « certaine » logique voudrait que SOFINANCE et la BADR, toutes deux des institutions étatiques, puissent finir par   « s’entendre » sur de tels cas (celui-ci en particulier), par le biais d’une « formule » qui sied à la situation, c’est-à-dire à même de convenir aux trois parties ( ?..)

il n’en demeure pas moins que la sempiternelle et non moins épineuse question du seul financement déjà ( ! ) (par les banques) de projets, bien avant celle de retraitement-rééchelonnement ( !), constitue en elle-même une source de controverse, de polémique et ...d’exaspération pour bien des porteurs de projets...

Un rappel des propos que nous avait tenus M. Djamel Hocini lors de la visite de sa ferme, tout en nous la présentant techniquement : « …Nous nourrissons le vœu (réalisable) de porter la production de poisson à 1000 tonnes/an et même, pourquoi  pas, envisager l’exportation ! » nous avait déclaré M. Djamel Hocini, propriétaire de cette ferme il y a déjà quelques années, bien avant sa mise en exploitation.

« Ce projet d’envergure a été réalisé dans le cadre du premier plan de relance économique initié par le Président de la République, M. Abdelaziz Bouteflika », ajoute le pisciculteur, et il a été concrétisé  à Tazeboujt-sur-mer, sur la magnifique côte ouest de Bejaia. Il s’agit, dans cette ferme, de pisciculture semi-intensive en circuit ouvert  et sur la terre ferme. Impressionnante, la ferme aquacole « Malikate Al Bahar » l’est indéniablement, s’étalant sur une superficie de 5500 m² et constituée de 76 bassins d’élevage dont 38 grands bassins de 56 m3 chacun, ayant pour fonction  les phases de pré-grossissement et grossissement. 

Tandis que les autres bassins (38, et de 05m3 chacun) sont, eux, « destinés à l’élevage de prophylaxie en cas de maladies », fait-on savoir. La mise en service et donc l’exploitation du projet aura requis des équipements indispensables, en l’occurrence 02 groupes électrogènes de 60 KVA chacun, un  transformateur de moyenne tension pour lequel l’investisseur a déboursé la coquette somme de 400 millions de centimes, 02 pompes hydrauliques centrifuges de  220 m3/heure, 01 laboratoire d’analyses de la qualité de l’eau ainsi qu’un filtre bobiné de 220 m3 lié à un transit-tampon.

Le filtre bobiné est un appareil-dispositif sphérique pesant 07 tonnes à lui-seul, d’un diamètre de 03 mètres et mesurant 03 mètres de hauteur. Sa fonction consiste à filtrer l’eau et ce grâce à l’action combinée du sable et du gravier qu’il contient. 04 bassins de décantation (décanteurs Lamallaire) devant recueillir tous les résidus décantés avant de les déverser sur une crique constituent, par ailleurs, les autres structures du projet.

Qu’en est-il de l’exploitation, voire de la production ? « Au démarrage de l’exploitation, il était prévu une production annuelle de 30 à 50 tonnes de loup de mer puis, une fois atteint un rythme de croisière, cette production annuelle devait  s’élever à 120 tonnes entre bar (qarous, en Arabe dialectal algérien), loup de mer et daurade, du moins une fois le process de grossissement maîtrisé », était-il précisé.

D’ailleurs,  dans la perspective, précisément, d’optimiser la production (de poisson), l’acquisition de cages de 06 à 12 mètres de diamètre destinées à porter ladite production à 1000 tonnes/an devenait indispensable.

A noter que le montant global de cet investissement est de 110 millions de DA. M. Djamel Hocini rappelle que les travaux d’aménagement du site, de construction des bassins et d’installation des équipements ont été entamés en 2005 et ce grâce à un montage financier réalisé avec la BADR (Banque algérienne de développement rural), appuyé par une subvention du ministère de la pêche et des ressources halieutiques.

Le projet a, en outre, bénéficié des avantages accordés à tout investisseur dans le cadre du dispositif de l’Agence nationale de développement (ANDI). En matière d’emplois, toujours à la veille du jour-j- du démarrage de l’exploitation, l’effectif devait comprendre 10 employés en permanence et 20 autres occasionnellement, mais l’acquisition de cages de 06 à 12 mètres de diamètre allait porter le nombre d’emplois permanents à trente (30).

Pourtant, tout cet élan d’enthousiasme et de motivation allait  subitement être freiné par des « tracasseries » d’ordre administratif, telle que la carte magnétique qui ne lui avait « pas été délivrée à temps », ou encore « le certificat sanitaire pour l’aliment », « exigé », nous avait expliqué M. DJ. Hocini, « depuis la diffusion d’une note émanant de la direction des services vétérinaires du ministère de l’agriculture et du développement rural », certificat pour lequel, pourtant, l’investisseur-pisciculteur avait déposé dans les délais requis une demande en bonne et due forme, demande à laquelle il avait même joint le certificat sanitaire du fournisseur (Biomar, Angoulème, France).

La mise en service (démarrage) de la ferme était ainsi bloqué, dans l’attente de ce sésame qu’était le certificat sanitaire pour l’aliment, sans lequel l’investisseur-pisciculteur ne pouvait procéder à l’enlèvement de 48 tonnes d’aliment d’une valeur de 600 millions de centimes en souffrance dans les hangars du port (de Bejaia)et exposés à un risque certain d’avarie ! Que de déboires, donc, au tout début de cette passionnante aventure qu’est la pisciculture…

C’est dire que ce n’était pas du tout aisé, au départ mais tout a fini par  rentrer dans l’ordre, si bien qu’en juillet 2011 120.000 alevins étaient déjà en culture. Les perspectives s’annonçaient prometteuses pour la ferme aquacole qui employait déjà 12 ouvriers quand intervînt la catastrophe naturelle de novembre 2012 qui vit 80% de la production de poisson décimés, mortalité due à la cavitation (carence en eau). 

« Les pompes tournaient à vide et n’arrivaient pas à ramener de l’eau de mer dans les bassins…La mer avait considérablement reculé, en effet, conséquence du séisme qu’avait  enregistré  Bejaia à l’époque », explique M. Djamel Hocini. Ce dernier a donc dû subir à son tour les effets induits par un investissement productif avorté et c’est alors qu’il a sollicité SOFINANCE, un organisme étatique (Société financière d’investissements, de participation et de placements) pour lui venir en aide dans ses préparatifs de redémarrage de l’exploitation.

SOFINANCE, tout récemment, a répondu favorablement au pisciculteur (qui, du reste, en est ravi). Il s’agira, désormais, d’attendre que la BADR envers laquelle le pisciculteur est encore endetté, accorde un retraitement de ladite dette pour que SOFINANCE puisse enfin venir à la rescousse de « Malikate Al Bahr ».

Les cages de 12 mètres de diamètre pouvant permettre d’augmenter considérablement la production seraient alors financées par SOFINANCE, tout comme le complément d’aménagement de la ferme aquacole. Celle-ci pourrait ainsi redémarrer dans environ trois mois, après l’accord escompté de la BADR. Malikate Al Bahr se sentirait, dès lors, comme… un poisson dans l’eau…Inch’Allah ! Gageons, par ailleurs, que la BADR ne restera pas insensible à l’appel de ce très honnête pisciculteur qui confie ceci à DK NEWS :

« …A présent, nous sommes dans l’expectative, espérant que les promesses du gouvernement quant à sa détermination à « booster » l’aquaculture se concrétiseront bientôt… ». Comme, par exemple, en intervenant pour la levée de certains « obstacles » procéduriers et l’incitation à davantage de flexibilité en matière d’aide à la réalisation de projets catalyseurs de développement économique ?..
 

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