
Une semaine après les incidents xénophobes visant les réfugiés en Allemagne, médias, personnalités politiques et communauté locale se mobilisent en leur faveur, afin de leur apporter aide et refuge dans un pays qui se dit «terre d'accueil des réfugiés».
Incendies volontaires, menaces, agressions, ou encore manifestations, comme à Heidenau (Saxe, est), se sont succédé en Allemagne durant la semaine, conduisant Angela Merkel à visiter pour la première fois un centre de réfugiés, dans cette petite ville, théâtre de heurts entre police et militants d'extrême-droite.
Les quotidiens allemands les plus populaires ont tous été au rendez-vous pour se montrer solidaires avec les réfugiés à travers des grands titres à la une. «Nous aidons», proclamait samedi la Une du quotidien Bild, le plus lu d'Europe, qui a choisi de lancer «une grande opération d'aide» en faveur des réfugiés pour «montrer que les braillards et les xénophobes ne gueulent pas en notre nom».
L'Allemagne fait face à un afflux sans précédent de réfugiés, l'Office fédéral en charge de ce dossier prévoyant l'arrivée de 800.000 demandeurs d'asile en 2015.
A l'image de Bild, d'autres médias, comme l'hebdomadaire Der Spiegel ou le grand quotidien de Munich Süddeutsche Zeitung (SZ) s'engagent aussi.
Le premier proposait une double couverture, la première consacrée à la «sombre Allemagne» et illustrée par une photo d'un foyer de réfugiés en flammes, la seconde montrant «l'Allemagne lumineuse» et des enfants de réfugiés lançant des ballons dans le ciel.
Berlin, Paris et Londres se réunissent
Afin de faire face à la conjoncture de xénophobie qui menace les réfugiés, les ministres français, allemand et britannique de l'Intérieur ont appelé dimanche à l'organisation d'une réunion des ministres de l'Intérieur et de la Justice de l'Union européenne «dans les deux prochaines semaines» face à la crise des migrants.
Bernard Cazeneuve, Thomas de Maiziere et Theresa May «demandent à la présidence luxembourgeoise de l'Union européenne d'organiser un premier conseil JAI (Justice et Affaires Intérieures) dans les deux prochaines semaines pour préparer efficacement les décisions de celui du 8 octobre, et avancer concrètement», selon un communiqué commun publié au lendemain d'une rencontre des trois ministres en marge d'une réunion à Paris de neuf pays européens consacrée à la sécurité dans les transports.
Au cours de cette rencontre, ils ont «souligné la nécessité de prendre des mesures immédiates pour faire face au défi constitué par ces flux migratoires».
Ils rappellent notamment «l'urgence de mettre en place, et au plus tard avant la fin de l'année» en Grèce et en Italie des «hot spots», des centres de tri destinés à faire la distinction entre personnes pouvant relever du statut de réfugiés et migrants économiques clandestins. Bernard Cazeneuve et Thomas de Maiziere avaient déjà plaidé en ce sens lors d'une réunion bilatérale le 20 août à Berlin.
Les trois ministres souhaitent également l'établissement, «très rapidement», d'une «liste des pays d'origine sûre» afin de «compléter le régime d'asile européen commun, protéger les réfugiés et assurer l'effectivité des retours des migrants illégaux dans leurs pays de provenance».
Sur les sept premiers mois de l'année 2015, le nombre de migrants aux frontières de l'Union européenne a atteint 340.000, contre 123.500 sur la même période en 2014, selon l'agence Frontex chargée des frontières extérieures de l'espace Schengen.
Les drames se multiplient pour ces personnes qui tentent de rallier l'Europe, que ce soit en Méditerranée où plus de 2.300 migrants ont perdu la vie depuis le début de l'année, ou au sein même de l'UE.
Les corps de 71 migrants ont été retrouvés jeudi enfermés dans un camion sur une autoroute en Autriche.
Hongrie : Afflux de migrants à la gare internationale de Budapest, le trafic suspendu
La gare internationale de Budapest était en cours d'évacuation hier et le trafic suspendu en raison de l'afflux de centaines de migrants qui tentaient de monter à bord de trains pour l'Autriche et l'Allemagne, ont rapporté les médias.
«Aucun train n'arrivera ni ne partira de la gare de Keleti jusqu'à nouvel ordre.
Nous demandons à tout le monde de quitter les lieux», a annoncé un message diffusé par haut-parleur, alors que des centaines de policiers commençaient à évacuer la gare d'où de nombreux migrants avaient pu partir lundi pour l'Autriche, puis l'Allemagne.
La décision d'évacuation est intervenue alors que quelque 500 migrants essayaient de monter à bord du dernier train pour Vienne, selon des journalistes sur place.
Des migrants se sont mis à crier alors que des centaines de policiers, dont des membres des forces antiémeutes, ont commencé à les diriger vers la sortie.
Les migrants n'ont pas opposé de résistance et aucun incident n'a été rapporté, selon l'AFP.
Des centaines de migrants attendaient ensuite devant la gare, d'où partent habituellement tous les trains pour l'Autriche et dont la police bloquait l'entrée.
Un total de 3.650 migrants partis en train de Budapest sont arrivés à Vienne lundi, un record cette année pour une seule journée, a annoncé hier la police autrichienne.
Autriche : 3.600 migrants en provenance de Hongrie arrivent à Vienne
Un total de 3.650 migrants sont arrivés par train à Vienne lundi, en provenance de Hongrie, un record cette année pour une seule journée, a annoncé hier la police autrichienne.
Les autorités hongroises avaient autorisé lundi le départ en train des migrants, en dépit de l'absence de visas de beaucoup d'entre eux.
«Nous vérifions actuellement combien parmi eux sont des demandeurs d'asile», a déclaré à l'AFP le porte-parole de la police autrichienne, Patrick Maierhofer.
Ces migrants se trouvaient depuis plusieurs jours dans des camps improvisés dans les gares de Budapest, avant que les autorités aient décidé finalement de les laisser partir.
Un grand nombre d'entre eux a passé la nuit de lundi à mardi dans la gare de Westbahnhof à Vienne, espérant poursuivre leur voyage vers l'Allemagne, qui a assoupli la semaine dernière les conditions d'octroi du statut de réfugiés aux Syriens fuyant leur pays. D'autres migrants, pour la plupart dépourvus de visas, ont pu monter dans un train à destination de la ville autrichienne de Salzbourg, tandis que d'autres partaient pour Munich, dans le sud de l'Allemagne.
Un train en provenance de la capitale hongroise avec environ 400 migrants à bord est ainsi arrivé lundi soir en Bavière.
350.000 migrants ont traversé la Méditerranée, 2.643 sont morts en 2015
Plus de 350.000 migrants ont traversé la Méditerranée depuis janvier, et plus de 2.643 personnes sont mortes en mer après avoir tenté de rallier l'Europe, a annoncé hier l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
Au total, plus de 350.000 personnes ont traversé la Méditerranée cette année, contre quelque 219.000 en 2014, rapporte l'organisation basée à Genève dans un document distribué aux médias.
Ainsi, près de 220.000 sont arrivés en Grèce, et près de 115.000 en Italie, alors que plus de 2.000 sont arrivés en Espagne, et une centaine à Malte, selon la même source.
Vendredi, l'OIM faisait état dans un précédent bilan d'environ 330.000 migrants et réfugiés.
Cette périlleuse traversée a cependant coûté la vie à quelque 2.643 migrants, selon l'OIM.
En 2014, sur toute l'année, quelque 3.500 migrants et réfugiés avaient trouvé la mort ou avaient été portés disparus en Méditerranée, selon le Haut-commissariat de l'ONU pour les réfugiés (HCR).
Un trafic de faux passeports syriens vers l'UE s'est instauré
Un trafic de faux passeports syriens s'est instauré, notamment en Turquie, pour faciliter l'entrée de migrants dans l'Union européenne (UE), a indiqué hier l'agence européenne de surveillance des frontières (Frontex).
«Il y a des personnes qui aujourd'hui sont en Turquie, achètent des faux passeports syriens parce qu'elles ont évidemment compris qu'il y a un effet d'aubaine puisque les Syriens obtiennent le droit d'asile dans tous les Etats membres de l'Union européenne», a déclaré le patron de Frontex, Fabrice Leggeri, à la radio Europe 1.
«Les personnes qui utilisent les faux passeports syriens souvent s'expriment en langue arabe.
Elles peuvent être originaires d'Afrique du Nord, du Proche-Orient mais elles ont plutôt un profil de migrant économique», a ajouté M. Leggeri.
Ce trafic ne semble pas peser pour l'heure sur la sécurité dans l'UE.
«Aujourd'hui on n'a pas d'élément objectif pour dire que des terroristes potentiels sont entrés en Europe comme cela», a-t-il noté, tout en appelant à rester «vigilant à toutes nos frontières».
Le patron de Frontex a réitéré son appel à l'envoi de gardes-frontières supplémentaires de pays de l'UE en Grèce afin de permettre l'enregistrement de tous les migrants se présentant dans ce pays, aux frontières extérieures de Schengen.
M. Leggeri a abondé dans le sens de la chancelière allemande Angela Merkel qui a mis en garde lundi contre une remise en cause de l'espace Schengen si les migrants affluant en Europe ne sont pas équitablement répartis entre les différents Etats membres de l'UE.